CAVALERA CONSPIRACY (br) - Pandemonium (2014)
Label : Napalm Records
Sortie du Scud : 31 octobre 2014
Pays : Brésil
Genre : Thrash Metal
Type : Album
Playtime : 12 Titres - 51 Mins
"Je voulais que mon frère rejoue comme s'il avait quinze ans, mais à chaque fois qu'il entamait un morceau, il finissait par retrouver son groove. Alors je lui ai dit "On emmerde le groove, oublie moi ça et joue vite!!!!"
On pourrait croire que cette phrase à été prononcée par un jeune musicien désireux de retrouver un peu de l'allant de ses débuts, mais il n'en est rien. Cette déclaration émane d'un mec de quarante cinq balais, qui ne changera jamais. A tel point que son épitaphe pourrait être un truc du genre "J'étais moi, du début à la fin", ou "Personne ne m'a jamais dicté mon comportement". Ca force le respect.
A l'inverse d'opportunistes qui feraient n'importe quoi pour rester sous les feux de la rampe, Max Cavalera a toujours suivi son instinct, et fait ce qu'il a voulu. Il a toujours aimé la brutalité musicale, il n'a jamais fait de concessions, et il suffit d'écouter les albums de SEPULTURA, SOULFLY ou CAVALERA CONSPIRACY pour en être persuadé.
Les deux premières réflexions post retrouvailles avec Iggor étaient d'ailleurs sans ambages. Inflikted ou Blunt Force Trauma ne prenaient pas de gants pour faire passer le message, et rentraient dans le lard. Sorte de combinaison entre la furie de SEPULTURA et la puissance Néo de SOULFLY, le tandem/quatuor CAVALERA CONSPIRACY ne donnait pas dans la dentelle. Même le jeu toujours nuancé d'Iggor se perdait dans la sauvagerie la plus primaire, sous l'impulsion de son frère et de ses compos brutes et directes. Lui même ne faisait pas semblant, riffait compact et vociférait sans tact.
Mais aussi sauvages et bruyants qu'étaient ces deux premiers LP, ils n'étaient qu'une sorte de mise en garde, de gentil avertissement comparé à la bombe à fragmentation Pandemonium. Cette fois-ci, Max s'est lâché, complètement débridé, et nous balance les dix titres (plus deux bonus) les plus affolants de sa carrière. Et on comprend mieux pourquoi il rejetait à ce point le groove dès le début de l'enregistrement. Il n'avait en effet pas sa place ici. En écoutant ce troisième bébé de la fratrie, c'est comme si le souvenir de NAILBOMB avait percuté celui de Morbid Visions ou Schizophrenia dans ma mémoire. Vélocité, brutalité incroyable, froideur, répétition des motifs les plus sombres, Pandemonium est un album noir comme la mémoire d'un homme qui sait qui il est, qui sait où il va, et qui ne laissera personne se dresser sur son chemin. Mais Max nous avait prévenu, il allait gérer l'affaire à la façon des gangs Grind des années 80. Du brutal, a quatre mains, et c'est tout. Il a quand même gardé son lieutenant Marc Rizzo à ses côtés, et a emprunté Nate Newton aux CONVERGE pour assurer la basse. Grand bien lui en a pris, l'ajout de ces deux là donne un côté encore plus lourd et explosif au disque, déjà fournaise et ressentiment terrible à la base.
Si la plupart des morceaux cavalent à une vitesse déraisonnable, la bande à tout de même aménagé des espaces plus ou moins posés, qui ont le mérite de dynamiser encore plus la machine. Ne vous attendez pas à une stupide démarcation inutile de Reign In Blood, il n'en est rien, la violence ici n'est pas gratuite ni stérile, elle est réfléchie et encore plus efficace.
Et si le chant de Max s'enfonce encore plus dans les tréfonds de son thorax, au point d'en devenir parfois si grave qu'on a du mal à le discerner au milieu de ce torrent de haine, la finesse du jeu de Rizzo permet de rester à tout moment dans l'intelligible. Certes, plus CAVALERA CONSPIRACY empile les albums, plus le jeu d'Iggor se radicalise et se réduit au strict minimum rythmique, mais c'est la condition sine qua non pour sortir un LP de cette trempe. Et malgré une intro envoûtante, dès "Babylonian Pandemonium" les choses sont claires. Vous allez avoir mal à la tête, mais vous serez comblés. Heavy mortel, Thrash nucléaire, son énorme et touffu, ce morceau d'ouverture ressemble férocement à son aîné "Sanctuary", mais en version incroyablement plus méchante et sourde. Vous êtes prévenus.
"Bonzai Kamikazee" ne fait pas non plus grand cas de la tendresse, et les riffs s'enchaînent, portés par une rythmique inédite (Iggor et Nate), collée comme des siamois, dans laquelle la basse ronde et volumineuse du Coreux de Boston fait écho à la frappe gigantesque du petit frère. "Scum" fait honneur à l'héritage cacophonique de Birmingham, tout en restant intelligible. Mais avec ses guitares rebondissantes et son chant une fois de plus ultra caverneux, c'est aussi une jolie dualité Heavy/Thrash gigantesque qui sait profiter de multiples séquences pour rebondir, malgré sa courte durée.
Au niveau des choses un peu excentrées dans ce Pandemonium, signalons "Apex Predator", vénéneux en diable et qui permet de comprendre que Max n'a pas oublié son expérience avec Alex dans NAILBOMB. Arrangements assourdissants, basse digne du fils bâtard de Shane Embury et Justin Broadrick, mélange de passages hyper rapides et de transitions lourdes et gelées comme le béton d'une vieille usine en hiver, c'est une grosse bouffée d'air vicié qui fait un bien fou.
Fou, "Not Losing The Edge" l'est un peu avec son sitar persistant en gimmick. Début en amorce, un peu feinté, puis arrivé en son milieu, le morceau tombe dans le Punk Thrash versant Hardcore avec phrasé saccadé et invectives vocales sur fond de solo véloce et énorme de dextérité... Le meilleur de l'association Max/Marc, et la preuve définitive de la complicité qui unit les deux compères. Sinon, comment expliquer un refrain aussi parfait ?
Mais l'apport de Nate Newton permet aussi au disque de finir sur une touche plus Punk, et plus caractéristique de son groupe d'origine. C'est en effet lui qui se charge de la partie vocale du final "The Crucible", aussi core qu'un glaviot à la sortie du CBGB'S...
Plusieurs choses à noter après écoute intensive de Pandemonium. Iggor a cette fois ci perdu tout le chaloupé de son jeu pour redevenir ce batteur brutal et furieux qu'il était au début de sa carrière. Et ça colle, rien à dire. Marc Rizzo est un lieutenant de premier ordre pour Max, apportant la finesse et la mélodie dont le leader brésilien semble se détourner de plus en plus. Les lignes vocales à deux pitch boostent les morceaux, et leur donnent une patine Grind indéniable, à l'instar des affrontements Barney/Mitch Harris.
Mais la leçon qu'il faut tirer de ce troisième album de CAVALERA COSNPIRACY, outre qu'il enterre bien profonds ses deux prédécesseurs à tous les niveaux, c'est que Max ne changera jamais. Il est le même aujourd'hui, le même qu'il était il y a vingt ans, le même qu'il sera sans doute dans vingt ans s'il arrive jusque là. Et chaque morceau, chaque hurlement, chaque note de Pandemonium le prouve.
Et si finalement, il était le seul véritable héros Thrash que nous n’ayons jamais eu ?
Ajouté : Vendredi 06 Février 2015 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Cavalera Conspiracy Website Hits: 5484
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