SENTENCED (fi) - Ville Laihiala (Avril-2005)
C’est plus que rare, les membres du groupe finnois Sentenced vient d’annoncer qu’ils mettent fin à leur carrière. Leur dernier album se nomme donc très à propos The Funeral Album et sera suivi d’une tournée d’adieu où tous leurs fans pourront les voir une dernière fois sur scène. Chronique d’une mort annoncée…
Line-up : Ville Laihiala (chant), Miika Tenkula (guitare), Sami Lopakka (guitare), Sami Kukkohovi (basse), Vesa Ranta (batterie)
Discographie : Shadows Of The Past (1991), North From Here (1993), The Trooper (EP, 1993), Love & Death (EP, 1995), Amok (1995), Down (1996), Story: Greatest Kills (Best Of, 1997), Story: Greatest Kills (1998) [US-Import], Frozen (1998), Killing Me, Killing You (Single, 1999), Crimson (2000), North From Here/ Shadows Of The Past (Re-Release 2001), Amok/ Love & Death (Re-Release 2001), No One There (Single, 2002), The Cold White Light (2002), The funeral album (2005)
Metal-Impact. Peux-tu nous en dire davantage sur l’annonce relative à la fin de Sentenced ? Je sais que tu ne souhaites pas t’exprimer à ce sujet mais il y a tellement de rumeurs...
Ville Laihiala. C’est une décision que nous avons envisagée ces 18 derniers mois car certains membres du groupe ce sont mariés, ont eu des enfants… Mais ce n’est pas la raison principale. Sans rentrer dans les détails, disons que cela a à voir avec tous les sacrifices que l’on doit faire pour un groupe. En ce qui me concerne, je n’ai pas eu assez de temps à consacrer à ma paternité. Pour moi, c’est la principale raison pour arrêter.
MI. Quand la décision a t-elle été prise ?
Ville. La décision finale, celle où nous nous sommes dit “Oh, c’est le dernier album !” a été prise alors que nous étions en plein milieu de la phase d’écriture. Cela se voyait sur le visage de chacun, il suffisait juste que ça sorte. Dès que nous en avons commencé à en parler, c’est devenu plus détendu et nous avons pu nous investir dans cet album. Il nous restait à l’annoncer au public, ce qui n’a pas été simple mais qui nous a facilité les choses.
MI. Donc, vous l’avez annoncé aussitôt ?
Ville. Nous avons toujours été très honnêtes avec nos fans et ceux qui aiment notre musique, donc... Si nous n’en avions parlé qu’après la fin de la tournée, nous aurions eu ça sur la conscience à chaque concert et cela nous aurait affecté. Maintenant que tout le monde est au courant, il n’y a plus de pression, aucun malentendu. Lorsque nous sommes sur scène tout le monde sait que c’est pour la dernière fois ; le public et nous pouvons nous concentrer sur le plaisir d’être là.
MI. Comment Century Media a réagi ? Je crois qu’il vous reste un album sous contrat.
Ville. Oui, encore un. Je ne sais pas vraiment s’ils étaient tristes ou quoi, ce sont les affaires. Nous y avons des amis personnels et eux étaient vraiment désolés. Personne ne nous a mis la pression : “Vous devez faire ça. Honorez votre contrat, blablabla...”. Ils nous ont toujours accordé la liberté dont nous avions besoin.
MI. Je sais que les fans étaient vraiment tristes. Et ta famille, comment a-t-elle réagi ?
Ville. (soupir). Les seuls à faire un commentaire furent ma mère et ma femme. Ma femme m’a demandé si j’étais sûr de ma décision. Elle sait à quel point c’est important pour moi. Je ne sais pas ce qu’en pensent les autres car j’ai toujours été la brebis galeuse de la famille. Mes amis, eux, m’ont demandé : “Pourquoi, pourquoi, pourquoi ?”.
MI. Parce que cela a occupé une part importante de ta vie pendant des années...
Ville. C’est vrai et c’est important de bien comprendre que, même si nous avons pris cette décision, nous sommes émus. Et je pense que le poids de cette décision ne se fera vraiment sentir que plus tard, lors du dernier show ou 2/3 semaines après. Alors, nous réaliserons que tout est fini. Il faudra que tu me reposes la question dans 6 mois afin que j’ai le recul nécessaire.
