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MY DYING BRIDE (uk) - Aaron Stainthorpe et Lena Labé (Sept-2012)


MY DYING BRIDE fait figure de précurseur de la vague Doom Metal qui a déferlée sur l’Europe au début des années 1990. Véritable figure de proue du fameux label Peaceville, qui à l’époque regroupait en son sein tout le gratin underground anglais avec des groupes comme PARADISE LOST, KATATONIA, ou bien encore ANATHEMA, les bougres ont su rester fidèles à leurs racines et n’ont jamais dévié d’un iota ou presque. Alors que beaucoup se perdaient dans les méandres d’une innovation musicale déconcertante pour de nombreux fans, les britishs ont gardé le cap coute que coute sans jamais être attirés par les sirènes commerciales ! Un exemple pour de nombreux combos qui ont cédé aux sirènes du gain et acceptés de nombreuses compromissions pour essayer de fleureter avec les cimes du succès. Nos garçons de Bradfort (ville du Nord de l’Angleterre) sont un exemple car rien au cours de ces 22 années d’existence n’a pu les faire dévier de leur vérité, un vrai sacerdoce ! Leur étendard s’appelle la liberté et si de nombreux gangs s’en réclament, peu sont capables de réaliser leurs rêves sans brader quelque peu leur création artistique ! Il faut dire que nos lascars sont dotés de nombreux atouts à commencer par un chanteur charismatique tant ses textes sont habités et vous entrainent dans un univers unique et malsain qui ne peut laisser personne indifférent ! Le bougre est tourmenté, hanté par le Christ et tout ce qui a trait à la religion ! Il vous suffit de voir sa performance scénique totalement impressionnante pour être convaincu ! Aaron Stainthorpe semble être touché par le syndrome de Docteur Jekyll et Mr Hyde tant l’homme à la ville est éloigné du personnage qui sévit sur scène. Une vraie métamorphose qui a contribué à assoir la réputation du gang lors de prestations scéniques hallucinantes où notre chanteur semble totalement possédé ! Un personnage totalement charismatique qui, chaque soir, va au-delà de ses limites. Un acteur né qui donne toute sa dimension sur les planches où à chaque morceau transparait une émotion guidée par des références souvent liées à la bible ! Appuyé par Andrew Craighan, un guitariste hors pair et parfait pour amener des riffs impitoyables dotés d’une puissance et d’une ambiance digne des meilleurs films d’horreurs. Un duo de choc qui a permis au groupe de devenir une véritable icone du Doom Ghotic Metal qui a inspiré une quantité incroyable de jeunes loups aux dents longues ! Mais personne à ce jour n’a pu réellement les égaler tant l’intensité qu’ils dégagent est phénoménale. Map Of All Our Failure n’échappe pas à la règle et n’est pas une galette à mettre entre toutes les mains tant l’univers qu’il développe est sinistre, froid et sombre. Pas une lueur d’espoir dans cette décente aux enfers qui vous entraîne au fin fond des abîmes sans que rien ne puisse arrêter votre chute. Il vous glace le sang dès la première écoute et vous entraine dans les méandres noirs de l’âme humaine. Une expérience inégalable d’où vous ne ressortez pas indemne ! Cet opus s’adresse à un public averti, friand de sensations extrêmes, bercé par une ambiance lugubre, noire et malsaine. Ici, ne cherchez pas un soupçon de joie et de bonne humeur, vous optez pour un voyage sans fin dans les abysses du désespoir. C’est ce qui fait la force et l’originalité de MY DYING BRIDE ! On est loin des clichés granguignolesques développés par certains combos de Doom. Les MY DYING BRIDE ont su, au fil des 22 dernières années, imposer leur marque et se faire une place unique dans le petit monde métallique ce qui n’est pas une chose facile ! Devant un tel manifeste du désespoir, Metal Impact se devait de ne pas passer à coté de l’opportunité de rencontrer le charismatique Aaron Stainthorpe, pilier et membre fondateur de MY DYING BRIDE. Le personnage est à la hauteur de sa réputation, à mille lieux du dépressif romantique que l’on pourrait imaginer. Bien au contraire, c’est un vrai gentleman typiquement british doté d’une politesse inégalable, sympathique et très affable, un vrai passionné totalement impliqué qui adore parler de sa dernière entité et qui sait faire preuve d’un humour dévastateur. Prêts pour le jeu des questions réponses ! C’est à toi Aaron...

