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MIKE TRAMP (usa) - Mike Tramp (Mars-2013)


Mike Tramp est un artiste hors norme, de la race des seigneurs, un de ceux qui force le respect et l’admiration de par leur volonté et leur abnégation. Le bougre a traversé les décennies, porté par sa foi dans la musique et une intégrité exceptionnelle qui ne s’est jamais démentie ! Durant toutes ces années, il a mené une croisade qui l’a mené aux quatre coins de la planète sans jamais baisser les bras. Si beaucoup pensent que Mike Tramp est un américain pur jus, il n’en est rien car le lascar nous vient tout droit des terres froides du Danemark où il a commencé très tôt à se faire remarquer en participant dès l’âge de 13 ans à un album typiquement danois. Très vite, il rejoint le groupe MABEL sous son vrai nom Michael Trempeneau en tant que front man et va délivrer quatre galettes qui vont rencontrer un énorme succès sur ses terres natales et en Espagne. Le titre « Boom Boom » sera même sélectionné pour représenter son pays au concours de l’Eurovision en 1978. Le succès est tel que nos Rockers décident d’émigrer aux Etats-Unis et de changer de nom, cette erreur leur sera fatale mais permettra à Mike Tramp de rencontrer Vito Bratta, un guitariste hors norme. Cette association magique va donner naissance à WHITE LION en 1983. Après quelques changements de musiciens, le line up se stabilise autour de Greg d’Angelo (Batterie) et James LoMenzo (Basse) et sort son premier méfait Fight To Survive en 1984 chez RCA Japon. Le succès est immédiat au pays de soleil levant et nos new- yorkais se font remarquer par Atlantic qui décide de les signer dans la foulée. La pépite Pride qui regorge de hits sort le 21 juin 1987 et va changer radicalement le destin de WHITE LION. Il faudra sept long mois pour que le succès arrive avec des singles comme « Wait » ou encore « When The Children Cry » qui feront les belles heures de MTV. Cette fois-ci, la machine est lancée à pleine vitesse. Pride va s’écouler à plus de deux millions d’exemplaires et sera triple platine aux Etats-Unis ! Un triomphe qui va les propulser sur des tournées d’anthologie aux cotés de Ace Frehley’s Comet, KISS, AEROSMITH, OZZY OSBOURNE ou encore STRYPER. En 1988, ils ouvriront aussi pour AC/DC sur le Blow Up Your Video Tour à travers tous les USA. En 1989, après deux années intensives ils rentrent très rapidement en studio pour donner un successeur à PRIDE qui sortira en 1989 sous le nom de Big Game et deviendra très vite disque d’or ! Tout semble aller pour le mieux pour le lion blanc, nos amis s’attaquent alors à leur opus le plus ambitieux, Main Attraction ! Deux années d’écriture et d’enregistrement seront nécessaires pour en venir à bout. L’enjeu est important vu le cout de l’enregistrement. Main Attraction sort au printemps 1991 et est très bien accueilli par les fans et la presse, tout semble idyllique et on se demande alors qui pourrait capturer dans ses filets les WHITE LION ! Le lion a les griffes acérées et est près à dévorer la planète entière. Malheureusement, la chasse est ouverte, la vague Grunge déboule sans crier gare et du jour au lendemain la scène Metal est engloutie. La plupart des combos disparaissent corps et âmes, balayés par ce véritable tsunami qui ne laissera que peu de survivants. Gregd’Angelo et James Lomenzo quittent le navire en pleine tempête ; Mike Tramp et Vito Bratta tenteront de garder le cap quelques temps encore sans succès malgré de nouvelles recrues de haute volée ! La messe est dite ! Notre ami ne restera pas très longtemps inactif puisqu’en 1992, il formera FREAK OF NATURE et signera dans la foulée un deal avec Music For Nation. En 1993 sort leur première offrande, s’en suivra une tournée intensive de huit mois et des premières parties de DIO et HELLOWEEN. Une autre galette, Gathering Of Freaks, verra le jour en 1994. Malgré des morceaux de grande qualité, la réussite n’est pas au rendez-vous et le gang se sépare un an après. Mike Tramp, relativement amère et dépité par cet échec, se réfugie en Australie afin de débuter une carrière solo et de faire le point. En 1998 sortira Capricorn, il sera accompagné pour l’occasion par deux ex-membres de FREAK OF NATURE. Les offrandes de Maître Mike vont se succéder à un rythme plus ou moins régulier. En 2002, Recovering The Wasted Years sort, suivi l’année suivante de More To Life Than This où Mike Tramp s’occupera d’une bonne partie de la production, assisté tout de même de Flemming Rasmussen (producteur de METALLICA). S’en suivit un live Rock’n’Roll Alive et en 2004 de Songs I left Behind qui regroupe des morceaux inédits. Si la musique est de qualité, les tournées sont intimistes et seuls les fans purs et durs suivent le père Tramp dans son aventure solo. Face à cet état de fait, le garçon décide de reformer WHITE LION mais sans les membres d’origines. Il propose alors, dans un premier temps, une compilation Remenbering WHITE LION où il réenregistre la plupart de ses classiques avec de nouveaux musiciens. Le pari est risqué et l’opération ne sera pas un franc succès. N’étant pas possesseur du nom, il se lance alors dans une nouvelle mouture qu’il renomme TRAMP’S WHITE LION et en profite pour écumer toutes les scènes européennes et américaines. Un témoignage de ce périple sortira sous le nom de Rocking The USA. En 2007, un autre best of atterrit dans les bacs sous le nom The Definitive Rock Collection et WHITE LION part en tournée avec POISON et RATT. Ils seront éjectés dès le début suite à des problèmes juridiques concernant l’utilisation du nom avec Vito Bratta. Au final, un accord sera trouvé et WHITE LION version Mike Tramp sortira Return Of The Pride en 2008 et partira en tournée mondiale, ils en profiteront pour sévir dans de nombreux festivals estivaux. Cet épopée laissera un gout amer à notre camarade Mike Tramp qui, fait rare pour un artiste, reconnaitra que la reformation était une erreur. Pour faire face, il se réfugiera une fois encore dans sa carrière solo en sortant Mike Tramp & Rock’n’Roll Circuz en 2009 puis Stand Your Ground en 2010 .Un retour intimiste mais très efficace qui lui permettra une fois encore de sillonner les routes. Trois ans après il revient avec une pépite acoustique de toute beauté, Cobblestone Street, un manifeste de simplicité chargé d’émotion où l’on sent un homme à fleur de peau qui se livre comme jamais avec une extrême sensibilité ! Alors qu’il donnait plusieurs concerts en France seul, accompagné uniquement de sa guitare en ouverture de Beth Hart, MI ne pouvait pas rater une telle occasion pour en savoir en peu plus sur une des plus belles voix du Rock ! Entretien unique avec un musicien sympathique, honnête et d‘une rare disponibilité. Magnéto Mike !

