Aujourd’hui les enfants, nous allons parler d’un sujet qui fascine autant qu’il divise. Le « supergroup ». Collaboration fructueuse ou coup marketing foiré, le supergroup a toujours eu les qualités de ses défauts. Si les projets comme CHICKENFOOT ou ADRENALINE MOB ne nous intéressent pas, il en sera très différent des LOCK-UP, OV HELL, CAVALERA CONSPIRACY et autres BLOODBATH. Le Death Metal polonais, réputé depuis toujours pour sa férocité, peut désormais lui-aussi prétendre posséder son supergroup avec MASACHIST. Et cette image leur colle déjà à la peau, après seulement sept années d’existence et deux petits albums au compteur. Jugez plutôt. Au chant, l’ami Pig (d’ANAL STENCH et ex-DECAPITATED). Aux guitares, Aro de TORQUEMADA et Thrufel, un ex de YATTERING et d’AZARATH. A la basse, l’immense Heinrich de VESANIA et lui aussi ex-DECAPITATED. Et pour finir en beauté, derrière les futs trône un certain Daray, frappeur chez VESANIA, ex-batteur de VADER et ex-batteur live de DIMMU BORGIR. Oui monsieur, rien que ça ! Avec un line-up pareil, il convient de prévoir de grosses réserves de vaseline.

Scorned, second album de la horde qui succède au Death March Fury de 2009 poussera le bouchon encore plus loin. Il y a trois ans, on découvrait avec stupeur une formation malicieuse, hargneuse et ma foi, exagérément brutale. Le Death polonais dans toute sa splendeur, que ce soit au niveau de la production comme de l’exécution. On y trouvait jadis ce vice typique qui fait encore aujourd’hui écho aux premiers VADER ou DECAPITATED. Mais MASACHIST n’est plus ce groupe débutant qui peinait à canaliser son trop-plein d’envie. Il y a dans les arrangements de ce disque quelque chose d’insidieux, de plus complexe. C’était déjà très sombre il y a trois ans, ça l’est encore plus ici. Assez étrangement, les Polonais réussissent l’audacieux pari de ne pas faire un Death March Fury version 2.0. C’était là ma principale crainte, puisqu’on sait qu’il faut une bonne dose de créativité pour ne pas faire se ressembler deux albums de Death. La voix de Pig, pénétrante, très gutturale est déjà un élément clé, puisqu’elle nous entraine nous, auditeurs, par le bas tout en tirant le groupe vers le haut. Musicalement, c’est évidement un mélange d’ouragan, de déluge, d’apocalypse, d’explosions et de corps calcinés. Une vague de Death Metal fracasse nos oreilles dans un tintamarre assourdissant. Certaines compositions sont très habiles pour nous rendre hystérique. Ainsi, les cadences frénétiques de « Liberation », ses atmosphères de guerre civile et les sirènes qui envahissent nos pensées nous feront un sacré effet. Idem pour « Drilling The Nerves » mais dans un autre genre. Carré, écrasant, presque mid-tempo, ce morceau introduit Scorned avec fracas. La paire Aro-Thrufel prend un malin plaisir à écrire des riffs torturés, alambiqués, ponctués de quelques solos plutôt sophistiqués et à varier les rythmes sans discontinuer. Homogène dans son ensemble, Scorned évite le piège tendu par Death March Fury et franchit avec panache un nouveau palier. Il est clair que cet opus est une nette progression pour MASACHIST qui se prend même au jeu de quelques arrangements bien sentis, comme des chœurs sépulcraux qui donnent une teinte presque sacro-sainte à l’affaire. Les catacombes lugubres d’une majestueuse cathédrale, tel serait le décor idéal pour s’enfiler Scorned et expulser toute sa haine.

Si cette œuvre revêt parfois le costume d’exutoire, elle n’en demeure pas moins solidement construite. Ce n’est pas du Death improvisé et encore moins un grotesque défouloir pour auditeur cherchant à se libérer de ses pulsions. Scorned vous happe dans son monde apocalyptique, pavé de feu et de sang. Vous croyez qu’il va vous aider à extérioriser mais c’est tout l’inverse. Il se nourrit de vos frustrations. Et c’est en ça que réside son génie. Supergroup ou pas supergroup.