SHINING (no) - One One One (2013)
Label : Indie Recordings
Sortie du Scud : 4 juin 2013
Pays : Norvège
Genre : Electro Metal
Type : Album
Playtime : 9 Titres - 37 Mins
Troisième partie de la trilogie initiée en 2010 avec Blackjazz, One One One fête aussi les douze ans d’existence discographique des norvégiens iconoclastes de SHINING.
A ne pas confondre bien sur avec l’autre SHINING du même pays, beaucoup plus torturé, car la bande à Jørgen Munkeby n’est aujourd’hui plus que puissance, fun, et déconstruction de la musique populaire.
Blackjazz vous dites ? Mélange de Jazz et de Black ?
Oui certes, un peu de la même façon qu’avait John Zorn de torturer le Jazz au sein de NAKED CITY et/ou PAINKILLER en le mixant au Harcore ou au Grind. Sauf qu’ici, tout est réfléchi, calculé pour vous faire dodeliner de la tête et agiter vos petons.
Selon Jørgen, « Chaque chanson a été pensée selon son rendement maximum. Nous voulions que chacune d’entre elles ait une raison d’être, et surtout, nous voulions composer des morceaux fun, qui sonnent fun ». Et à l’écoute de One One One, on peut dire que le pari est réussi haut la main. Une fois de plus, la presse spécialisée ou non pourra se répandre en louanges, tant ceux-ci seront mérités. La recette mise au point il y a trois ans n’a que peu changé. Toujours cette même énergie palpable, toujours cette façon de jouer une musique hors norme, mélange de cabaret de l’improbable et de Metal en fusion, le tout avec un naturel déconcertant. Et si le parallèle ne vous parait pas trop osé, misez inconsciemment sur une rencontre lors d’une fête particulièrement lysergique entre un Andrew WK qui aurait appris le solfège et un Manson paillard et prêt à en découdre.
Difficile en effet d’imaginer un dialogue entre deux artistes aussi différents que complémentaires dans leur démarche. Alors vulgarisons. Prenez le PAIN le plus accessible, un WHITE ZOMBIE plutôt calme, un MORPHINE déjanté, et un poil du MANSON pré cité (choisissez le bien, certains sont contagieux), secouez violemment le tout, versez avec beaucoup de décontraction, et tout à coup, vous comprendrez que vous venez de réussir un cocktail chargé en alcool, mais qui jamais ne saoule. Magique ?
Peut être.
Jørgen avait donc raison, One One One est fun. Tellement qu’il arrive parfois à tutoyer les cimes d’un certain Devin Townsend (le furieux et cauchemardesque « The Hurting Game » qu’on croirait sorti de Deconstruction…), au point d’en imiter le lyrisme déjanté. Et à l’instar du Canadien schizophrénique, les musiciens de SHINING n’ont pas oublié que si une musique ludique peut remporter l’adhésion, il convient de la préparer avec force intelligence et travail. Rien ne tombe directement dans l’assiette… Et c’est ce qu’ils ont fait.
Que ce soit lors des intermèdes les plus directs et immédiats (le single « I Won’t Forget » terrible entrée en matière qui rappelle autant « The Great Pretender » de Peter que « Super-Charger Heaven » de Rob, « The One Inside » empruntant à NIN et Manson sans être aussi emphatique, « Blackjazz Rebels » aussi nerveux et sec qu’un coup de trique pendant Easy Rider), ou lors des segments les plus biscornus (l’ambiance fête foraine malsaine de « My Dying Drive », « How Your Story Ends » bancal et suintant la fausse méchanceté, le final apocalyptique « Paint The Sky Black » dans lequel le groupe jette toutes ses forces), SHINING ne se contente pas de divertir, mais provoque, dérange, déstabilise avec ingéniosité, en injectant dans des structures régulières des arrangements, des tics de composition personnels, et réussit de fait un amalgame génial entre la rigueur du Pop/Rock et la liberté de ton du Jazz.
Que ce soit dans les lignes de basse qui n’en font qu’à leur tête, dans les rythmiques qui semblent partir systématiquement dans la direction opposée, ou dans ce saxo démoniaque qui agite de ses boucles des riffs accrocheurs et puissants, tout n’est sur One One One que détermination et refus des conventions, sans jamais tomber dans le piège de l’originalité à tout prix qui a déjà étouffé bien des affaires dans l’œuf.
Car Jørgen et sa bande sont trop talentueux et amoureux de leur musique pour se perdre en elle et en des considérations égoïstes de musiciens frustrés. Ils ne veulent que l’efficacité, le mélange des genres, tout en gardant une cohésion indéniable qui donne à leurs morceaux une patine dansante contagieuse et une puissance époustouflante.
Et c’est ce qui donne toute son épaisseur à ce crossover de l’impossible. Car loin de mixer des éléments disparates vaguement Jazzy et des intonations caverneuses et nihilistes Black, SHINING réussit le tour de force de créer une nouvelle tendance, un nouveau courant, qui ne se limite pas à juxtaposer d’une manière hasardeuse deux styles radicalement opposés, mais qui les assemble, et opère une refonte complète, un peu à la manière de DIABLO SWING ORCHESTRA (dans des genres différents bien sur), pour au final, n’être qu’eux même, ce qui est déjà en soi une gageure. Et ce nouvel album pousse la recette à son paroxysme, nous entraînant dans un ballet virevoltant et enivrant, dans lequel nous ne menons pas la danse mais nous laissons porter. Un genre de boombox de l’enfer, dans les flammes qui vous grillent.
Et quel meilleur cavalier que SHINING pour survoler la piste, sans avoir l’impression de faire le moindre effort.
Ajouté : Mercredi 19 Juin 2013 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Shining Website Hits: 8086
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