BAD ACID TRIP (usa) - Worship of Fear (2015)
Label : Serjical Strike Records
Sortie du Scud : 2015
Pays : Etats-Unis
Genre : Crust Grind
Type : Album
Playtime : 21 Titres - 28 Mins
"On vient du nord d'Hollywood salope"...
Ainsi s'introduisent les trois membres de BAD ACID TRIP, ce qui est une façon plutôt péremptoire de se présenter, mais qui correspond bien à leur état d'esprit...
Actifs depuis le début des années 2000, présents depuis l'explosion de la scène Powerviolence locale, les trois olibrius ne font pas de quartier, ou plutôt si, et plutôt épais.
Après trois longue durée assez espacés dans le temps (For The Weird By The Weird en 1999, Lynch The Weirdo en 2004 et Humanly Possible en 2009), entrecoupés de EPs, de splits, en gros le chemin habituel de tout groupe de Grind qui se respecte, les voici de retour pour un nouveau LP, qui n'a pas grand chose à envier à ses prédécesseur en termes de brutalité, de fun, et d'intensité.
Signés sur le label de Serj "SOAD" Tankian, Serjical Strike Records, et autrefois produits par Daron "SOAD" Malakian (Lynch The Weirdo, en 2004 donc), les californiens n'ont donc jamais eu à se plaindre d'un manque de moyens ou de soutien, cela dit, leur musique se suffit à elle même pour attirer l'attention.
Les BAD ACID TRIP se revendiquent des précurseurs du Grind, autrement dit la scène UK des années 80 et son homologue US du début des années 90, et je dois reconnaître que jusqu'ici, leur hommage était fort bien rendu. Pour faire simple et ne pas se perdre dans les dédales de l'analyse, je constate que Worship of Fear ne fera pas exception à la règle.<br<
Vous vous demandez sans doute ce qui a pu séduire les deux leaders de SYSTEM OF A DOWN à ce point qu'ils décident de chapeauter la carrière d'un groupe de Grind lambda ?
Simple, écoutez leur musique et vous comprendrez de suite.
Le Grind de BAD ACID TRIP (Dirk Rogers – Chant ; Caleb Schneider - Bass, chœurs ; Carlos Neri - batterie) n'est pas du genre bas du front et linéaire. Il privilégie le chaos brut, mais surtout, les constructions heurtées qui télescopent des plans à vitesse grand V, les imbriquant avec un brio indéniable. On à même parfois le sentiment que leur bordel ambiant emprunte au Free Jazz ses errances labyrinthiques tant l'intensité et la complexité des structures sont de mise.
Niveau rythmique, c'est un véritable casse tête. Le tempo (épileptique la plupart du temps) varie sans cesse, et Carlos ne se gêne pas pour se faire plaisir, et alterne les fracassements du Powerviolence avec les blasts qui cassent quand ça ne passe pas. Suivi de près par une basse largement audible qui se plaît à naviguer le long de son manche, cette section est le véritable pivot du groupe, et le fait planer à des hauteurs vertigineuses avant de tenter le crash en piqué qui relève du nez au dernier moment. Mais en sus de ce spectacle de haut vol, Worship of Fear peut aussi compter sur une collection impressionnante de riffs qui ne se contentent pas de taquiner le mi en permanence, mais qui développent de jolis motifs pas forcément inhérents au Grind. Et dans un souci d'exhaustivité totale, abordons le cas du chant/des chants qui frappent tous azimuts, sans jamais reprendre leur souffle, oscillant entre des graves furibards et des aigus revanchards.
Vous n'y comprenez pas grand-chose ? C'est normal, la chose est difficilement descriptible. Je vous disais tout à l'heure qu'il n'était pas si étrange que ça que Serj et Daron se soient intéressés de près à ce groupe atypique, mais lorsque vous poserez vos esgourdes fragiles sur l'objet en question, vous aurez plus ou moins la réponse.
Il suffit - sans l'avoir entendu - d'imaginer n'importe quel LP des débuts de SYSTEM, pour réaliser que Worship Of Fear en est plus ou moins une version sous acide, complètement hystérique et sans garde fou.
Même propension à prendre une idée de base et à l'étirer dans tous les sens avant de la lâcher, de laisser la rythmique s'épanouir sans chercher à la brider, même furie vocale sans le lyrisme exacerbé, et même désir de caser le plus de plans possibles dans un contexte limité.
Le Grind de BAD ACID TRIP est euphorisant, et il est à vrai dire à l'image du nom de ses concepteurs. C'est un délire auditif sans barrière, sans limites, qui enchaîne sans faiblir les attaques avec un coulé sidérant de fluidité, sans jamais baisser la garde ni son intensité.
Worship of Fear est de plus constellé de petites idées d'arrangements incongrus, qui enrichissent la texture sonore énorme, mais ne vous leurrez pas, ses deux vecteurs principaux restent la puissance et la liberté de ton.
Lorsque la purée est balancée à la hâte, ça fait très mal ("Drug The People / Fear The Young", "The Slow Road", "Politiphile"), et lorsque le trio s'épanche un peu plus, les imbrications donnent presque mal au crâne ("No Me Without The Eye", orgie sonore, "Silk Lined Coffin" partouze démoniaque), ce qui ne les empêche pas de tenter la blague équilibriste format ultra court ("Showa Series Revenge"), ou de se complaire dans un Grind de tradition agrémenté de quelques fantaisies débridées ("Parental Guidence", fourre tout digne d'un générique soap lysergique, qui cite le early NAPALM dans le texte).
Je ne vois pas comment retranscrire par les mots ce que cette musique tente de dire par des notes. A la rigueur, vous pourriez regarder le monde la tête en bas en vous passant un vieil AGATHOCLES à côté du local de répète de THE KILL, et ça pourrait vous donner une idée des intentions des trois américains. Ils sont Grind, à n'en point douter, mais piquent des trucs au Jazz, au Fastcore, au Néo version SOAD, sans les influences orientales, et finissent par faire ce qu'ils veulent, en oubliant qu'un milieu ils ont une pédale de frein pour ralentir un peu le délire.
Mais si le Grind sous acide ça donne ça, j'achète tout de suite. Worship of Fear garantit plus d'hallucinations que n'importe quelle drogue de synthèse, et rend aussi barge, mais de façon plus naturelle. C'est ça qu'on respire sur les hauteurs d'Hollywood ?
Pas étonnant qu'ils soient tous tarés dans le coin...
Ajouté : Lundi 15 Février 2016 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Bad Acid Trip Website Hits: 6712
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