Line-up
: Mike Tramp (Chant/Guitare/Basse), Soren Andersen(Claviers/Percussions)

Discographie : Capricorn (1997), Recovering The Waysted Years (2002), More To Life Than This (2003), Rock’n’Roll Alive (2003), Songs I Left Behind (2004), Mike Tramp And The Rock’n’Roll Circuz (2009), Stand your Ground (2011), Cobblestone Street (2013)

M-I Interviews du groupe : Mike Tramp (Sept-2005), Mike Tramp (Mars-2013)

Retranscription / Traduction : Vanessa Laulit



Metal-Impact. Je pense être le premier aujourd’hui.
Mike Tramp. En fait, j’en ai déjà fait une au téléphone avant, mais aucun problème, je suis toujours disponible.

MI. Tu es en tournée à travers toute la France, comment ca se passe ?
Mike. Très bien, j’assure la première partie de Beth Hart sur cinq dates, j’en profite aussi pour faire quelques concerts en Espagne et en Suisse durant les jours off. C’est un peu particulier comme situation car je suis seul sur scène. Ce fut un peu une surprise d’ouvrir pour elle en France, c’est une opportunité qui s’est présentée et que j’ai saisi car ma tournée officielle ne débute pas avant le quatre avril. Je fais cette date à l’Olympia et demain je rentre vers le nord de l’Europe, au Danemark. Là, je commencerai ma véritable tournée !

