Qu’on le veuille ou non, le nom de IHSAHN sera associé à EMPEROR pour la postérité. Ce compositeur et artiste de talent, Vegard Sverre Teitan de son vrai nom, aura écrit quelques unes de plus belles pages du Black Metal norvégien sous la plume d’empereur du royaume du Black Metal nordique des années 90. Mais on n’insistera pas plus à ce sujet. Désormais évoluant en solo, cet homme à tout faire, tour à tour chanteur, guitariste, claviériste des défunts d’EMPEROR a plus d’un tour dans son sac. Cette figure emblématique s’est notamment illustré dans son projet PECCATUM, magma symphonico-gothique et progressif avant de revenir à des canons plus accessibles avec son projet solo IHSAHN. Suivant les traces de son premier opus The Adversary en 2006, cette seconde mouture renforce l’expérience qu’Ihsahn a gagnée en tant qu’artiste solo, à savoir un Black racé et épique fort influé par la Grande Musique, recourant de ce fait à des arrangements grandis par les claviers, en consolidant l’aspect solennel et auguste des compositions de ce second album studio angL, enregistré de surcroit dans son studio personnel !
En le comparant à son prédécesseur, on remarque une certaine progression, c’est à dire qu’ angL résonne à la fois plus Heavy tout en conservant cette part de subtilité si chère à Ihsahn. Accompagné par Asgeir Mickelson (BORKNAGAR, SPIRAL ARCHITECT) derrière les fûts et cymbales et de son compère dans HARDINGROCK Lars Norberg à la cinq cordes, le norvégien s’est de nouveau bien entouré pour accoucher de neuf titres puissamment épiques et extrêmes et d’autres plages sujettes à de douces rêveries atmosphériques. Ces compositions séduisantes, aux textures soignées et léchées en font en plus un album vraiment accessible, captivant et intense. Associé à des textes traitant de thèmes personnels avec en guise de fil conducteur une thématique issue des pensées du philosophe allemand Nietzsche, l’intensité et la richesse des arrangements pourra ravir et séduire les adeptes de la première heure d’EMPEROR et leur voir également s’offrir de nouveaux partisans.
Cette exploration profonde des styles musicaux se traduit par des refrains enchanteurs, où l’on pourra notamment remarquer la présence au chant de Mikael Akerfeldt (OPETH) sur le titre «Unhealer», admirable et classieux. Poussant la sophistication à son paroxysme, chaque morceau possède sa propre patte et identité. Pénétrable, unique, tout piste est une invitation vers un monde sombre et rigoureux mais où les notes calmes nous laissent entrevoir une lueur d’espoir palpable. Bien amenés, les neuf pistes de angL peuvent dans le même temps offrir des passages pesants et chargés grâce au maniement sans faille de riffs de guitares finement ciselés, tout en laissant une place à des mouvements plus éthérés et vaporeux. A cela on voit la qualité d’écriture de Ihsahn, que ce soit à travers «Misanthrope», «Scarab» ou «Alchemist», des exemples de plages illustrant les multiples facettes du norvégien.
Le compositeur fait montre d’un talent et d’un style inimitable et personnel. En définitive, Ihsahn se prononce maintenant Solo. Exit la période EMPEROR, si Ihsahn prend ici et là des réflexes d’écritures liés à son passé, celui s’inscrit dorénavant dans une entité déliée de toutes résurgences passéistes en faisant la part belle à ses obsessions personnelles traduites avec gout sur cet album.
Une œuvre de tempérament à appréhender avec douceur et calme pour en mesurer toute la substance et la vigueur intrinsèque.