Line-up
: Aaron Stainthorpe (chant), Léna Labé (Basse), Andrew Craighan (Guitare), Hamish Glencross (Guitare), Shaun (clavier / violon)

Discographie : As The Flower Withers (1992), Turn Loose The Swan (1993), The Angel And The Dark River (1995), Like God Of The Sun (1996), The Angel And The Dark River / Live At The Dynamo (1997), 34.788%... Complete (1998), The Light At The End Of The World (1999), The Dreadful Hours (2001), The Voice Of The Wretched (2002), Songs Of The Darkness, Words Of Light (2004), A Line Of Deathless Kings (2006), An Ode To Woe (2008), For Lies I Sire (2009), Evinta (2011), A Map Of All Our Failure (2012)

M-I Interviews du groupe : MY DYING BRIDE (uk) - Aaron Stainthorpe (Sept-2006), MY DYING BRIDE (uk) - Aaron Stainthorpe et Lena Labé (Sept-2012)



Metal-Impact. Dans quel état d’esprit avez-vous travaillé sur A Map Of All Our Failure ?
Aaron Stainthorpe. Pour être honnête, on n’a jamais cessé d’écrire donc quand on a commencé à travailler ensemble sur ce nouvel album, certains riffs et idées avaient déjà un ou deux ans. Bien sûr, c’était un peu différent à cette époque mais au final les morceaux qu’on a écrit n’étaient pas du tout éloignés de ce que l’on a composé cette année. Donc, je dirais que c’est un bon mixte entre les anciens et les nouveaux morceaux Je crois qu’il reflète bien où nous en sommes aujourd’hui en tant que musiciens et aussi en tant qu’individus. Nous voulons que chaque album soit meilleur que le précédent, on doit donc se concentrer au maximum sur l’écriture et travailler très dur ! Et puis une chose importante c’est que chaque titre doit venir du cœur. On ne pourrait pas jouer des titres pur Rock’n’Roll, on joue de la musique émotive, profonde et provocatrice. On tente par tous les moyens d’atteindre l’auditeur, on veut qu’il ressente quelque chose de fort. Ce n’est pas facile à réaliser, c’est vraiment un objectif difficile à atteindre mais c’est le nôtre. J’adorerais être capable d’écrire des chansons Rock de trois minutes mais ça n’arrivera jamais. Ce n’est pas moi, je ne suis pas dans cet esprit Rock, nous faisons des morceaux très sombres et c’est ce que nous aimons par-dessus tout.

MI. C’est pourquoi vos titres sont souvent très longs, vous essayez de créer une atmosphère ?
Aaron. Totalement, parce que pour raconter une histoire il faut du temps pour faire en sorte que celui qui t’écoute soit pris par l’histoire et la musique. Si tu fais un titre court et rapide ça peut être bien aussi mais s’est fait dans un esprit totalement différent du nôtre. Nous on préfère apporter beaucoup de détails au récit pour que la personne soit emportée par le texte et soit complètement happée par le titre. C’est ce qu’on adore. Au départ, on a essayé d’écrire des morceaux plus courts parce qu’on voulait mettre plus de titres sur ce disque et aussi s’éloigner des 7 à 8 minutes qui sont un peu notre marque de fabrique. Mais très vite on s’est aperçu que ce n’était pas possible. On a sorti un EP avant A Map Of All Our Failure de 27 minutes : The Barghest O Whitby. Au départ, on était partis pour développer quelque chose de court et finalement on a du le sortir à part vu la longueur du morceau. Mais nos fans adorent ce genre d’EP. Nous on s’en fiche un peu de la durée d’un morceau, ce qui est important c’est l’histoire que tu développes et dans laquelle tu t’impliques totalement qui est fondamental Et surtout d’arriver au bout de ce que tu as envie d’exprimer.

MI. Pourquoi sortez-vous autant d’EP ?
Aaron. C’est quelque chose de différent mais qui est très important à nos yeux. Ce qui est important c’est qu’on peut expérimenter beaucoup plus et aller beaucoup plus loin dans notre démarche avec ce type de support. C’est un plus, les médias et les fans sont moins sensibles et plus tolérant face à ce genre de produit. C’est totalement différent comme démarche. Lorsque tu leur offre un nouvel opus ou tu sais que tu joue une partie importante, là il faut être très professionnel tu n’a pas droit a l’erreur sinon la sanction est immédiate. L’EP nous permet de nous lâcher plus parce qu’on sait qu’il sera pris en tant que tel. On peut innover et prendre des risques. C’est dans notre contrat mais on aime ça avant tout ! On est libre ! Quand on a apporté ce morceau à Peaceville, il n’y croyait pas et il savait qu’il ne passerait jamais en radio ! [Rires] Ils nous ont signé avant tout parce qu’ils aiment le groupe et ils nous ont toujours laissé totalement libre au niveau artistique. Quand on arrive dans les bureaux avec un titre très long, ils sont contents et c’est d’ailleurs ce qu’ils aiment chez nous. Ils savent très bien qu’on ne va pas leur fournir un truc tout simple de trois minutes ! [Rires] Si on était sur un autre label, je pense que cela ne se passerait pas du tout de la même manière, j’en suis totalement convaincu. On ne serait certainement pas libre et ils nous imposeraient leurs règles. La plupart des maisons de disques sont à la recherche de morceaux accrocheurs de trois minutes qui puissent passer sur les ondes. On a eu plusieurs offres de majors qui nous offraient beaucoup d’argent on a étudié les propositions et on a refusé. L’argent n’est pas un moteur pour nous, il est fondamental de garder notre intégrité et notre liberté de création, voilà notre motivation principale. Si nous avons envie de faire un titre de 20 minutes, nous voulons pouvoir le faire et on sait qu’avec Peaceville c’est possible. La plupart des labels ne sont pas intéressés par la musique, ce qu’ils recherchent avant tout c’est le profit. Il leur faut des chansons courtes et accrocheuses faites pour Headbanguer et passer en Radio. Nous n’écrivons pas ce genre de musique, nous ne sommes pas dans la compromission. Du coup, on n’a pas d’argent ! [Rires]