MI. Tu vas jouer à l’Olympia, que représente cette salle pour toi ?
Mike. Je crois que ça représente simplement l’accession à un certain statut, une forme de reconnaissance. C’est un aboutissement artistique en ce qui concerne mes compositions car, après avoir fait plusieurs albums Rock et expérimenté différentes choses, j’ai finalement l’impression d’accéder à un endroit de rêve avec une musique simple qui me représente vraiment ! C’est comme un puzzle ou chaque pièce s’emboite à la perfection et au final tout prend un sens. C’est parfait pour présenter le nouveau chapitre de la vie de MIKE TRAMP aux parisiens.

MI. Comment est née cette idée de faire un album entièrement acoustique ?
Mike. Cet album a toujours été inscrit au plus profond de moi; et la raison pour laquelle je dis ça, c’est que j’ai été, si on veut, comme élevé par la musique folk, celle de la fin des années 60 début des années 70. Le Flower Power, les mouvements hippies ont bercé ma prime jeunesse. A cette époque au Danemark, à chaque coin de rue, il y avait un gars avec une guitare acoustique qui jouait. C’est ainsi que j’ai appris à en jouer et à chanter. C’est pour cette raison que toutes les chansons que j’ai écrit au fil de ma carrière, que ce soit pour WHITE LION, FREAK OF NATURE ou plus tard sur mes albums solos, proviennent toutes du même endroit et sont écrites de manière similaire. Tu vois, je pourrais te trouver de vieilles cassettes audio enregistrées à l’époque de WHITE LION sur lesquelles, même si ma voix peut sembler très jeune, l’atmosphère qui se dégage à l’écoute des morceaux serait identique que sur Cobblestone Street. Par conséquent, pour moi il n’y a ni changement ni cassures avec mon travail passé. C’est du MIKE TRAMP à l’état pur et sincère, c’est juste que j’ai fait partie de groupes de Hard Rock auparavant dont la sonorité finale pouvait paraitre comme celle d’un Big Rock band avec de grosses guitares saturées, mais là, ma façon d’écrire n’a pas changé. Les thèmes que j’aborde dans mes chansons lorsque je m’assois pour les écrire quand je suis seul chez moi sont les mêmes. Voilà ce qu’est un album acoustique du vrai MIKE TRAMP, sans concession.

MI. En regardant la pochette et dès les premières notes, j’ai immédiatement pensé à Bob Dylan !
Mike. Oui, oui, je pense que tu parles de « Ain’t The Life I Asked For ».

MI. Exactement, Bob Dylan est une source d’inspiration pour toi ?
Mike. Bien sûr, évidement, Bob Dylan ainsi que Neil Young et plus tard Springsteen et Tom Petty; tous les artistes comme eux ont joué un rôle important dans ma vie. Je crois qu’ils partagent les mêmes racines que moi. Je suis presque un enfant entièrement issu de cette culture musicale. Ce n’est pas vraiment une intention de ma part de les plagier c’est juste qu’ils incarnent cette mouvance qui compte beaucoup pour moi, comme Robert Johnson est le père du Blues, et à cause de cela tu peux entendre du Robert Johnson dans des morceaux d’Eric Clapton, Robert Cray, Stevie Ray Vaughan ou peu importe. En même temps, Dylan fut en quelque sorte le précurseur de ce genre de musique mais, après Woodie Guthrie, il y a toujours quelqu’un qui inspire un artiste. La façon dont j’ai été élevé m’a donné la faculté d’écrire une chanson avec uniquement une guitare acoustique et m’a permis d’écrire mes paroles et mes mélodies sans avoir besoin d’un Marshall et d’un son énorme derrière moi. Cette façon de faire presque instinctive a toujours été chère à mon cœur et elle n’a aucunement changé malgré l’avènement de la modernité. C’est seulement une manière simple d’expression qui me convient parfaitement. C’est comme ça que je me sens bien.

MI. Oui, tu es seul avec ta guitare, un peu de piano et un harmonica.
Mike. Oui, c'est ça.

