La valeur n'attend pas le nombre des années. Demandez à Mick Brown. Du haut de ses 58 balais, copieusement fêtés le 8 septembre 2014, le bonhomme, connu pour s'être accoquiné avec Ted Nugent, LYNCH MOB et DOKKEN (dont il est batteur depuis 1977), a réalisé en 2012 un rêve de gosse en participant au premier album de T&N (pour "Tooth & Nail"). Non pas que cette formation aux contours de supergroup déplace les foules, mais quand même, avec un tel line-up, difficile de réfuter l'idée que T&N soit un vulgaire passe-temps. Sont de la partie sur Slave To The Empire George Lynch (ex-DOKKEN, ex-LYNCH MOB), Jeff Pilson (FOREIGNER, LYNCH MOB, ex-DOKKEN, ex-DIO) et le polyvalent Brian Tichy (ancien collaborateur live pour Ozzy Osbourne, QUEENSRYCHE, AEROSMITH, SEETHER et studio pour NICKELBACK, WHITESNAKE, FOREIGNER, Billy Idol et Vinnie Moore). Rien que ça...

Souvent considéré comme la bouée de sauvetage des anciens de la maison DOKKEN, T&N, sans surprise, va faire ses preuves avec ce premier opus et se désolidariser de cette comparaison qui lui colle un peu trop à la peau. C'est en tout cas ce qu'on croit dur comme fer après le passage ébouriffant de l'éponyme et de ses qualités de tube Hard Rock / Heavy Metal. L'intro fonce à 200 à l'heure, le refrain se greffe dans nos mémoires collectives et le solo colle une sacrée fessée aux branleurs de manche. Les américains font leur propre tambouille mélodique avec une aisance légitimée par de nombreuses années de pratique. Mais c'est ensuite que Slave To The Empire va révéler son vrai contenu. Je n'ai pas prêté attention au début à "Tooth And Nail", pas plus qu'à "It's Not Love", mais à force de réécoutes, j'ai eu le flash. Oui, T&N a bel et bien piqué deux titres au répertoire de DOKKEN en y invitant respectivement Doug Pinnick (KING'S X) et Robert Mason (WARRANT). Ce choix fort va conditionner le reste de l'album qui, s'il évolue en surrégime sur les compositions propres à T&N ("When Eagles Die", "Mind Control"), fait plutôt dans le Hard Rock propret et réinterprété sur "Into The Fire" (quel jeu acoustique sur la fin !), "Alone Again" et "Kiss Of Death", trois titres également empruntés aux idoles de Los Angeles. Arrivent alors avec leurs gros sabots l'immense Sebastian Bach et le non-moins influent Tim "Ripper" Owens. Deux autres invités de marque qui feront basculer ce premier full-lenght dans une dimension parallèle. 50% T&N, 50% DOKKEN, Slave To The Empire a le cul entre deux chaises et finalement, renseigne beaucoup moins que prévu quant aux capacités brutes de T&N, qui barbotte sans prétention dans ce microcosme Hard Rock US et ne s'y distingue qu'à force d'invités prestigieux et de reprises élégantes. L'attention se focalise surtout sur "Alone Again" et autres "Into The Fire", alors qu'une création raffinée comme "Rhythm Of The Soul" n'a rien à envier à du DOKKEN.

Tout ceci est agglutiné dans un album classique et percutant, exécuté à la perfection mais tronqué par de nombreuses redites. Honnêtement, on aurait aimé que T&N se dévoue à sa propre cause et mette davantage l'accent sur une hypothétique nouvelle force Heavy Metal débarquant d'outre-Atlantique. Mais aucune illusion n'est permise. Ces musiciens n'ont plus rien à prouver et se font avant tout plaisir. Qu'à cela ne tienne, assurément, on en prendra avec eux, et si en bonus, certains se redécouvriront une passion pour l'aura passé de DOKKEN, ce sera un monument du Heavy en moins qui tombera aux oubliettes.