MI. Cela fait un bail que vous êtes chez eux, plus de vingt trois ans !
Aaron. Oui, c’est incroyable ! Bien sûr, il y a eu des hauts et des bas mais nos albums sont un peu nos enfants et aussi les leurs quelques part. On a avec eux une relation extraordinaire qui s’est développée au cours de toutes ces années. Quand tu signes un contrat en général c’est pour quatre ou cinq ans et nous on a renouvelés à chaque fois l’expérience avec eux. On a eu de nombreuses discussions avec d’autres mais au final on revenait toujours chez Peaceville car ils nous offraient le meilleur et ils comblaient nos attentes. A chaque fois, ils nous faisaient une offre. Au fils des années, ils savaient qu’ils pouvaient nous perdre car nous prenions de l’ampleur et pourtant nous résignons avec eux systématiquement car ils nous offraient la liberté au niveau créatif ce qui n’a pas de prix pour un artiste. On ne voulait pas être étranglés par des responsables qui voulaient à tout prix faire de l’argent. Bien sûr, je comprends très bien leur point de vue, ils ont besoin de gagner du cash sonnant et trébuchant, c’est leur business et les groupes sont leurs produits. Cela a du sens bien évidemment. Peaceville, et je remercie Dieu pour ça, s’en foutent totalement et n’on pas cet état d’esprit là. Nous faisons ce que nous voulons sans jamais avoir de véto. Et on a été très loin dans ce sens, on a sorti il y a pas longtemps un triple cd de musique classique avec Invita, aucun label n’aurait voulu sortir un truc pareil. Grâce à Peaceville, nous pouvons évoluer et nous développer sans aucune contrainte. Il n’y a personne derrière nous pour nous dire fait ceci ou fait cela. Si cela était arrivé nous aurions splittés plutôt que de renoncer à notre intégrité.

MI. Tu penses que cette attitude peut détruire un groupe qui cède à la tentation ?
Aaron. Oui, totalement parce que cela t’oblige à n’être pas toi-même et au final tu fais de la musique qui ne te ressemble pas et que tu n’as pas envie de faire. Quand on te donne beaucoup d’argent, les majors attendent un retour sur investissement, c’est le deal ! A partir de là, ils vont mettre leur nez partout et faire en sorte que tu écrives des morceaux qu’ils pensent pouvoir vendre le plus facilement possible sur le marché. Une chose est certaine, nous ne le ferons jamais !

MI. Pensais-tu que MY DYING BRIDE allait perdurer aussi longtemps ?
Aaron. Non, jamais j’aurais imaginé que nous puissions exister pendant tant d’années. On a commencé par faire des démos et la seule chose que tu espères quand tu débutes, c’est que certaines personnes vont aimer ta musique car si c’est le cas contraire tu ne peux pas faire grand-chose. Tu peux changer de nom et devenir un autre groupe. Heureusement pour nous, les gens ont aimés nos titres et nos démos se sont très bien vendues. Il ne faut pas oublier qu’à notre époque c’était encore les cassettes qui circulaient. Après, on s’est mis à la recherche d’un label et ca nous a pris presque deux ans. C’est incroyable quand je pense à tout ça, je suis tellement heureux et satisfait de tout ce que l’on a accompli pendant ces 20 ans. Maintenant mon ambition c’est de pouvoir jouer dans des pays ou je n’ai jamais pu aller pour l’instant comme le Japon. Tous ceux qui ont pu se rendre dans ce pays m’ont dit que c’était fantastique, je rêve d’aller là bas avec MY DYING BRIDE mais je ne sais pas si cela arrivera un jour.