MI. Tu as appelé ton album « Cobblestone Street », c’est une rue que tu connais ?
Mike. En fait, c’est la rue de mon enfance, elle est située dans le quartier d’où je viens. Ce que j’essaye de retranscrire dans cette chanson, c’est que tout comme à Paris, il y a des rues pavées ; les anciennes rues étaient pavées avant l’arrivée de l’asphalte, toute cette ambiance m’inspire une forme de nostalgie. Et cela représente une période de ma vie, de 1968 à peut-être 1979. C’est ma période phare, c’est de là que provient mon inspiration, une époque où la musique est à son apogée, les plus grands albums ont été écrits durant cette décennie sans aucun doute, et mes films ou livres préférés également. Je sens que c’est dans cet univers que je veux vivre ; et à chacune de mes intrusions dans la nouvelle ère technologique, une force me rappelle inexorablement vers cette période. Je me souviens du jour où ils sont venus avec leurs grosses machines, et ont mis de l’asphalte par-dessus la pierre. Ce fut comme la fin du vinyle et l’avènement du CD. Je l’utilise un peu comme une métaphore, car bien que l’ancien soit remplacé par le moderne, dans certaines rues on fait enlever l’asphalte pour retrouver ce qui existait auparavant; ils reviennent à la base des choses. De cette façon, tu te rappelles d’où tu viens, tu te souviens des sonorités que tu appréciais. Je retrouve les odeurs et les goûts que je ressentais lorsque j’étais le plus heureux. Tout ce qui est bien pour moi date de ce moment, tout ce que je suis devenu aujourd‘hui provient de cette époque.

MI. Tu veux dire que tu repenses à la période de tes débuts ?
Mike. Oui, et aussi à l’époque où la musique était simplement de l’amour, avant que cela ne devienne une grande compétition et un énorme business. L’esprit de cet album c’est cette complète liberté incarnée par ce gosse de 15 ans, entrant au Youth Club avec sa guitare à la main uniquement pour jouer devant ses amis.

MI. Tu as débuté très jeune, à l’âge de 15 ans !
Mike. 15 ans c’est l’âge auquel j’ai enregistré mon premier album, mais j’ai débuté plus tôt, aux alentours de 11 ans j’ai commencé par jouer de la guitare ; et mon prof de musique, qui n’en était pas vraiment un, était un inconditionnel de Bob Dylan. Il m’a fait écouter deux titres de Bob Dylan et m’a dit que c’était toute la culture musicale dont j’avais besoin et rien d’autre. Je pense que tout ce qui est primordial dans ma vie et tout ce qui a structuré ma musique a été basé sur des choses aussi simples que celles-ci. Evidement, je conçois que ce soit difficile pour les fans de comprendre d’où je viens et qui je suis. Je compare la naissance de WHITE LION à un bon diner. Le premier convive apporte le vin, l’autre le fromage et le troisième vient avec la baguette. Mike Tramp a amené le coté acoustique, les mélodies et d’autres touches comme celles-ci, telles furent les éléments que j’ai véhiculé à travers toutes les années que j’ai passé avec WHITE LION. Ca se passait comme ça quand Vito Bratta et moi étions assis à écrire des morceaux, c’était ma contribution à l’édifice. Donc tout ceci a toujours été présent en moi, représentant la personne que je suis. Voilà pourquoi le travail de WHITE LION a toujours été très diversifié, c’est grâce à ces différents styles d’inspiration qui ont été combinés et brassés au sein de la formation. Mais si tu avais remplacé Mike Tramp par un autre musicien au sein de WHITE LION, ça n’aurait plus été pareil. Ce sont, sommairement ces influences de Dylan à Neil Young et les anciennes sonorités acoustiques qui m’ont bercées et qui, mixées à la façon de jouer de la guitare de Vito Bratta, ont engendré WHITE LION.

MI. C’est pourquoi WHITE LION est gratifié de si belles ballades ?
Mike. Parfaitement, et de jolies mélodies car c’est très compliqué d’écrire ces mélodies qui doivent s’adapter à des parties de guitares énormes. Mais en général j’arrivais dès le début avec une chanson simple ! J’avais écrit un morceau basique puis Vito la prenait, l’arrangeait, et en faisait une œuvre totalement aboutie. C’est comme ça que nous fonctionnions.

