Aujourd'hui nous sommes le 21 juin. Et hasard du calendrier, ou pas tant que ça en fait, nous fêtons en ce jour une triple célébration, celle de l'arrivée de l'été, de la fête des pères et celle de la musique. L'ambiance est donc plutôt légère, amicale, optimiste et maculée de sourires et autres manifestations de joie. Je devais donc me mettre au diapason de cette liesse dégoulinante, et comme ma nature contraire me l'impose, je suis allé chercher un sujet de discussion musical aux antipodes de cette atmosphère saturée de saccharose qui donne du diabète rien qu'en regardant les petits lapins passer...
Alors direction Sydney, Australie, pour une prose en adéquation avec la teneur musicale du jour. Violence, âpreté, sécheresse et autres négations même d'une envie de vivre une existence sans nuages...

Que diriez vous d'un cocktail fort, bien chargé en Metal, en Sludge, en Post Hardcore ? Après tout, ça peut donner la pêche, et puis comme tout le monde semble rayonner, au moins, vous resterez bien campé sur vos positions de trouble fête qui n'aime rien ni personne.
A ces fins, je vous présente LO!, groupe fondé en 2007, et qui depuis n'a de cesse de répandre la bonne parole Core à travers le monde. Avec déjà quelques sorties de qualité à son actif, le quatuor revient à la charge avec un double 7'' ou EP selon le format, The Tongueless, et ça tombe bien, puisque aujourd'hui, je n'ai pas envie d'entendre parler qui que ce soit.
Si je vous précise en sus que LO! aime à citer en référence des pointures comme BREACH, OLD MAN GLOOM ou CONVERGE comme influences revendiquées, vous comprenez de suite que l'on a affaire à du sérieux, et du lourd de chez lourd...

Et au niveau des intentions, dès le départ, le message est clair. "No Contrition" ne cache pas son message et assume ses pêchés, se vautrant dans le Post Hardcore poisseux et collant comme un vieux chewing-gum à la semelle. Batterie en rupture, défrichant les contretemps comme un jour de récolte intensive, mur de guitare en béton armé, basse en arrière poste, grave, déliée, et chant râpeux. Tempo évolutif, souvent faussement rapide mais aussi franchement lourd, cinq minutes de définition d'un genre qui devient difficile à classer... Inspiration, agressivité, puissance, c'est une entrée en matière qui en impose, franche et directe.

"Orca" ne dévie pas de cette ligne de conduite, mais appuie encore un peu plus là où ça fait mal, en augmentant la pression dans tous les secteurs. Plus rapide, plus pesant, plus compressé, la température monte et frise l'étuve étouffante. Le break central, dominé par une basse brillante et claquante uniquement surmontée par des lignes vocales de plus en plus graves est un modèle du genre, et le groupe le fait évoluer en l'agrémentant d'effets sonores bien sentis, jusqu'à l'explosion d'un final durant lequel les voix se mêlent dans un argumentaire véhément.

"Litmus Beings" casse un peu la dynamique, et cite le BREACH de Venom, méchant, acide, aux crocs acérés qui se plantent dans les chairs à vif. C'est le titre qui évoque le plus les références directes de LO!, avec des allusions à CONVERGE d'une sincérité rare.
Et après une entame mélodique amère et quelque peu nostalgique, le final "Megafauna" n'hésite pas à ralentir la marche au point de presque la stopper, en développant un Sludge Core bourbier, dont les guitares alourdissent encore plus l'étreinte. Mélange de Post Hardcore de Nola style, c'est le point d'orgue d'un EP certes très court, mais varié, dont chaque titre à son importance en tant que tel, mais aussi en tant que pièce d'un puzzle étrange, qui finit par révéler une image inquiétante une fois assemblé...

En assimilant au sein d'un même projet des éléments inhérents à des mondes parallèles qui s'entrecroisent, à équidistance de CONVERGE, BREACH et même de la vague Heavy du sud des USA (EYEHATEGOD, DOWN et consorts), LO! signe un EP fascinant, certes hautement abrasif et concentrique, mais qui développe des idées personnelles et qui ne rechigne pas à fondre la mélodie dans le chaos Core bruitiste. Loin de se contenter de répéter des vues déjà exposées, les quatre australiens bâtissent leur monde pierre après pierre, et risquent un jour de pondre une référence du genre.
En attendant ce moment qui risque d'être très concret dans un futur proche, jetez vous sur The Tongueless, qui malgré son titre, à bien des choses à raconter.

Et ça changera toujours des sempiternels "Bonne fête papa", "Il fait chaud aujourd'hui", et autres "Y'a quoi ce soir comme groupe sur la Grand Place ?".
Après tout, il n'y a aucun mal à ne rien faire comme les autres, et LO! vous le prouve sans contestation possible !