MI. Pensez-vous faire quelque chose pour la célébration de vos 25 ans d’existence ?
Aaron. On est en train d’en discuter, on espère faire quelque chose mais pour l’instant il n’y a rien de concret de prévu ! Mais ça serait vraiment bien. Après ce n’est pas simple, on n’a pas de manager, c’est moi et Andrew qui gérons le groupe ce qui signifie que c’est à nous de tout organiser et c’est un travail énorme. Et on est déjà très occupés avec MY DYING BRIDE. On travaille avec le manager de PARADISE LOST, Andy Farrow depuis des années et il a toujours des idées géniales, il nous a dis de l’appeler pour nos 25 ans et qu’il aura quelque chose à nous proposer. Il sait que l’on adore jouer dans des endroits insolites, on ne cherche pas forcément à faire des shows sold out mais plutôt jouer dans une église ou un truc dans cet esprit. Ce qui est sûr c’est qu’on fera quelque chose mais aujourd’hui je ne peux pas te dire quoi !

MI. La pochette est superbe, c’est toujours une œuvre de Rhett Podersoo ?
Aaron. Oui, il est d’origine africaine mais aujourd’hui il vit à Londres. J’ai découvert ce qu’il faisait il y a quelques années et j’ai tout de suite accroché à son style et j’ai eu envie de travailler avec lui. Il a fait la pochette de For Lies I Sire et j’ai envie vraiment de poursuivre l’aventure avec lui car ce qu’il fait nous plait vraiment. Quand on a commencé à en parler c’était juste après l’écriture des chansons on avait alors une vision apocalyptique qui se dégageait de notre musique. On cherchait quelqu’un qui puisse faire apparaitre tout cet univers surréaliste ou régnait l’angoisse et une ambiance un peu maléfique. Mais finalement, à la fin de l’enregistrement on s’est aperçu que les titres n’avait plus rien à voir avec tout ça, on avait changé de direction même si les fondamentaux étaient présents. On s’est adressé à Rhett Podersoo, on voulait quelque chose de moderne et près des paroles qui donne une vraie image du concept que l’on avait développé. Il a fait un excellent travail et pour chaque titre il y a une illustration que tu trouves à l’intérieur du livret. C’est un peu comme une nouvelle sous forme graphique, il a réussi une très belle réalisation qui met en scène tous nos textes. Et je veux encourager tout le monde à acheter l’album, ne le téléchargez pas ou, si vous le faites, procurez vous tout le package parce que c’est un tout, l’un ne va pas sans l’autre. Quand vous aurez le livret entre les mains, vous comprendrez mieux le sens de nos écrits !

MI. Quand on regarde les photos de toi, il y a des images très Christiques. La religion semble très importante pour vous ?
Aaron. Oui, mais c’est juste de belles images. La Bible reste pour nous une grande source d’inspiration. Il y a des centaines de récits plus dingues les uns que les autres et toutes ces histoires sont reliées entre elles. C’est ce qui m’intéresse et cela ne veut dire en aucun cas que je suis croyant au sens strict du terme. Il y a tant d’idées intéressantes dans la Bible qu’il serait dommage de passer à coté. Je m’intéresse à la théologie, c’est évident et j’ai ma vision de tout cela. Mais je ne suis pas là pour chanter sur les problèmes que rencontre la religion à travers le monde. C’est quelque chose que je comprends mais qui ne me concerne pas. Souvent, les gens me demandent pourquoi j’écris des textes sur le Christianisme et je répond parce que cette religion est importante en Europe et existe depuis des siècles. Il y a eu tellement de guerres en rapport avec la religion. Si il y avait un seul Dieu, peut être serions nous heureux et en paix. Mais malheureusement, chacun a son Dieu et pense que c’est le meilleur et cela crée depuis toujours des conflits entre les peuples. C’est une honte. La plupart des gens qui soutiennent une religion ne sont pas heureux. Ils sont tout le temps en colère, furieux et agressifs quelquefois, ce sont des fanatiques. Nous ne faisons pas partie de ces gens là ! Toutes ces personnes qui se dévouent entièrement à une religion quelle qu’elle soit ont en général un caractère très suspicieux ! J’ai envie de leur dire détendez vous ! Ne devenez pas des malades par la faute de vos croyances. La religion aux cours des siècles n’a su amener que beaucoup de souffrance et de peine et c’est supposé être l’inverse. Quand tu lis les écrits, ils prêchent le bonheur et l’épanouissement.

