SUBORNED (ch) - From Space (2014)
Label : SAOL (Service for Artist Owned Labels) / H'Art
Sortie du Scud : 21 novembre 2014
Pays : Suisse
Genre : Thrash Metal
Type : Album
Playtime : 9 Titres - 41 Mins
Hier, la Suisse a gagné pour la première fois de son histoire la Coupe Davis. Ok, je vous le concède, dans un contexte purement musical, on s'en fout un peu. Mais là n'est pas le débat. Si je me permets cet entrefilet sportif, c'est juste pour la coïncidence amusante qu'il a provoqué. Car je viens aujourd'hui vous parler de la Suisse, mais d'une manière musicale s'entend. Car une fois de plus, j'ai découvert un sympathique groupe au cours de mes pérégrinations sur la toile, groupe qui mérite bien quelques signes.
Et qui vient bien évidemment de... Suisse ! D'où la référence.
SUBORNED est né en 2010, sous l'impulsion de deux potes Raymond et Valentin, bientôt rejoints par Stefan à la batterie et la jolie Lucie au chant. Le quartette a commencé sa jeune carrière par un EP (Hazardous Substances), plutôt bien reçu, qui leur a permis de faire de bonnes premières parties (VADER, DESTRUCTION, MUNICIPAL WASTE). L'affaire commençant à chauffer, le temps vint de passer à la vitesse supérieure, et d'enregistrer un premier long, ce qu'ils firent l'année dernière (au Little Creek Studios), et dont voici enfin le résultat aujourd'hui, sous la forme de ce From Space bourré d'influences à craquer.
Influences, influences... celles-ci sont bien sur inévitables lorsqu'on pratique un Thrash classique en 2014. Et ce constat n'a rien de péjoratif, tant il est quasiment impossible de prendre les choses sous un autre angle dans un genre qui a déjà pratiquement dit tout ce qu'il avait à dire. Et ce depuis plus de trente ans... A chacun de tirer son épingle du jeu, et de transcender des repères établis depuis des décennies pour se les approprier. Les SUBORNED ont ils réussi ce pari ? Plus ou moins. Ils sont certes parvenu à soigner leurs compos, à les rendre attachantes, mais ces influences dont je parlais sont ici rapidement identifiables.
En premier lieu, et ceci est sans doute dû à la présence de Lucie au micro, impossible de ne pas penser à HOLY MOSES en écoutant From Space. Le timbre de la suissesse est en effet très proche de celui de Sabina Classen, rauque, puissant, légèrement voilé, avec même certaines intonations plus masculines qui dessinent les contours sardoniques de Steve Souza d'EXODUS. Mais là ne s'arrête pas la comparaison. Avoir une filiation vocale est une chose, l'assumer presque complètement musicalement en est une autre. Et lorsque vos oreilles traîneront du côté de "Hazardous Substance", la ressemblance avec le troisième LP des allemands, The New Machine Of Liechtenstein, vous sautera aux oreilles. Même construction Techno Thrash un peu bancale, choeurs ressemblant comme deux gouttes d'eau à ceux de "Near Dark" ou "Def Con II", riffs presque calqués à la double croche près, et solo estampillé Andy Classen plus vrai que nature. Troublant pour le moins, mais très agréable je dois le reconnaître ! L'analyse vaut aussi pour le terrible (dans le bon sens du terme) "Simply Darwin", qui lui aussi multiplie les breaks, les ambiances, s'autorisant des libertés rythmiques bienvenues, à l'image de ce Thrash allemand de la fin des années 80 qui tendait à privilégier la technique et la finesse sur la brutalité.
Allemand, le mot est lâché. La musique des suisses emprunte plus d'un détour autrefois dessiné par des combos du cru comme HOLY MOSES donc, LIVING DEATH (le plus tardif, donc le meilleur), DEATHROW (le plus calme), mais aussi d'une façon plus étonnante, par WEHRMACHT, pour cette manière d'exploser les rythmiques sans se préoccuper de la cohésion. Ainsi, si la seconde moitié du LP fait plus Classen family qu'un pique nique avec Sabina et Andy, la première s'éclate de temps à autres dans des accélérations foutraques qui sortent de nulle part.
Ainsi, si "Hit It" en ouverture joue admirablement bien des cassures de tempi, et offre un refrain bien troussé, si "From Space" explose en sextolets avant de nous bercer de contretemps rageurs et de riffs précis, si "Sexolence" ressemble à s'y méprendre à une pépite cachée de DESTRUCTION (montées acides de fin de vers à la Schmier comprises), et si "Bitch" se vautre dans un mid tempo graisseux et grossier, renvoyant son homonyme des STONES dans les cordes de la galanterie, "Under The Yoke" fait feu de tout bois, et nous offre un festival de baguettes en folie et de riffs aigus et redondants qui cavalent à une vitesse déraisonnable, mais jouissive. C'est sans conteste le morceau le plus ludique du lot, tant son énergie débridée et son inspiration un peu folledingue dynamisent une moitié d'album efficace en diable, mais classique. Une façon de se démarquer de "Military Service" en poussant l'hystérie un peu plus loin, tout en gardant le côté violent but catchy.
Alors certes, les influences sont palpables. Mais au fur et à mesure des écoutes, From Space commence à entrer en vous, à vous prendre les tripes et les neurones pour ne plus les lâcher. Il vous fait retrouver le bonheur des sorties les plus admirables des années 80 nous venant de la Ruhr, de Raging Steel à Protected From Reality, en passant par The New Machine, ou Release From Agony. SUBORNED avec ce premier long fait montre d'une sacrée efficacité, et même de créativité régulière, grâce à de petites trouvailles rythmiques simples mais bien senties, de refrains qui accrochent les pavillons, et en fin de compte de chansons composées intelligemment mais gardant cette fraîcheur indispensable au style. Qui plus est, chacun est parfait à son poste, de Lucie, qui alterne avec bonheur les harangues sèches et rauques et les grincements pervers, à Stefan, qui fait passer à travers son jeu une véritable joie de frapper, en passant par Valentin, riffant tranchant, et soloisant avec flair et plein d'allant.
Alors OK, HOLY MOSES. Mais bon, quitte à prendre modèle, autant se focaliser sur les meilleurs de l'époque. Et puis sincèrement, From Space est bien plus valide que les dernières productions de Sabina & Co. Et si vous voulez du Thrash fin comme une volée de Fédérer, et puissant comme un coup droit de Stan Wawrinka, vous savez maintenant quoi faire.
Belle semaine pour la Suisse en tout cas.
Ajouté : Samedi 07 Février 2015 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Suborned Website Hits: 5488
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