ESCALANE (fi) - The Days Of Decay (2016)
Label : Inverse Records
Sortie du Scud : 22 janvier 2016
Pays : Finlande
Genre : Pop Metal
Type : Album
Playtime : 10 Titres - 41 Mins
En Finlande j'étais, en Finlande je reste. Après tout, j'aime bien ce pays, du moins ce que j'en connais. Musicalement s'entend, puisque je n'y ai jamais mis les pieds, à mon grand dam. Mais les artistes locaux m'ont converti à leur vision des choses, qui vont à l'encontre du climat rigoureux des pays nordiques, et d'ailleurs, puisqu'on en est là, je m'en vais vous narrer l'histoire neuve et enchanteresse d'un nouveau groupe assez spécial.
En me rendant sur le site d'ESCALANE, j'ai pu constater avant toute chose qu'ils étaient plutôt jeunes, frais, enthousiastes et souriants. Les photos promo ne laissent planer aucun doute, on y voit leurs quatre frimousses arborer un air plutôt engageant, on y aperçoit des T-shirts de CARCASS, EXTREME, et tout ça fleure bon la génération Metal en goguette, prête à prendre la relève des grands.
Hanna (chant, claviers), Juha (guitare), Joonatan (basse) et Iiro (batterie) se réclament d'un genre assez peu assumé, le Pop Metal, et si quelque part je dois leur concéder une part de vérité, il me faut néanmoins nuancer quelque peu cette "auto catégorisation".
Certes, ce premier album sent bon l'adolescence à peine terminée, étale de jolies mélodies sucrées, mais il se rapproche plus selon moi d'un Metalcore un peu surdosé en saccharose, qu'à un véritable Metal Pop tel que le pratiquaient les modèles du genre, CHEAP TRICK ou POISON en tête.
A l'écoute, de nombreuses influences remontent à la surface, et d'ailleurs, rien n'est fait pour qu'elles soient dissimulées. On pense assez vite à PUDDLE OF MUDD, EVANESCENCE ou THE MURDER OF MY SWEET, et même aux ukrainiens de THE HARDKISS, avec toutefois, moins d'originalité dans les bagages. La tendance est aux gros riffs qui affrontent un synthé assez décalé dans ses sonorités, le tout soutenu de près ou de loin par une rythmique qui se contente d'assurer ses arrières. Le tout est chapeauté par la voix délicieusement acide et rose comme un bonbon d'Hanna, qui survole les compositions de ses tonalités teen, sans pour autant se prendre pour une lycéenne ayant trop redoublé.
Mais le bonus d'un tel album, reste sa diversité. Le quatuor aurait pu se la jouer facile, mais ils ont le sens de la contradiction. Alors ils essaient diverses choses, avec plus ou moins de bonheur, mais ils essaient, et rien que pour ça, je les aime bien. En plus, ils sont plutôt drôles dans leur style, et n'ont pas l'air de se prendre pour des stars, ce qui ne fait qu'ajouter à leur capital sympathie.
Mais plus concrètement, The Days Of Decay reste néanmoins une affaire sérieuse. Ils ont beau être jeunes, ils savent ce qu'ils veulent, et le mettent en pratique tout au long de ces dix pistes très accrocheuses. On retrouve donc la patte Metalcore dans les riffs de Juha, fan de MAIDEN et de MUSE, qui fait montre d'un gros potentiel malgré son jeune âge, mais aussi dans la frappe du tandem Joonatan/Iiro, qui savent se montrer solides, inflexibles, mais assez souple pour faire rebondir les plans sans forcer. Quant à Hanna, son cas ayant déjà été abordé, je me bornerai à dire que son timbre de voix est très agréable, et qu'elle est largement capable d'utiliser toute la palette d'émotion qu'une interprète doit incarner, qu'elle sait gueuler un bon coup, sautiller le long de ses cordes vocales avec candeur, et se faire plus femme et sensuelle, tout en gardant cette légèreté de timbre qui la caractérise.
