Au départ multi-instrumentiste et fondateur de TRISTANIA, Morten Veland s’en était allé fonder pour lui tout seul SIRENIA. Le premier opus de son nouveau joujou, At Sixies And Sevens, avait des airs de Beyond The Veil (de son précédent groupe) et tout le monde se disait que la tradition serait assurée. Puis SIRENIA a pris un virage plus direct, nouvelle orientation complètement assumée par son leader. Leader qui, pour mener à bien son entreprise, n’a jamais hésité à renouveler son line-up : chanteuses, guitaristes rythmiques, etc … Tout y est passé.
Alors que Nine Destinies And A Downfall (2007) incarnait parfaitement le SIRENIA « new look » voulu par Veland, à base de singles en puissance (« My Mind’s Eye ») et de ballades séduisantes (« The Other Side »), The 13th Floor (2009) affinait le style tout en flirtant avec ce côté épique (« Sirens Of The Seven Seas », « The Seventh Summer ») qu’on croyait déjà jeté aux oubliettes. The 13th Floor pouvait presque prétendre au titre de synthèse ultime de SIRENIA.
Alors, quelques mois plus tard, première surprise et non des moindres : Pilar Gimenez Garcia, dite « Aylin », occupe toujours le poste de chanteuse. Même si les plus sceptiques lui reprochent une voix trop lisse et manquant de profondeur, la petite Espagnole réussit l’exploit d’enregistrer deux disques de suite avec ce diable de Veland. Chapeau bas. Deuxième surprise, moins agréable celle-ci : le guitariste norvégien ne s’est pas trop cassé la tête …
Ce qui semble le plus surprenant, c’est lorsqu’on établit une éphémère comparaison entre ce que Veland a pu proposer par le passé et la faiblesse de ses compositions actuelles. En fait, « faible » ne serait pas approprié. Mais a-t-il définitivement décidé de vouer sa fertile imagination musicale à MORTEMIA ? The Enigma Of Life, le nouvel opus de SIRENIA, n’est-il qu’un enchaînement de titres composés dans l’optique de tenir des singles potentiels ? Que la complexité et la richesse de At Sixies And Sevens paraît loin … Qu’on nous fasse le coup du musicien qui s’assagit et qui veut écrire une musique plus « simple », soit, on l’accepte. Les deux albums précédemment sortis ont démontré que Veland savait le faire avec talent sans dénigrer la qualité d’une chanson. Mais il y a des limites à ne pas dépasser ...
Passé les semblants de titres accrocheurs (« The End Of It All », « Winter Land »), The Enigma Of Life se résume à une accumulation de morceaux sans réelle saveur, quand la simplicité devient trop « simpliste » et quand le savoir-faire trahit un gros manque d’inspiration. Et malheureusement, là où les grand(e)s front(wo)men savent transcender, de par leur charisme et leur talent, une chanson moyenne, on ne peut pas dire que la petite Aylin ait les épaules assez larges. Pour le coup, ses détracteurs auront cette fois bien raison.
Il y a pourtant d’autres chanteurs qu’il faut saluer sur The Enigma Of Life. Ce sont les chœurs et pour leur rendre hommage nous allons tous les nommer : Damien Surian, Mathieu Landry, Emmanuelle Zoldan, Sandrine Gouttebel et Emilie Lesbros. Pourquoi leur rendre hommage ? Parce que chacune de leurs interventions file le frisson, l’exemple parfait étant « A Seaside Serenade ». Quel dommage que Veland n’ait pas plus misé sur ces chœurs majestueux !!! Comme pour le violon de Stéphanie Valentin, d’ailleurs, dont la partition se veut bien trop minimaliste. Tout ce potentiel sous-exploité confirme que notre leader aurait pu faire mieux, bien mieux. On surprend par instants des interventions lumineuses, comme ces petites envolées mélodiques à la guitare, des détails intéressants mais trop rares pour être efficaces. Pire, et c’est là plus inquiétant, certains passages évoquent des titres déjà entendus sur Nine Destinies And A Downfall ou The 13th Floor.
SIRENIA, pour son cinquième album, risque de retomber dans un relatif anonymat, celui des groupes à chanteuses au Metal trop formaté, celui des DELAIN (je vais encore me faire des copains sur Deezer, moi) et bientôt WITHIN TEMPTATION (on en reparlera bientôt). Quelle idée aussi d’aller s’engouffrer dans un Metal où ça bouchonne en permanence … Quand on sait mettre au monde des chefs d’œuvre et qu’on s’abstient à ce point-là, effectivement, on peut parler d’énigme.