MI. WHITE LION a toujours eu un coté commercial qui s’est amplifié au cours des années ?
Mike. Bien sûr, tu as parfaitement raison c’est naturellement ce que je ressens par rapport à notre carrière mais je ne partage plus cette optique aujourd’hui. Il y a, c’est certain, des personnes qui ont débuté en même temps que WHITE LION et qui continuent à exister et perdurent au sein du même gang alors qu’elles ont 30 ans de plus. Elles tentent d’essayer de reproduire les mêmes sonorités qu’auparavant et de retrouver l’esprit de cette époque. Pour moi, c’est inconcevable. Je me devais de suivre mon évolution musicale naturelle. Et par conséquent, à la fin de WHITE LION j’avais un sentiment viscéral au plus profond de mon âme qui me destinait à écrire des morceaux plus hard et plus noirs, c’est comme ça que Freak Of Nature est né. Je ressentais vraiment l’envie de revenir à un Rock’n’roll plus organique et de retomber amoureux d’une musique plus proche de mes racines et d’un groupe qui écrit et joue des titres qui me ressemblent et que j’apprécie.

MI. Tu as commencé très jeune et tu as participé au concours de l’Eurovision avec MABLE, quel souvenir en gardes-tu ?
Mike. C’est fou quand j’y repense ! J’étais beaucoup trop jeune pour décider de quoi que ce soit au sein de MABLE et toute cette histoire est arrivée lors de la sortie de notre deuxième vinyle ! A l’époque, nous étions très concentrés sur les nouveaux morceaux, nous voulions produire un album Rock et nous prenions ça très au sérieux. Mais cette année-là, le Danemark a décidé de s’intéresser au concours de l’EUROVISION. Cela faisait des années que le Danemark n’avait pas participé à cette compétition et il l’a fait savoir au pays entier. Du coup, tous les musiciens et chanteurs ont présenté des titres pour être sélectionnés. Notre label nous a alors forcé la main pour que nous nous mettions sur les rangs, ce que nous avons fait. Ensuite, notre morceau a été choisi et on a gagné au niveau national le droit de représenter le Danemark. Ensuite, tout a été très vite, avant de nous en rendre compte on logeait au Concorde Lafayette et on représentait notre pays, le Danemark à l’Eurovision. Mais tout était faux, nous étions en train de jouer un rôle. On incarnait des personnages différents de ce que nous étions réellement en tant que musiciens. Et je me rappellerai toujours du jour suivant notre accession à la seizième place, la nuit suivante. J’étais assis seul dans ma chambre d’hôtel, je n’avais à l’époque que 17 ans, c’est diffèrent d’un jeune de 17 ans d’aujourd’hui ; je te parle d’un gamin de 17 ans en 1978. Et je me suis dit cette nuit-là que je ne referais jamais quoi que ce soit sans y croire réellement et cette pensée à aiguillé ma carrière pendant toutes les années qui ont suivi. Je voulais toujours croire en moi et jouer ma musique sans aucun compromis.

MI. Je suppose que ce fut difficile avec cet état d’esprit de gérer la pression inhérente au succès de WHITE LION et au business qu’il engendrait ?
Mike. Non, la pression venait de plusieurs domaines. Quand Vito et moi avons créé WHITE LION, nous étions très directifs car nous avions une idée bien définie de ce que nous voulions faire. Du coup, nous n’avions pas à nous compromettre lors de l’écriture des chansons, on nous laissait les faire à notre manière ; jusqu’à ce que je remarque que les choses commençaient à changer imperceptiblement et irrémédiablement. Ca s’est fait petit à petit, sans qu’on s’en rende compte, ce sont des petits changements qui mis bout à bout font que au final tout est différent.

MI. Maintenant tu es seul sur scène, quelles sont les différences lorsque tu joues accompagné d’un groupe ?
Mike. Je m’entends mieux jouer [Rires] … Pour le moment, je me sens bien seul mais je prévois de m’entourer d’un petit groupe combo derrière moi, avec un bon pianiste, des percussions, et un peut-être un joueur de guitare doué, être moi-même me donne la force de continuer ! L’an passé, après avoir terminé mon album, je suis allé faire 42 dates seul, en voiture, à travers l’Europe, sillonnant les routes et changeant continuellement de location. Et là, dans une semaine, je recommence pour cinquante dates, seul encore une fois, puis en juin je me repose et en juillet je retourne aux Etats-Unis pour deux mois de tournée où je vais jouer quarante shows toujours seul avec ma guitare.

