THE CNK (FRA) - Hreidmarr (Jan-2013)
THE CNK, c'est un peu l'assurance crasse de ceux qui connaissent leur potentiel et n'hésitent pas à le mettre en avant... Pourquoi être timoré ou la jouer profil bas lorsqu'on dispose d'armes de séduction massive, propres à conquérir un public friand de rythmes martiaux sur fond de mélodies Glam ? Hreidmarr et sa clique ont opéré un virage crucial à l'occasion de la sortie de L'hymne à la Joie il y a sept ans, et force est de constater que leur nouvelle direction irrite autant qu'elle enthousiasme. J'ai choisi mon camp depuis longtemps, car les vrais créatifs – ceux qui osent et qui réussissent – sont rares de nos jours. Alors oui, THE CNK a un humour parfois limite, oui ils ont de grandes gueules, mais n'est ce pas l'essence même du Rock depuis la nuit de temps ? Alors si vous êtes choqués, prudes, imperméable à l'humour borderline, passez votre chemin. Il restera toujours assez de groupes aseptisés pour vous... Et laissez THE CNK aux autres, à ceux qui sont prêts à écouter la parole divine de Mr Hreidmarr, que je vous retranscris fidèlement ci-dessous.
Line-up : Mr Hreidmarr (Chant), Mr Heinrich Von B (Guitare), Mr Fabrizio Volponi (Batterie), Mr Zoé Von H (Basse)
Discographie : Ultraviolence Über Alles (Album - 2002), L'Hymne a La Joie (Album - 2006), Révisionnisme (Album - 2012)
Metal-Impact. Bonjour à vous ! Parlez nous un peu de ce nouvel album, joliment intitulé Révisionnisme... Expliquez nous un peu comment vous est venue cette idée d'un album de covers, qui a choisi quoi et pourquoi ?
Hreidmarr. C'est quelque chose que nous avions envie de faire depuis très longtemps, nous en parlions même déjà en 2002, à l'époque de notre premier album. C'est quelque chose qui nous a toujours attiré, parce que d'une certaine manière, ça recoupe le côté ultra référencé de CNK. Nous avons toujours aimé les détournements, les références plus ou moins lisibles, voire les clins d'œil. C'est quelque chose qui est très présent depuis les débuts du groupe, aussi bien au niveau des visuels, que de la musique ou des paroles. Nous aimons citer, travestir les choses, pour en en faire émerger de nouvelles. C'est une démarche qui pour moi s'inclue parfaitement dans notre époque postmoderne, et qui, de toute façon, fait partie intégrante de l'univers du rock n' roll depuis ses origines. L'album de reprises, nous devions nous y frotter un jour ou l'autre.
Pour ce qui est du choix des reprises, nous avons en fait procédé assez simplement, chacun a amené une liste d'une dizaine de morceaux qu'il aimerait reprendre, et ensuite, on a beaucoup débattu, commencé à travailler sur des ébauches, et par élimination, on est parvenu au tracklist de l'album. Evidemment, ça n'a pas été facile et c'est vrai que nous avons davantage privilégié la cohérence de l'ensemble, l'efficacité des morceaux à la sauce CNK, plutôt que les coups de cœur.
MI. Etait-ce un moyen de revenir sur le devant de la scène d'une manière un peu originale, où n'aviez vous pas assez de matériel pour proposer un nouvel album de compositions ?
Hreidmarr. Non, c'était tout simplement ce que nous avions envie de faire à ce moment-là. La logique aurait voulu qu'effectivement, nous sortions d'abord un troisième album original, et ensuite l'album de reprises. Mais encore une fois, nous avons préféré suivre notre instinct, et de pas nous emmerder avec les diktats à la con du marché, d'autant que le marché en question n'a plus vraiment d'importance, par les temps qui courent...
MI. Beaucoup de gens considèrent que les plus grandes réussites de cet album sont les morceaux « à risque » comme les versions de « Sabotage », le medley de Gary Glitter ou encore les reprises de Cohen ou Nick Cave. Etes vous d'accord avec ça et est ce que ça vous surprend ?
Hreidmarr. Non, ça ne me surprend pas, et c'est aussi mon avis. Le fait est que nous ne voulions surtout pas tomber dans le côté parodique, comme beaucoup de groupes de Metal peuvent le faire, consciemment ou inconsciemment, lorsqu'ils font des reprises. Le trip « on prend du BRITNEY, du BONEY M ou du Corbier, et on fait du brutal Death avec, et c'est rigolo avec des blasts et des growls hahaha lol », très peu pour nous. Du coup, je crois que c'était là l'exercice le plus délicat : s'approprier vraiment les morceaux, sans pour autant les trahir, ni faire n'importe quoi, en conserver l'essence... Et de ce côté-là, forcément, les titres les plus éloignés de notre style laissaient une plus grande marge de manœuvre.
MI. J'ai personnellement adoré le côté plus glam du projet, avec la fantastique cover de « Too Fast For Love » des CRÜE (Juste énorme !), ou le « You Could Be Mine » des GUNS. Ce côté Sleaze, c'est naturel chez CNK ou bien est ce quelque chose de complètement spontané ?