MI. Est-ce qu’en Angleterre la religion à toujours une place prépondérante ?
Aaron. Non, ça a beaucoup changé. Il y a l’Anglicanisme et le Christianisme. Mais tout ça a évolué et ce coté religieux est moins présent qu’auparavant. Aujourd’hui, les gens ont d’autres préoccupations, ils sont plus attirés par l’envie de gagner de l’argent et d’obtenir une bonne position sociale au sein de la société. Ils veulent aller de plus en plus haut et briller le plus possible. Mais je comprends certaines personnes qui ont besoin de la religion pour vivre, elle leur permet souvent de surmonter les difficultés de la vie. Et c’est bien pour eux car tout le monde a besoin d’aide à un moment ou un autre de sa vie. Ce que je n’aime pas c’est l’énorme système qui régie les croyances et qui gère des sommes colossales. Au nom de la religion, on demande de l’argent aux gens et on ne sait pas ce que cette manne énorme devient. Pour moi ce n’est pas ça être croyant, la religion doit venir du cœur et de l’esprit et ce n’est pas le cas, c’est un business. Tout ce qu’ils veulent c’est obtenir le maximum d’argent, ils se foutent royalement de toi. C’est du lavage de cerveaux tout bonnement et personne ne peut rien y faire, c’est très triste de voir comment ce système fonctionne. La religion qu’elle quelle soit devrait être quelque chose de fantastique. Je vis en Angleterre mais je voyage beaucoup et en Irlande ou aux Etats-Unis, c’est pareil. Quand tu vois des prêtres qui abusent d’enfants et qui au final ne sont pas sanctionnés, c’est insupportable. Le pape répond : « oui c’est terrible de voir ça » et quelles sanctions applique-t-il ? Il déplace ces prêtres dans d’autres paroisses. Ils devraient être emprisonnés et au lieu de ça on les mute ailleurs. C’est dément de voir ça.

MI. Quand tu écris, c’est autobiographique ?
Aaron. Non, quelques chansons parlent directement de moi et des choses qui me sont arrivées au cours de ma vie. Il est évident que certains titres ne nécessitent pas de tenter de lire entre les lignes pour comprendre. Mais j’aime les histoires surréalistes, bizarres et romantiques. Mes textes sont un peu torturés et pas faciles d’accès. Mais c’est fait exprès, il ne faut pas lire les mots mais essayer de réfléchir au sens profond qui se dégage des paroles. Là vous trouverez le secret caché de l’histoire, il y a plusieurs niveaux de lecture et c’est au lecteur de les découvrir et pas à moi de tout révéler. C’est aussi ce qui est intéressant dans ce genre de concept.

MI. En 1995, vous avez ouvert pour IRON MAIDEN sur une longue tournée. Quel regard portes-tu sur cette époque ?
Aaron. C’était fantastique et complètement dingue pour nous. Notre premier concert a eu lieu à Helsinki et on est partis de Bradford pour rejoindre la Finlande. Ca nous a pris deux jours complets et lorsque nous sommes arrivés enfin dans les loges nous étions très nerveux. Steve Harris est venu nous voir et pour nous c’était comme si le messie arrivait face à nous [Rires] C’était la première fois qu’on le rencontrait en chair et en os et la première chose qu’il nous ait dis c’est : « vous savez les gars, j’adore MY DYING BRIDE » et nous on a répondu : « Whao réellement ». Après il nous a dis qu’il trouvait notre dernier album excellent et il a ajouté que pour lui c’était très important d’avoir un groupe anglais en première partie et que pour lui on était les meilleurs. C’était pour cela qu’il nous avait choisi et pour aucune autre raison et il a ajouté : « prenez du plaisir, amusez vous, tout est gratuit, la nourriture, les boissons, etc… » On était aux anges. Puis il nous a posé une question : « J’espère que vous jouer au football ? » On a répondu : « oui, on adore » « Demain on a un match contre l’équipe de Stockholm et je compte sur vous ». Il est supporter de l’équipe de West Ham. Le jour d’après, on s’est retrouvé moi et Andrew parés du maillot de l’équipe de West Ham avec les musiciens de MAIDEN à jouer au foot, c’était hallucinant. Steve est très bon, c’est un passionné de foot. Je jouais ailier gauche, c’était vraiment marrant. Steve est un type super enthousiaste, il nous encourageait en permanence, c’était carrément irréel pour nous, on était sur la tournée depuis seulement deux jours et on faisait partie de l’équipe de foot d’IRON MAIDEN. On avait fait seulement deux shows ; la Finlande et la Suède et on était potes, c’était complètement dingue.