MI. Et comment te sens-tu ?
Ville. Je suis en colère, triste, soulagé... Je n’ai pas pris conscience de tous les tenants et aboutissants, pas encore ; je me rappelle tous les bons moments et puis je vois les emmerdes, donc je veux me retirer ça de la tête. Et puis, c’est la fin d’un groupe, pas la fin du monde !
MI. Sur votre album précédent, on vous a reproché votre attitude “commerciale”. N’as-tu pas peur que cela soit encore pire cette fois, en annonçant votre séparation avec la sortie d’un album, puis une tournée et un DVD à suivre ?
Ville. Pourquoi les gens sont-ils si pessimistes ? Pourquoi ne considèrent-ils pas que nous fassions un dernier album, puis une tournée et un DVD pour les fans ? Et pour nous-mêmes, bien sûr. Nous voulons que tout se termine de façon respectable. Comment pourrions-nous vouloir mettre fin à ce groupe et avoir une préoccupation commerciale ? A quand date notre dernier hit radio ? Même si notre musique est mélodique et accrocheuse, nos paroles ne s’inscrivent pas du tout dans une logique commerciale. Il y a bien longtemps que nous avons enterré le rêve d’être riche ! La musique est un moyen de m’exprimer que je ne vendrai pour rien au monde !
MI. Une fois encore vous avez tout fait vous-même (y compris le design). Avez-vous besoin de tout contrôler ?
Ville. Je ne crois pas. Nous n’y pensons pas. Nous répétons tous ensemble, puis nous appelons le producteur, nous allons au studio et enregistrons l’album. C’est toujours comme ça que ça se passe. Tous les cinq, nous faisons notre musique ; notre producteur nous donne des idées mais il ne nous dit pas quoi faire.
MI. Tu dis que cet album est plus profond, à la fois musicalement et au niveau des paroles. Peux-tu expliquer pourquoi ?
Ville. Musicalement, c’est une sorte de voyage à travers la carrière de SENTENCED. Les chansons sont variées ; par exemple, tu as du Rock sur “Vengeance With A Smile”. En ce qui concerne les paroles, quelqu’un m’a dit qu’il y a le mot “goodbye” sur chaque morceau. Je n’en suis pas sûr mais c’est vrai que chaque morceau est une sorte d’adieu.
Pour ce qui est de la profondeur des paroles, je pense qu’il y a un niveau qui échappe plus ou moins au public car certains textes traitent de choses par lesquelles nous sommes passés. Ce n’est pas égoïste car je pense que même quelqu’un de l’extérieur peut en retirer quelque chose.
MI. C’est une sorte de testament ?
Ville. Je pense.
MI. Vous vouliez sortir un album de “première classe”...
Ville. Ce n’était pas le but premier. Il fallait mettre un terme à tout cela pour nous-mêmes, principalement, puis pour les autres.
MI. Vous avez saisi l’opportunité de faire ce que vous n’aviez pas pu faire auparavant ?
Ville. Plus ou moins, oui. Et aussi pour faire sortir tout ce que nous avions encore en nous. Ça n’a jamais été : “Allons bosser, il faut faire quelque chose de différent”. Tout cela était en nous et nous avons juste essayé d’en tirer le meilleur parti et de retranscrire nos émotions sur l’enregistrement. Oui, les ciseaux, les bruits de cuillère, on s’est bien amusé avec ça !
MI. Et à propos des chœurs ?
Ville. C’était une dizaine de fillettes charmantes entre 7 et 10 ans. Ce n’était pas vraiment préparé, elles découvraient le studio, touchaient les micros et leur prof leur a dit “Ok, voilà ce que vous devez faire”. Elles ont appris très rapidement. Elles avaient un peu peur de nous… il suffit de nous regarder ! (Il prend sa grosse voix) “C’est comme ça que vous devez chanter”. Notre batteur, Vesa, connaissait leur prof mais je ne connais pas les circonstances. C’était sympa de les entendre chanter. Et c’était drôle.
MI. Sur le plan musical, j’ai lu que le fait de spliter ne vous a pas influencé, hormis sur le dernier titre “The End Of The Road” ? Peux-tu nous parler de ce morceau ?