Hreidmarr. On est fans de glam / punk / sleaze depuis des lustres, MÖTLEY et GNFR font partie de nos références absolues, les trucs avec lesquels nous avons grandi, donc ça semblait naturel pour nous... A vrai dire, j'avais même peur de me frotter à MÖTLEY au début, c'est les autres qui ont dû insister [Rires]...
MI. Reprendre du Glitter alors qu'il a défrayé la chronique il y a quelques années et encore aujourd'hui avec le scandale de la BBC, c'est volontaire, genre clin d'œil borderline ?
Hreidmarr. [Rires] Non, nous sommes vraiment fans de Gary Glitter, et d'une manière générale, du glam rock anglais des 70's ! On aurait pu tout aussi bien reprendre les Sweet ou Slade... A la base, c'était une idée de Snowy et moi. Il m'avait parlé de reprendre « Rock n' Roll part II », sauf que ce morceau est un peu succinct au niveau du chant (ça doit se limiter à « hey hey hey »)... Je lui ai donc proposé de le compiler avec deux autres gros hits, à savoir « Angel Face », et « Do You Wanna Touch », aux lyrics pour le moins perturbants, vu le contexte, effectivement.
MI. Comment se sont passé les collaborations sur cet album ? Pourquoi ces choix de guests ? Par affinités ou par réelle envie ? Se sont elles concrétisées facilement ?
Hreidmarr. Les deux, déjà, ce sont tous de très bons potes. Pour Snowy, c'est un peu particulier, c'est plus qu'un guest, il a vraiment été considéré comme le cinquième membre du groupe sur cet album. Cela fait des années que l'on se connaît, on s'est rencontré à l'époque où lui et moi étions tous les deux signés sur Osmose, lui avec NOTRE DAME, moi avec ANOREXIA. On s'apprécie mutuellement, et on parlait depuis longtemps de faire quelque chose ensemble. Et l'album de reprises était le contexte idéal pour ce genre de collaboration.
Concernant Swan, ça tombait un peu sous le sens : BLACKRAIN avait enregistré une reprise de « Get a Gun » pour la réédition de notre premier album, reprise qu'ils continuent de jouer live, et qui figure même sur leur second album, dans une version remaniée. Et sa voix collait parfaitement au morceau.
Pour « You Could Be Mine », on avait besoin d'un guitariste assez badass pour se mesurer aux solos de Slash, et Pills est tout simplement le meilleur que l'on connaisse dans le style. D'ailleurs, je suis vraiment ultra fan de ce qu'il a fait sur ce morceau !
MI. Si vous aviez pu rajouter d'autres morceaux sur cet album, qu'auriez vous choisi ? Pourquoi ? Y'a t'il des choix que vous regrettez ? Et quelle pourrait être la reprise la plus improbable pour THE CNK ?
Hreidmarr. Non en fait, comme je le disais tout à l'heure, on a passé énormément de temps sur la sélection des morceaux, pour parvenir à ce que l'on voulait, donc nous ne regrettons rien. Au final, on a tenté de laisser de côté le sentimentalisme à la con, pour privilégier l'efficacité, la cohérence de l'ensemble, et faire en sorte que tout cela sonne comme un véritable album de CNK, pas simplement une compilation de reprises hétéroclites. En revanche, on a commencé à travailler sur des ébauches, dont pas mal ont été abandonnées en cours de route car elles ne fonctionnaient simplement pas à la sauce CNK (notamment « Free Bird » de LYNYRD SKYNYRD, « God of Thunder » de KISS, « Wave of Mutilation » des PIXIES ou « Bad to the Bone » de Georges Thorogood)...
La reprise la plus improbable ? Je ne sais pas, j'avais très envie de reprendre « Les lacs du Connemara » de Sardou, mais...
MI. Parlez nous un peu des concerts passés et à venir pour la promo de Révisionnisme ? A quoi peut-on s'attendre ?
Hreidmarr. Nous avons commencé à donner quelques concerts warm-up, qui se sont très bien passé. On inclue progressivement des covers dans notre setlist, on teste ce qui fonctionne ou non. Visuellement, on fait évoluer le show au fur et à mesure aussi. Et là on se prépare à plus tourner à l'étranger dans les mois qui viennent. Par ailleurs, pour les parisiens, nous serons en tête d'affiche le 1er mars au Divan du Monde, pour un show exceptionnel, avec Diapsiquir et Varsovie en special guests.
MI. Cinq ans se sont écoulés entre L'Hymne à la Joie et Révisionnisme. Que s'est il passé entre temps ?
Hreidmarr. Déjà, nous avons sorti la réédition de Ultraviolence Über Alles dont je parlais tout à l'heure, qui était sold-out depuis des années, agrémentée de l'intégralité de l'album repris ou remixé par des gens que nous apprécions particulièrement (Varsovie, Herrschaft, HIV+, Helel, Blackrain, etc). Ensuite, nous avons pas mal tourné, mais c'est vrai que nous avons passé énormément de temps à travailler sur Révisionnisme, beaucoup plus qu'on ne le pensait, à vrai dire. A la base, on voyait plutôt cela comme un genre de récréation, sauf qu'on était très loin de se douter qu'on y passerait presque quatre ans, et que ça allait devenir le projet le plus complexe et harassant de notre carrière jusqu'ici.