MI. Tu fais tout seul sans aucune aide extérieur ?
Mike. Oui, c’est surtout une façon pour moi de tout superviser c’est un retour aux sources. Au tout début, tu joues seul et tu fais tout toi-même ! Maintenant je travaille sur des nouveaux morceaux et je pense que la prochaine fois, je serai accompagné. Mais Cobblestone Street est, quelque part, fondamental dans ma vie d’artiste. Il n’y en aura qu’un de la sorte pour moi car il est extrêmement personnel. Donc le prochain cd, je vais essayer d’aller un cran au dessus et j’y ajouterai un peu plus d’instruments, mais ça restera Mike Tramp en tant qu’artiste solo, comme Neil Young s’entoure de musiciens, par exemple.

MI. Tu dis qu’il est personnel, tu veux dire qu’il traite des thèmes de ta vie que tu n’as jamais abordé auparavant ?
Mike. Tout ce qui est sur cet opus vient du plus profond de moi et j’ai continuellement chérie l’idée de le faire en tant qu’artiste solo, je voulais contraindre les auditeurs à croire en l’artiste que je suis et surtout de ne pas penser que j’étais perché sur scène à chanter des chansons fictives. Oui, je suis sur scène clamant que mon cœur saigne, ou que mes enfants me manquent, que j’ai passé une mauvaise journée ou peu importe, je parle de ma vie et c’est ce que je veux partager avec mon public. Et j’ai remarqué que mes fans ont évolué comme moi, je ne suis plus le même qu’il y a trente ans. Ils sont liés eux aussi à ces changements dans la vie d’un homme.

MI. C’est un retour à tes vraies racines en quelque sorte ?
Mike. Oui, c’était bien sûr impossible de faire cela avec WHITE LION en 1987. Il est certain que se sont les étapes de la vie, l’expérience que tu acquières au fil des années qui fait ce que tu es. Les épreuves que tu traverses te transforment. Bien que j’ai commencé de cette manière en créant WHITE LION, en aucune manière n’étais-je prêt a affronter ce qui allait arriver par la suite. Je n’étais pas préparé à ce moment-là à affronter le succès, à être un artiste avec une telle ampleur à seulement 20 ans. Comme je l’ai dis, pour écrire un album comme celui-là tu dois avoir vécu la vie que tu mets en musique. Tu dois, et c’est certain, éprouver de la souffrance, de l’amertume, de l’amour et de la haine, un certain mal être aussi, des déceptions, des échecs ainsi que des réussites afin de réussir à les coucher sur papier et a dégager de l’émotion. Il faut que ceux qui t’écoutent se disent : « Je crois en ce qu’il chante. » Ce n’est pas une chose facile à faire, c’est impossible quand tu es jeune et que tu joues dans un groupe qui vend des millions d’albums.

MI. C’est vrai qu’il y a beaucoup d’émotion qui se dégage de Cobblestone Street !
Mike. C’est que je ne peux pas monter sur scène et chanter que je descends Sunset Boulevard sur Hollywood, en buvant une bière et en reluquant toutes les filles qui passent.Ca ne correspond plus à ma musique désormais.

MI. Tu t’es fait faire un tatouage de Phil Lynott !
Mike. Oui, je l’ai depuis longtemps et maintenant j’en ai un de Bob Dylan aussi.

MI. Je suppose que ces deux artistes représentent beaucoup pour toi ?
Mike. Absolument. La majorité des gens pensent que si j’aime Phil Lynott c’est à cause des chansons de THIN LIZZY mais il n’en est rien. J’ai réussi à percevoir très tôt ce qu’il y avait en arrière plan de ses morceaux. Tu distingues clairement du Van Morrison ou même une ancienne forme de Folk irlandais que l’on retrouve comme influence majeure dans leurs albums. C’est ce que j’apprécie chez Phil Lynott car sur un opus comme Jailbreak, il y a des titres tels que : « Fight or Fall, Romeo and the Lonely Girl » ou « Cowboy Song » qui ont cette touche acoustique et c’est ce Phil Lynott là que j’aime. J’adore aussi tous les autres morceaux, mais se sont des chansons comme celles que j’ai citées qui m’attirent le plus. Elles m’emmènent dans un univers qui me convient. Il y a une similitude dans les sonorités qui sont à la base de mes morceaux, ils sont construits à partir de cette Folk irlandaise qui est l’une des sources de la Folk que l’on connait aujourd’hui. Cette musique est venue d’abord d’Irlande puis s’est exportée vers les Etats-Unis et ça a donné naissance à un nouveau style de Folk. Mais à l’origine, c’est principalement une musique issue d’Irlande, d’Ecosse, d’Angleterre et de pays similaires qui est arrivée par bateaux avec les émigrants au début du vingtième siècle et petit a petit, elle s’est intégrée à d’autres courants musicaux. Ce fut une façon de partager ses expériences durant ces années et d’obtenir de nouveaux sons.