Ville. Quand Mika, qui compose la plupart des morceaux, a écrit celui-ci, nous savions déjà que ce serait le dernier. Je n’ai pas écrit les paroles donc je ne peux pas en parler. La chanson commence un peu mélo, triste, un peu funérailles, et puis la dernière partie t’emporte avec un sentiment étrange de vide… Pour moi, ce morceau sonne comme SENTENCED. Je ne peux l’écouter sans verser une larme. Un jour, j’étais au studio Finnvox où se déroulait le mixage et Sami est revenu me faire écouter l’album, c’était poignant. Jusqu’à présent, c’était la chanson “The Rain Keeps Falling Down” qui me faisait pleurer, maintenant c’est “The End Of The Road”.
MI. L’évolution du groupe est manifeste d’un album à l’autre. Avez-vous le sentiment d’avoir atteint votre stade ultime avec The Funeral album ?
Ville. C’est quoi le stade ultime ?
MI. Disons un niveau au-dessus…
Ville. ...
MI. Tu ne fais pas d’analyse, c’est ça ?
Ville. Non, je pense qu’analyser est une perte de temps. Nous n’avons pas franchi consciemment une étape parce que nous mettons fin à tout ça, alors… Par contre je pense vraiment que nous avons écrit un album qui va émouvoir les gens.
MI. Que ressens-tu lorsque tu repenses aux premières années du groupe ?
Ville. Pas mal d’alcool gratis, de longues tournées, beaucoup de concerts. Ensuite, tu perds tes illusions et tu réalises à quel point tout ça, c’est de la merde…
MI. C’est triste !
Ville. Enregistrer des albums, faire des concerts, se faire des amis dans le monde entier sont les meilleures choses que j’emporterai avec moi dans la tombe. Tout le reste, c’est des conneries. Toutes ces histoires de rockstar, cette hystérie, ce business, c’est là parce que des mecs en font leur commerce. Les histoires de business, j’en m’en suis toujours fichu.
MI. Y avait-il un message que vous essayiez de passer à travers vos albums ?
Ville. Je ne sais pas. Je pense que nous avons posé quelques questions à travers notre musique, nous avons fait réfléchir. Je n’ai pas de réponse. Qui en a ? J’espère que personne ne prend ça trop au sérieux.
MI. Comment voudriez-vous qu’on se souvienne de SENTENCED ?
Ville. Comme d’un groupe qui a fait ce qu’il avait envie de faire, sans compromission, dans l’honnêteté.
MI. Quel a été ton meilleur souvenir avec ce groupe ?
Ville. Oh mon Dieu, il y en a tant ! Le premier qui me vient est le Dynamo en 1996 devant 3.000 personnes. Avant ça, nous ne jouions que devant quelques centaines de spectateurs. Nous regardions la foule, très étonnés.
MI. Et avec les autres membres du groupe ?
Ville. Hum. Nous avons baisé comme des fous. Tous les cinq ! (rires). J’ai encore de l’herpès.
MI. As-tu d’autres projets musicaux ?
Ville. J’ai un autre groupe nommé POISON BLACK qui sort un nouvel album à la fin de l’année. Donc ma prétendue carrière va s’achever à la fin de l’été 2006. Je vais enfin prendre des vacances qui vont durer encore et encore et encore…
Il doit bien y avoir une thérapie de groupe, parce que je ne peux me passer de la musique sinon j’explose.
MI. Quelques mots à propos du DVD ?
Ville. Je pense que nous allons enregistrer notre dernier concert. Nous allons aussi y mettre tout ce que nous avons filmé pendant des années ; il y a beaucoup de choses. Nous allons alterner les chansons live et les scènes backstage ou dans le bus pour montrer aux gens qu’on va aux chiottes et qu’on bouffe des patates… On ne va pas se prendre trop au sérieux.
MI. Je te laisse conclure…
Ville. Je veux juste remercier les gens qui ont été avec nous toutes ces années. Ecoutez les albums et souvenez-vous de nous, s’il vous plait…
Ajouté : Mardi 03 Mai 2005 Intervieweur : Kandra Lien en relation: Sentenced Website Hits: 59487
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