L'album en lui même est d'une construction étrange. Sa progression est assez fascinante, et si les morceaux les plus facile d'accès sont placés en début d'effort, vous constaterez qu'au fur et à mesure, les textures s'enrichissent, les développement s'assombrissent un peu, et que petit à petit, le ton change, se voulant parfois plus grave.
Et si tout débute par un gros hit potentiel (illustré d'une vidéo très rigolote d'ailleurs) qui se pose en mariage entre un GARBAGE bien énervé et une version libre et décomplexée de BRING ME THE HORIZON, "Waiting For The Sunshine" fait son job et accroche l'attention tout en restant suffisamment léger pour que l'on ne croit pas avoir affaire à une énième divagation Metalcore convenue.
"Singularity" continue dans cette veine, avec une jolie mélodie mineure, avant de se décaler sur quelques passages en duo clavier/voix assez fragiles pour apporter une nouvelle dimension à l'album. Tout est déjà en place, et en deux morceaux, ESCALANE prouve ses dires, et diffuse dans son Metal chauffé à blanc des harmonies effectivement très Pop, accentuées par cette voix hypnotisante.
Il est d'ailleurs impressionnant de voir à quel point le quatuor est en pleine osmose. Tout est huilé, calibré sans perdre sa candeur qui est tout sauf de la naïveté de jeunesse. Et "Fading In, Fading Out" de caler un peu plus l'auditeur dans son fauteuil, soufflé par cette puissance acidulée qui ne doit rien au hasard.
Les morceaux sont en fait des assemblages de parties toutes parfaites dans leur créneau, et alors qu'on croit avoir pigé le truc, le groupe change soudain de direction, et assombrit ses horizons pour mieux nous prendre au piège.
"Careless" se réclame en effet plus du Metalcore légèrement symphonique, dans la veine de THE MURDER OF MY SWEET, en moins emphatique bien sur, mais à ce moment précis, Juha lâche ses riffs les plus lourds et concentrés, tandis que Hanna se met à chanter comme Chibi de THE BIRTHDAY MASSACRE. D'ailleurs, les analogies entre les deux groupes deviennent alors plus flagrantes, même si ESCALANE sait garder un esprit moins torturé que ses aînés.
Ce qui ne les empêche nullement de partir dans des dédales moins lumineux, lorsque le lourd et lent "Reality" casse la dynamique de son tempo appuyé par exemple, mais de façon générale, la cohérence est de mise, et ce sont de sobres variations qui indiquent que le quatuor ne souhaite pas s'enfermer dans un schéma trop établi. En moyenne d'ailleurs, ils s'affilient d'eux mêmes beaucoup plus au Metal qu'à la Pop, et ne vous inquiétez pas, vous aurez droit à votre lot de guitares compactes et de chant puissant, et même parfois à de jolies influences Thrash comme sur ce superbe final "The Days Of Decay" qui passe en revue toutes les possibilités. Et comptez sur les jeunes finlandais pour vous trousser de terribles up tempi diaboliques qui vous trottent dans la tête pendant des heures, à l'instar de "The Spiral" par exemple, qui commence comme une fausse ballade avant d'envoyer la sauce.
Et la sauce, il ne se privent pas de la balancer pendant quarante minutes, c'est un fait! Mais en musiciens avisés, les quatre membres d'ESCALANE ne se contentent pas de réciter l'abécédaire du Metal moderne, et en détournent les codes pour l'adapter à une Pop nordique typique, et savent distiller de petits instants truffés d'arrangements ludique et prenants. En somme, The Days Of Decay prouve que la jeunesse est beaucoup moins prévisible que certains aimeraient le croire, et surtout, que la scène finlandaise tient une forme extraordinaire en ce moment.
Un LP à l'image de ses concepteurs. Jeune mais pas conforme, frais mais pas naïf, souriant mais pas dupe.
Ajouté : Mardi 05 Janvier 2016 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Escalane Website Hits: 6064
|