MI. THIN LIZZY s’est reformé depuis quelques temps, que penses-tu de ces combos qui reviennent sur le devant de la scène des années après ?
Mike. Je n’apprécie pas vraiment qu’un groupe refasse surface sans les membres d’origine et je l’ai vécu moi-même lors de la création d’une nouvelle version de WHITE LION. J’ai su aussitôt qu’avoir fait revivre WHITE LION c’était mal. C’est d’ailleurs un projet auquel je ne désire plus être associé. D’autre part, je comprends que lorsque tu vends ton âme au Rock’n’roll, c’est pour la vie, que pourrais-tu faire d’autre ? C’est le pacte que j’ai conclu et même ma femme, à qui je l’ai expliqué, n’arrive pas à le concevoir ! Je ne recherche pas la gloire dans le monde du Rock’n’roll mais je suis un artiste et je me réveille au beau milieu de la nuit avec de la musique plein la tête et dans mes mains, que veux-tu que j’en fasse ? Tu sais, Salvador Dali a peint jusqu’à son dernier souffle ; comme l’ont fait tous les artistes peintres de sa génération. C’est ce que nous sommes, nous les amateurs de Rock. Quand on dédie nos existences à cet art c’est pour toujours.

MI. C’est une bonne définition d’un artiste.
Mike. Effectivement, parfois ce n’est qu’une idée qui te trotte dans la tête mais si c’est ce qui te maintient en vie alors il est réellement inconcevable de te dire que tu vas devoir aller travailler dans une banque ou faire autre chose. Impossible, (il le dit en français) ! [Rires] ...

MI. ... [Rires], Ça parait impossible pour toi c’est évident !
Mike. [Rires] ... Oui ou alors peut-être y aller pour la dévaliser ? [Rires] ...

MI. Oui, je pense que tu t’en sortirais mieux ! [Rires] ... Avec WHITE LION tu as ouvert pour AC/DC, AEROSMITH…
Mike. Oui, j’ai joué avec tous mes héros.

MI. Quels sont tes plus beaux souvenirs de cette époque ?
Mike. Allons un peu plus loin encore et abordons cela d’une manière différente. 1975 c’est l’année où j’ai assisté à mon premier concert, c’était Alvin Lee et en 1984. 10 ans après, je joue aux cotés d’Alvin Lee à l’America Worldwide Line ; c'est-à-dire une décennie plus tard. 1978 : ce fut la première fois de ma vie que j’entendais AC/DC, 10 ans plus tard en 1988, j’ouvrais pour eux aux Etats-Unis. En 1976, j’allais à mon premier concert de KISS, au Danemark, encore une fois 10 ans après je fais leur première partie aux Etats-Unis, c’est ce que j’appelle réaliser ses rêves, dans tous les sens du terme. Si tu m’avais dit quand j’étais adolescent que 10 ans plus tard je jouerais aux Etats-Unis avec tous mes héros, je t’aurais répondu : « T’es fou, jouer aux Etats-Unis alors que je n’ai même pas fini l’école, il faut que tu arrêtes de délirer ».

MI. Tu as fait la première partie de Ace Freyley, une légende !
Mike. Oui, mais il faut que tu comprennes quelque chose, tu sais qu’ils sont tes idoles et tu les admires, mais à la seconde où tu les accompagnes en tournée tu rivalises avec eux, tu es en compétition avec eux, c’est un duel en quelque sorte. Il faut savoir qu’ils doivent vendre des albums et conquérir le cœur des fans eux aussi car rien n’est jamais acquis. Alors ça se transforme en un jeu un peu diffèrent qui est basé sur la concurrence. Mais la plus grande récompense c’est quand tes héros te respectent, qu’ils te montrent ou te font sentir que tu es leur égal. Un des plus beau souvenir pour moi c’est lorsque j’étais en tournée avec AEROSMITH et que Steven Tyler, en marchant le long d’un couloir, a commencé à fredonner mes chansons. Cela signifie pour moi, qu’il me respecte et qu’il apprécie ce que je fais et plus tard nous sommes devenus des amis ! C’est comme lorsque Angus Young s’est assis à coté de moi et m’a parlé très simplement en me disant : « crois juste en qui tu es et ne te laisses jamais influencer par personne ». Ce furent des mots clefs qui, aujourd’hui encore, résonnent en moi.