MI. Vous avez aussi ouvert pour DIO aux Etats-Unis c’était le même esprit ?
Aaron. Complètement, c’était là encore totalement magique. On venait de faire une tournée avec IRON MAIDEN et on enchaînait aux States avec DIO. Ronnie est le type le plus gentil que j’ai jamais rencontré. Parfois dans ce métier tu rencontres des musiciens célèbres qui sont dans le Business depuis de nombreuses années et ça peut mal se passer, tu peux être très déçu, le décalage entre la réalité et l’image que tu as peut être énorme. Ils peuvent se comporter comme s’ils étaient Dieu et toi tu n’as qu’à exécuter leurs ordres. Mais avec Ronnie ce n’était pas du tout comme ça, c’était tout le contraire. Le premier concert qu’on a donné était à Denver si je me souviens bien dans un grand amphithéâtre. On était très nerveux. On ne l’avait jamais rencontré, on connaissait le chanteur mais pas l’homme. Quand on est arrivés dans notre loge, il est tout de suite venu nous voir et il nous a offert des tasses de thé et de la bière anglaise. On a été très touchés, cela montrait l’attention qu’il nous portait. Il aurait pu ne rien nous offrir et ne pas se préoccuper de nous à notre arrivé. Il nous a offert aussi des biscuits aux chocolats anglais, des présents de toutes sortes, on était abasourdis par tant de classe et de gentillesse. C’était un tout petit bonhomme et moi je suis plutôt grand, la rencontre était assez marrante. Je l’ai remercié, il était là et il s’est approché de moi et il m’a pris dans ses bras directement, il ne serrait pas la main c’était comme ça avec lui. Là j’étais super impressionné c’était un moment très fort. Ensuite, pendant toute la tournée, on discutait ensemble, c’est le mec le plus adorable que j’ai rencontré dans ma carrière. Quand il est mort, j’ai trouvé ça tellement tragique. Puis on est rentré des USA pour faire un petit break et on devait repartir en tournée avec lui quelques jours après mais notre batteur est tombé malade et on n’a pas pu assurer ces dates. Quelques années plus tard, Ronnie est venu jouer en Angleterre et je lui ai envoyé un mail en lui demandant si il y avait une chance qu’on puisse être sur la Guest list. Et peu de temps après, j’ai reçu un appel de son tour manager qui m’a dis : « Hey Aaron vient nous voir, Ronnie veut te rencontrer » Whao j’y croyais pas, il se souvenait de moi et bien sûr on est allé à la salle. On nous a emmenés en Backstage et Ronnie nous attendait. Il m’a dis : « Hey Aaron tu es toujours aussi grand » et moi j’ai répondu « et toi toujours aussi petit ». Et on a ris tous les deux. Il était vraiment extraordinaire et avait aussi beaucoup d’humour, il nous manque énormément.

MI. Est-ce que ces premières parties on changé quelque chose pour vous ?
Aaron. Je ne pense pas. Tout simplement parce que ces groupes jouaient du Heavy Metal. Et nous nous jouons un style complètement différent. Le public nous a très bien accueilli mais je ne pense pas qu’il soit devenu fans de MY DYING BRIDE, on était trop différents de ce qu’ils appréciaient. On joue une musique plus underground qui est beaucoup moins facile à appréhender. C’est difficile de rentrer dans notre univers torturé … [Rires] On n’a pas de disques d’or plein les placards, c’est un style très difficile d’accès. Par contre ce qu’on a appris de toutes ces légendes c’est qu’on se devait de respecter les gens qui étaient autour de nous quand on est en tournée. Et qu’il ne fallait pas avoir un ego surdimensionné parce que tu joues dans un groupe de Rock ou de Metal. Heureusement, personne n’a au sein de MY DYING BRIDE ce genre d’attitude, on a beaucoup appris d’IRON MAIDEN à ce niveau là. Avec eux, on faisait la tournée des bars, il y avait Nicko, Steve et ils étaient en permanence avec nous, pas d’en un espace à part qui leur était réservé et auquel personne n’avait accès. En plus Steve payait toujours tous les verres que l’on buvait ! [Rires] C’est vrai et ça en devenait même dangereux vu notre consommation un peu hors norme. Voilà ce qu’on a appris : « Ne soit pas un trou du cul. A partir du moment où tu vas commencer à te prendre pour une Rock Star, tout le monde va te haïr ! » Ca a été une bonne et très importante leçon pour nous qui nous a beaucoup apporté à tous les niveaux. Rester simple et être un être humain normal, c’est quelque chose de fondamental pour nous.

MI. Vous avez aussi ouvert pour METALLICA ?
Aaron. Oui, c’était un bon concert et Léna était là.
Léna Labé. Oui, je m’en souviens très bien c’était un de mes premiers concerts avec MY DYIN BRIDE et on m’annonce qu’on allait ouvrir pour METALLICA, c’était terrorisant. Le simple fait d’être là c’était fabuleux. C’était un des plus grands moments de ma vie. J’étais dans les loges et d’un seul coup j’entends frapper à la porte, c’était James Hetfield et Kirk Hammet quand je les ai vu j’ai dis : « Oh mon Dieu ! » [Rires] Ils étaient venus voir si on était bien installés et jeter un œil sur nos guitares. Je crois que c’est le moment le plus stressant de ma vie, ils étaient là à me parler et moi j’étais tétanisée [Rires] C’était un peu surréaliste pour moi cette situation.
Aaron. Oui c’est très étrange de se retrouver à jouer devant des dizaines de milliers de fans déchaînés et être là sur une scène monumentale, je dois t’avouer qu’on était très tendus. On faisait notre set et à un moment je regarde sur le coté de la scène et je vois James les bras croisés en train de nous regarder. Ca m’a totalement déconcentré et du coup j’ai oublié une partie des paroles [Rires] C’était vraiment étrange pour nous.