MI. Quel regard portez-vous sur L'hymne à la Joie avec le recul du temps ? En êtes vous toujours aussi satisfaits ?
Hreidmarr. Evidemment, avec le recul, il y a toujours des choses que l'on aurait sans doute fait différemment... Mais oui, nous en sommes toujours très fiers, dans la mesure où nous nous impliquons toujours corps et âmes et à tous les niveaux dans nos albums, ils représentent parfaitement ce que nous étions à ce moment-là, une sorte de climax d'un instant T dans nos vies. Rien à regretter, ni à changer, de fait.
MI. Comment s'est opéré le glissement du Count Nosferatu Kommando au Cosa Nostra Klub ? Le groupe a en effet non seulement changé radicalement sa musique mais aussi son image...
Hreidmarr. C'est assez simple en fait, 5 années séparent Ultraviolence de L'Hymne à la Joie, et nous sommes toujours en mouvement, piétiner en gesticulant, nous laissons ça à d'autres... Lorsque nous avons commencé à travailler sur <y>l'Hymne à la Joie, courant 2005, nous avions effectivement envie de repartir à zéro, de transformer CNK en véritable groupe, nous avions un nouveau line-up, et nous tenions beaucoup à cette idée de « gang », de famille soudée, nous avons donc pensé que changer la signification de l'acronyme serait un bon moyen de rendre le nom du groupe plus proche de notre état esprit du moment, sans pour autant tourner le dos à un passé dont nous sommes toujours fiers.
MI. Le côté limite, c'est important pour le groupe ? La provocation à tout prix ? Ou est ce juste une question esthétique ? Si on voit en vous un savant mélange entre LAIBACH et le MANSON de Golden age Of Grotesque, ça vous dérange ?
Hreidmarr. Non, ça ne nous dérange pas. Pour LAIBACH, nous pourrions difficilement prétendre le contraire, tout le travail de NSK a été – et reste – une énorme influence pour nous, même si notre approche est volontairement plus « légère », plus rock n' roll, en fait. Ce qui pourrait effectivement nous rapprocher, dans l'absolu, de la démarche d'un Manson, qui a lui-même beaucoup emprunté à LAIBACH. Ceci dit, nos racines sont trop européennes pour que l'on puisse le considérer comme une influence, à quelque niveau que ce soit.
Après, je ne crois que l'on se veuille provocateurs. On l'est, naturellement, probablement parce qu'on ne peut pas faire autrement, et que nous détestons la langue de bois, le consensus. Mais nous ne passons pas notre temps chercher les emmerdes non plus, à brainstormer sur ce qui pourrait choquer le bourgeois bien-pensant ou je ne sais quoi. A vrai dire on n'en a rien à foutre. On se contente la plupart du temps de faire notre truc, sans trop se soucier de ce qu'il se passe autour de nous... Au-delà de ça, et sans non plus nous prendre trop au sérieux, nous cherchons à amener les gens à une réflexion, à les sortir de cette apathie, de cette fainéantise intellectuelle qui tend à se généraliser, je pense que c'est quelque chose qui est devenu quasi vital de nos jours, et je ne crois pas que cela soit possible sans légèrement les bousculer.
MI. En tant qu'individus, quel regard portez vous sur votre pays ? Au niveau des infrastructures musicales, au niveau politique ? Quelles sont vos relations avec la scène Metal française ?
Hreidmarr. Personnellement, je pense que la France – et par extension, l'Europe – est en état de décomposition avancée, et ce jusqu'au plus profond de ses fondations. Ceci dit, c'est dans l'ordre des choses, et c'est assez rare de pouvoir vivre en direct la chute d'une civilisation. Surtout à la vitesse 2.0.
Niveau infrastructures musicales, c'est un peu en train de bouger, mais on a quand même toujours dix trains de retard sur pas mal de pays. Et nos relations avec la scène française, boarf, c'est très aléatoire. On y a nos potes, c'est un peu toujours les mêmes, mais de toute façon, on n'est pas vraiment du genre à chercher à copiner avec tout le monde...
MI. Si vous deviez résumer la décadence en un seul artiste, qui choisiriez-vous ? Et pourquoi ?
Hreidmarr. GG Allin, probablement. Parce que contrairement à des Blitzkriegs comme les PISTOLS ou autres, il a tenu le cap assez longtemps, et de la manière la plus radicale qui soit.
MI. Un dernier mot pour vos fans ?
Hreidmarr. « La condition de vaincu seule m'intéresse, me touche, non par commisération, mais parce que les vainqueurs appartiennent à une fiction idéale qui est le filigrane moralisateur de l'Histoire... ».
Ajouté : Jeudi 21 Mars 2013 Intervieweur : Mortne2001 Lien en relation: The CNK Website Hits: 13913
|