MACHINE HEAD (usa) - Burn My Eyes (1994)
Label : Roadrunner Records
Sortie du Scud : 9 août 1994
Pays : Etats-Unis
Genre : Thrash Metal
Type : Album
Playtime : 11 Titres - 56 Mins
Depuis quelques années, c’est vrai, nos étés sont pourris. Temps de chiotte en juillet, mi beau en août, de quoi dégoûter tous les accros du camping et autres fanatiques du Mobil home, french made. Mais dans les années 90, l’affaire était tout autre. La météo était plus clémente certes, mais il fallait aussi chercher la chaleur du côté de quelques sorties bien senties en décibels qui avaient de quoi réchauffer bien des cœurs.
Ok, Rob Flynn, en 1994, ça ne voulait pas dire grand-chose. Sauf pour certains Thrash addicts bien informés qui avaient déjà vu sa signature quelque part…
FORBIDDEN ? VIO-LENCE ?
Mais oui… Bien sur !
Mais las de jouer les seconds rôles au sein de ces combos respectifs, le beau Rob prit un jour la poudre d’escampette pour composer sa propre musique, avec son pote d’enfance, un certain Adam Duce, joli bébé viking pur jus et pas content lui non plus.
Pour se faire les dents, et avec un financement de 800 dollars, les gus enregistrent avec leurs compères Logan Mader et Tony Costanza une démo qui ne manqua pas d’attirer l’attention d’un gros label indépendant qui avait déjà pas mal de gloires à son catalogue (et pour lequel ils bossent toujours aujourd’hui…), Roadrunner…
Et hop, charmés par la brutalité qui se dégageait de ces quelques titres, les patrons les envoient en studio, direction Berkeley en Californie, avec un gourou du son, le Spector de la haine, M. Richardson Colin.
Et en août 1994, le nouveau né surgit enfin du fond du bac des nouveautés, gentiment baptisé Burn My Eyes…
Et là, la claque. Pas la gentille calotte sur la joue, non, la grosse baigne, le pain dans ta face. Onze titres concentrés de rage pure, de gravité intrinsèque. Et au petit jeu de la comparaison, aussi fan de leur musique sois je, même Phil et sa bande de panthères noires pouvaient aller se rhabiller en chialant. On avait jamais entendu ça, on avait jamais subit une telle déflagration sonore depuis le Beneath The Remains de SEPULTURA, ou le séminal et éponyme premier RAGE AGAINST THE MACHINE. Le parallèle n’est pas si idiot d’ailleurs. Même façon chez Zach et Rob de hurler leurs revendications, leur dégoût, même implication sociale et politique à divers degrés (et réhabilitons d’ailleurs la portée d’un morceau aussi indispensable que « Block » par la même…), même science du riff qui tue, à la différence que Rob et Logan allaient s’abreuver du côté de l’ange noir Iommi, et non le Page diabolique, et rythmique à géométrie variable, la puissance comme vecteur commun.
Ajoutez à ça un son si énorme que mon casque en défaille à chaque fois, et onze morceaux si forts et intelligents qu’on se demandait comment personne n’avait pu tenter ça avant, et vous avez l’album massue des années 90.
Car entre la démo et l’album, exit Costanza et hello Chris Kontos, aussi impressionnant physiquement que techniquement. Je connais les supporters de Dave McClain (dont je faisais partie du temps de SACRED REICH et que je vénère encore aujourd’hui), mais il faut admettre que la frappe de Kontos est réellement torride sur cet album, et il est évident que le jeu racé et fin de Dave, même ad hoc depuis son entrée dans la confrérie, aurait adouci le tout, et lui aurait donné un côté disons… Trop propre.
Pour vous en convaincre, écoutez au choix l’intro éclair de « Davidian », tout en tonnerre, ou même le final épileptique de « A Nation On Fire », durant lequel Chris torture ses fûts et sa double jusqu’au point de saturation.
Sceptiques ? Vous me trouvez trop dithyrambique ?
