Ah l'Espagne, son climat, ses paysages, son rythme de vie, ses tapas et ses longs mercredis, le franquisme...
Mais je m'égare...
L'Espagne en assez des clichés. Rongés par la crise, les ménages ibères font la gueule, et il y a de quoi... Dictature de la BCI, doigt vengeur d'Angela, ça suffit.
La rigueur, ça va bien cinq minutes. Quoique. Ce climat austère développe chez certains des velléités contestataires et libertaires assez fertiles.
Prenez la scène Punk Hardcore par exemple. Cette rigidité politique, ça lui donne des ailes. J'en ai abondamment parlé lors de précédentes chroniques, donc inutile d'y revenir.
En Espagne, si par contre. Parce que c'est de là bas que viennent les surprenants JON MANTECA'S ARMY.

Jon Manteca ? On l'a connu à la fin des années 80, pendant des manifestations estudiantines. Il dézinguait du mobilier urbain, et le tout fut filmé pour la postérité. Le monsieur au parcours chaotique à fait de la tôle, mais demeure suffisamment emblématique pour qu'un groupe réponde de son nom. Et force est d'admettre que dans le cas de JON MANTECA'S ARMY, l'exemple est bien choisi.
Cette démo est la première production de ce jeune groupe. Mais en un seul effort, ils viennent de placer la barre très haute.
Cette cassette possède un charme indéniable, une puissance redoutable, et saura flatter votre nostalgie de coreux par des emprunts multiples qu'ils revendiquent complètement. D'ailleurs, les quatre reprises finales en témoignent, les gus ont de la culture, leurs propres héros, et ne s'en cachent pas.

Soyons bref, et clair. Si le Skatecore des années 80 est votre tasse de thé, ou votre gobelet de soda préféré, vous avez frappé à la bonne porte, déroulez la bande. De la jaquette aux couleurs passées aux sonorités de guitare, tout semble sorti d'une réunion de skaters bien teigneux de Venice, CA, genre 83/84. Outre les compositions en elles mêmes, soignées mais spontanées, les espagnols ont pris grand soin de distiller à intervalles réguliers de chouettes intro Surf teintées d'écho et de trémolos, qui jonchent leur démo comme autant de cartes postales ensoleillées.
Le reste ? Du bon, du très bon, du quasi parfait, enrobé dans une production qui elle aussi rappelle les grandes heures de GANG GREEN, des premiers SUICIDAL ou même des STUPIDS. Je vous l'avais dit, leur calendrier est resté bloqué dans les années 80... A propos de GANG GREEN justement, une version tout à fait fidèle de "Kill A Commie" nous est offerte sur un plateau, aussi véloce et urgente que l'originale.
Autour traînent d'ailleurs trois reprises de JFA (JODIE FOSTER'S ARMY, groupe Californien/Texan du début des 80's, supporté par Trasher magazine...), qui ne sont certainement pas étrangères à la vocation core contemporaine des espagnols...
Les JFA étaient spécialisés dans les 7'' et les EP, et on considérablement influencé les JON MANTECA'S ARMY, et pas seulement pour le choix du patronyme. Même Skatecore furieux et ludique, mêmes guitares sobres mais mordantes, et même rythmique fast & furious.
La boucle est donc bouclée, sympa non ?

Alors, sans conteste, je peux affirmer que cette démo est LA découverte de ce premier semestre, dans un style plus tellement au goût du jour, mais tellement frais... Quel plaisir de réentendre cette musique qui a fait les beaux jours des skate parks il y a trente ans, bandana vissé sur la tête et air blasé de rigueur.
Prêts pour une virée sur une planche, la tronche enfoncée sur les épaules ?

Allez, c'est parti, direction Espana !!!