Le jour où le père Kvarforth décidera de rentrer un minimum dans un moule prédéfini, ou même de suivre une simple norme, n'est manifestement pas encore arrivé. Après un Redefining Darkness de toute beauté qui clôturait cette saga en sept actes tout en agaçant de plus en plus les puristes de par son changement d'orientation, le nouveau SHINING est un album, mais sans en être un. Il s'agit de six morceaux tirés de l'époque III - Angst et IV - The Eerie Cold. Le réenregistrement de vieux matériel étant devenu monnaie courante ces dernières années, il ne fallait pas s'attendre à une simple revisite de ces morceaux. Vous avez lu ce qui est écrit plus haut ? Niklas ne fait rien comme tout le monde.

De par son artwork aussi dérangeant qu'énigmatique d'une part, cet album n'est ni plus ni moins que le reflet de l'esprit malade, et pourtant si génial, de Kvarforth aux débuts du groupe (fait qui ne s'est manifestement pas arrangé au fil des années). Et quant à la musique en elle-même, ce n'est rien de plus que du SHINING pur jus - même si l'objectivité de mon propos n'est pas totale, au vu des nombreuses critiques dont a souffert le disque depuis sa sortie. Six titres donc, reflets de la période la plus obscure de l'histoire sulfureuse de l'entité suédoise, sont donc passés par la case du ravalement de façade avec à la clé, un seul titre sur lequel Niklas a posé ses vocaux maladifs. Et par extension, cinq autres morceaux où le groupe a fait appel à différents prestigieux invités. Citons en vrac Maniac (SKITLIV, ex-MAYHEM), Famine (PESTE NOIRE) ou encore Attila Csihar (MAYHEM). Le son est très approximatif, voire brouillon, à des lieues de la production lisse et soignée dont ont joui les dernières sorties du groupe. Le titre d'ouverture, "Terre Des Anonymes" (avec Famine), est un condensé, une redécouverte de ce que SHINING crache au visage de l'humanité depuis plus de 15 ans. Les idées dans les arrangements et structures des morceaux ont été retravaillés afin d'accueillir au mieux la voix de son chanteur, conférant ainsi à chaque piste une noirceur nouvelle. Cependant, mis à part cet excellent titre au chant français, le reste de l'album, de par un minimalisme et une linéarité bien trop prononcés (et totalement assumés. Bah oui, Niklas, il nous emmerde !) se voit être rapidement redondant pour tous ceux qui auraient découvert le groupe avec un chef d'œuvre comme V- Halmstad ou VII – Född Förlorare.

Un essai pas totalement raté mais pas totalement réussi non plus, dans la mesure où un tel exercice de style relativement audacieux aurait sans doute demandé plus d'explorations musicales, plus de prises de risques. Car oui mon cher Niklas, tu es sans doute celui d'entre nous qui l'a le mieux compris : que l'on ait 10, 15, 25 ou 40 ans, la provocation est une arme redoutable, surtout en musique. Encore faut-il savoir s'en servir à bon escient.