MI. Quand on te voit sur scène on n’a pas l’impression de voir qu’un chanteur mais aussi un acteur, tu en es conscient ?
Aaron. Oui, parce que je ne peux pas me contenter uniquement de chanter. Je dois donner beaucoup plus, c’est vital pour moi, je veux vivre la chanson et me mettre dans la peau du personnage dont je parle. C’est souvent des types très noirs, très inquiétants. Quand je suis sur scène, je ferme mes yeux et je peux ressentir ces individus qui n’existent qu’à travers mes textes. Je suis quelqu’un d’autre totalement perdu dans mes mots et je ne vois plus ce qui se passe autour de moi, ni même le public. Je vis réellement l’histoire que je raconte comme si j’étais dans une autre dimension qui n’existe qu’à travers mes écrits. Si le titre est tragique, alors cela doit être identique lors de l’interprétation. Je pleure, je me roule par terre, ce n’est pas être acteur, je dirais plutôt que c’est un ressenti ! Je suis totalement possédé par le texte. J’adorerais être un chanteur de Metal classique mais je ne peux pas, c’est totalement impossible pour moi. C’est très fatigant car toute mon énergie est impliquée que ce soit mentalement ou physiquement, c’est pourquoi il m’est si difficile de tourner intensément. Je ne m’économise jamais. Je me dois de tout donner. C’est moi qui écris tous les textes, je pense que si c’était quelqu’un d’autre qui s’investissait dans l’écriture, je ne m’impliquerais pas autant. Mais ce que j’écris je le vis car cela vient directement de mon cœur et mon âme, le morceau fait partie intégrante de moi. Mon objectif est de retrouver le même état d’esprit en concert qu’au moment où j’ai créé le titre. Je passe dans un autre monde et quand, à la fin du show je sors de scène, je suis effondrée alors que les autres sont enthousiastes d’avoir donné un bon concert. Je n’apprécie pas du tout ce moment là mais je suis heureux et épanoui. Je ne suis pas très communicatif dans ces moments là, parfois entre les chansons je présente le titre suivant ou je dis merci. Mais je ne peux pas plaisanter, ni même parler et pourtant je devrais. Quand je vois le public hurler et chanter je devrais leurs dire quelques mots mais je ne peux pas, c’est une chose définitivement impossible pour moi. Tu ne me verras jamais faire des plans Rock’n’roll à la fin d’une chanson. Et je ne raconte pas non plus d’histoire drôle ! [Rires] Je suis emprisonné par le carcan des mots et aveuglé par tout ce qui se passe dans ma tête. Certaines personnes peuvent penser que je suis arrogant et que je les ignore mais cette pensée est bien loin de moi, je ne suis pas comme ça je suis tout simplement incapable de parler, je suis trop concentré et accaparé par mes idées. Mais je pense que maintenant, après toutes ces années, les fans ont compris pourquoi j’étais comme ça. Ils n’auront jamais d’attitude typiquement Metal de la part de Aaron, ils auront de l’émotion, du sentiment et c’est aussi une performance qui leur est offerte.

MI. Est-ce que c’est difficile de revenir à la réalité après une telle introspection ?
Aaron. Oui, c’est totalement épuisant. C’est un challenge émotionnel énorme à chaque fois pour moi. Il m’est impossible de rencontrer les fans peu de temps après un show. Il me faut au moins une heure pour redescendre et pouvoir parler. Il y a toujours quelqu’un qui leur dis qu’il faut attendre, non pas que je ne veuille pas les voir et discuter avec eux, mais il faut que je redevienne normal. Je sais qu’ils sont là pour me remercier et me dire combien ils ont aimés le concert, qu’il était pour eux extraordinaire. Mais il faut que mon adrénaline redescende car elle est tellement haute que je suis totalement bloqué par rapport au monde réel, à tel point que je ne peux plus réagir. Il me faut du temps pour pouvoir atterrir et me remettre dans le contexte de ce qui m’entoure et de la réalité et avoir une attitude humaine et normale. Si je rencontrais les gens après un show j’aurais une attitude terrifiante envers eux, je dois d’abord à tout prix me calmer avant de les rencontrer.