MI. C’est, incroyable l’impact que ça peut avoir !
Mike. Oui, c’est très spécial.

MI. En fin de compte, bien que tu habites aux Etats-Unis tu as gardé ton âme d’européen !
Mike. C’est un retour aux sources car parfois, lorsque tu veux atteindre ton but tu dois affronter de nombreuses épreuves et vivre ta vie. Il y a des similitudes avec Ernest Hemingway et ses histoires sur le sujet, il suffit de lire « Les raisins de la colère » pour comprendre et s’intéresser à tout ce qui s’en rapproche. Quand j’étais plus jeune, lorsque je suis arrivé au pays de l’oncle Sam, je pensais que j’allais tout avoir sans presque rien avoir à faire tout simplement parce que j’avais de longs cheveux blonds et parce que je chantais dans un groupe de Rock. J’étais persuadé que tout était facile, que j’étais l’égal de VAN HALEN parce que Vito Bratta jouait comme Eddie Van Alen. Mais tu te rends vite compte que ce qui forge la réussite de tous ces gangs c’est le temps à répéter, le travail intensif, leur dévouement à cette musique, et les années passées à jouer sans jamais lâcher. Alors bien que je savais tout cela, il a fallu que je grandisse. J’ai découvert que certains de mes héros avait tout comprit dès le premier disque. Quand tu écoutes HENDRIX, tu sens qu’il a déjà beaucoup vécu. Pareil quand tu écoutes le premier opus de Bob Dylan, tu comprends que ce n’est déjà plus un gamin, il arrive quand même malgré son jeune âge à restituer un certain degré de conviction dans ses titres. J’ai dû parcourir le monde à de nombreuses reprises pour être en mesure de vraiment ressentir ça, avant de me sentir capable de le faire avec honnêteté et sincérité.

MI. Tu as écrit une chanson sur Ronnie James Dio.
Mike. Oui je l’ai fait pour lui rendre hommage. Ronnie était un ami.

MI. Que représente-t-il à tes yeux ?
Mike. Ce que représente Ronnie, … Tu sais, je ne peux pas te dire que Ronnie fut une source d’inspiration pour moi car nos musiques sont totalement différentes. Mais il a eu une influence sur moi, c’est évident. Si je repense à certains morceaux des débuts de WHITE LION, c’est évident qu’il a joué un rôle important à nos débuts. Il y a certains titres de WHITE LION où tu peux apprécier l’influence de RAINBOW et de Ronnie James Dio. Tu ressens toute la magie et tout ce qu’il a pu nous apporter, c’est une réalité. En 1993 on a fait une tournée ensemble, on a beaucoup parlé, il adorait ça. Je m’asseyais à coté de lui et on discutait durant de nombreuses heures. On parlait de la foi que l’on doit avoir en soi quand on est un chanteur, on philosophait sur tout ça. Ronnie était un homme qui défendait le Rock’n’roll, il l’aimait passionnément, il battait le pavé pour cette musique. Alors quand il est décédé, j’ai ressenti le besoin d’écrire une chanson sur lui en hommage à tout son parcours. Je l’ai construite en faisant référence à plusieurs des thèmes qu’il a abordés dans ces chansons au cours de sa carrière, car il dépeignait la vie de nombreux protagonistes dans beaucoup de ses titres. Ce fut un plaisir de la faire et à chaque fois que je la reprends sur scène les fans adorent et grâce à elle on commémore ensemble l’esprit de Ronnie.

MI. Merci d’avoir répondu aux questions.
Mike. Merci à toi, ce fut un plaisir.


Ajouté :  Lundi 12 Août 2013
Intervieweur :  The Veteran Outlaw
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