Revenons un instant sur l’ouverture traumatisante de Burn My Eyes je vous prie.
« Davidian ». Diatribe définitive à l’encontre de David Koresh et ses semblables, ou pamphlet individualiste agnostique ? Les deux ? Possible…En tout cas, morceau ultime qui fera enrager Sebastian Bach, ne serait ce que pour ce vers magnifique en forme de statement, « Let freedom ring with a shotgun blast ». Et c’est pertinent, car c’est vraiment l’effet que nous fera cette chanson d’ouverture, une balle projetée dans l’espace qui finit par nous percer le crâne.
Alors se prendre une bastos, c’est une chose. On peut s’en remettre, si on nous laisse le temps de souffler. Mais c’était sans compter sur les velléités d’étouffement de Rob et sa bande. Car dès « Old », le doute n’est plus permis. Nous n’avions pas affaire à un sniper, mais bien à un tir de barrage ininterrompu. Avec ces fameuses harmoniques en guise de trademark, le groupe embraye sur un phrasé quasi rap avec l’intenable « A Thousand Lies » (encore un glissement vers RATM, révérence oblige…), et en moins d’un quart d’heure, le massacre est presque déjà à son terme, les derniers survivants se terrant au plus profond de leur peur…On pourrait gloser des heures sur ces groupes qui nous ont mis à terre en trois petits morceaux. Le SAB’, les STOOGES, les PISTOLS, PEARL JAM, NIRVANA, et j’en oublie des dizaines. Une caste d’exception, un clan pour l’élite.
MACHINE HEAD en faisait à présent partie.
Mais tout n’était pas que DCA sur cet album. On n’emprunte pas le titre d’un des plus grands albums de PURPLE pour rien. Alors de la finesse. Un peu.
Comme sur le poisseux « Death Church », aussi glauque qu’une incantation de Ian Curtis rejouée par Peter Steele. Ou sur les trois quarts de « None But My Own » et « A Nation On Fire ». Du lourd de chez lourd, de l’orfèvrerie de casse automobile.
Néo Metal ? Néo Thrash ?
Mes burnes.
Heavy, à en crever.
« Mon cœur ne bat que pour moi ».
Tu l’as dit Rob, et le notre en a fait des embardées sauvages. Le genre de truc qui rend vert de rage 99% de la concurrence. Surtout à l’époque ou le « Grunge » faisait son dernier tour de piste.
Fort, mais jamais too much. La classe. Qu’importe si les premières dissensions entre les deux gratteux se font sentir, qu’importe si Kontos va bientôt larguer les amarres. Car à ce moment là, ils étaient invincibles. On ne devient pas la vente la plus rapide d’un premier album pour un label pour rien.
Oh, bien sur il y avait déjà eu du violent et concis avant (Reign In Blood en reste le plus fameux exemple…), il y avait eu du lourd et vénéneux (CARNIVORE, PANTERA, etc…), mais rarement les deux en même temps, sur cette durée, et avec cet équilibre.
Et oser finir une pareille litanie sur un quasi instrumental glauque et urbain (« Real Eyes, Realize, Real Lies »), et une boucherie syncopée qui aurait donné la courante à une horde de démons (« Block », au passage mosh ridiculisant dix ans d’ANTHRAX, pour le moins…), c’est de l’assurance crasse, celle de ceux qui ont trop ramé, et qui ne veulent pas crever la bouche ouverte.
Burn My Eyes. Le second vrai choc méchant des 90’s, décade si décriée. MACHINE HEAD continuera, avec une valse de guitaristes, fera d’autres bons albums, parfois presque aussi bons (The Blackening), parfois franchement ratés (Supercharger), mais sera toujours honnête.
« The more intense is ignorance, the more intense is the pain ». Je ne vois guère qu’un Joe Strummer pour pondre des slogans avec autant d’aisance…
Ajouté : Jeudi 23 Février 2012 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Machine Head Website Hits: 9640
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