MI. Est-ce que tu t’inspires beaucoup de la littérature ?
Aaron. Oui, au tout début j’étais influencé par des textes en général très noirs. Je lisais John Milton, George Byron, Percy Shelley ou bien encore William Shakespeare bien sûr. C’était très intéressant, ce sont tous des auteurs anglais mais ils emploient des mots et des phrases difficile à lire même pour des gens du pays car c’est du vieil anglais. Ils emploient souvent des phrases très complexes et des expressions qui n’ont plus cours maintenant. Mais j’adore cela justement parce que c’est totalement différent des auteurs contemporains. Quand nous avons créé MY DYING BRIDE, l’idée de base c’était d’écrire des textes complètement différents On était très inspiré par le Death Metal, il y avait des codes, les paroles devaient être dures, noires et inquiétantes. Les sujets abordés étaient souvent le Diable ou des trucs un peu dingues. Moi je pensais qu’on pouvait faire mieux et apporter un plus à l’édifice sans se contenter de faire comme les autres. J’ai donc puisé un maximum dans cette littérature pour écrire et personne avant moi n’avait fait ça. C’était un bon départ et on commençait à voir ou nous avions envie d’aller. Puis, au fils des années, j ai laissé de coté ce style poétique typiquement Bristish et j’ai tenté de développer ma propre écriture. Je ne voulais pas copier mais trouver ma propre identité en tant qu’auteur. Maintenant je lis de tout et pas seulement de la poésie, mais aussi de la science fiction, de la comédie, des livres d’horreur. Ensuite, si je peux inclure une idée dans une chanson sans la copier, mais en m’inspirant et en créant quelque chose moi-même je n’hésite pas. Ce n’est pas du vol puisqu’au final ça vient de toi. Mais au jour d’aujourd’hui c’est très rare que je m’inspire d’une lecture quelle qu’elle soit. Tout vient de mon cerveau et j’essaye de me renouveler à chaque fois.

MI. Vous êtes très proche de vos fans, certains ont même participé à un de vos clips ?
Aaron. Oui, on a lancé un concours via notre site web, on voulait que nos fans nous proposent des idées et créent quelque chose pour les titres de Map Of All Our Failures. Le jeu c’était qu’ils devaient nous envoyer une photo ou autre qui leur paraissait être le plus représentatif de notre musique. On a reçu des centaines de dessins et photos plus noires les uns que les autres et très désespérés et ça a très bien fonctionné, on est contents du résultat. J’ai toujours pensé que si quelqu’un se sent dépressif et pas très bien, c’est très bon de pouvoir exorciser ces idées noires et négatives. Il faut expulser de sa tête toutes ces pensées en quelque sorte et la création qu’elle passe par le dessin, la photo ou autre chose est un excellent moyen pour s’en sortir. Si tu gardes en toi toutes ces idées sombre, tu déprimes de plus en plus. Je pense que MY DYING BRIDE, par ce genre d’initiatives, a permis à certains d’aller mieux. Ils savent que le vainqueur peut retrouver ce qu’il a fait sur une vidéo ou sur le prochain dvd et ils adorent ça. C’est très important pour nous d’avoir une relation positive et créatrice avec nos fans. J’adore l’art, la photographie, les lithographies et j’aime travailler avec ceux qui nous apprécient, je veux qu’ils aient un vrai rôle s’ils le désirent. Il faut une sorte d’interaction entre eux et nous. Je ne veux pas de concours ridicule comme faire une reprise d’un de nos morceaux et élire le meilleur. C’est bien de savoir ce qu’ils pensent de nous et quelle vision ils ont de MY DYING BRIDE parce que nous nous n’avons pas ce recul, nous sommes trop investis et c’est à eux de nous dire comment ils perçoivent tout ça.

MI. Que signifie le titre A Map Of All Our Failure ?
Aaron. C’est juste un bon titre qui représente au mieux notre musique. J’aime les mots et j’adore aussi parfois en rajouter un peu, trouver quelque chose qui sonne bien. Je veux écrire d’une manière poétique et romantique avec une vision désespérée, pour cela il faut trouver les mots justes et imagés. Je voulais trouver un titre intéressant et expressif. Après avoir écouté tous les titres on a réalisé à quel point cet opus était sombre et lourd. Map Of All Our Failure correspond bien à cet univers malsain et angoissant. J’avais plusieurs idées, j’ai donc décidé de les lire aux autres et quand je suis arrivé sur cette phrase, ils ont tout de suite adhérés. Ce n’est pas simple car, en quelques mots, il faut attiser leur curiosité et faire en sorte qu’ils s’intéressent à ce qu’il y a derrière l’image qui est développée sur la pochette.

MI. Merci beaucoup pour cette interview...
Aaron. Merci à toi.
Léna. Merci beaucoup.


Ajouté :  Lundi 03 Décembre 2012
Intervieweur :  The Veteran Outlaw
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