ENTER SHIKARI (uk) - Common Dreads (2009)
Label : Ambush Reality
Sortie du Scud : 15 juin 2009
Pays : Angleterre
Genre : Electrocore
Type : Album
Playtime : 15 Titres - 50 Mins
A la veille de la sortie de leur troisième album studio, je pense qu’il était tout à fait légitime de revenir momentanément sur le phénomène ENTER SHIKARI. Ces anglais font couler beaucoup d’encre depuis leur arrivée dans la sphère Metal en 1999 sous le nom d’HYBRYD et encore plus depuis que leur style très particulier s’est affirmé comme une émulsion instable entre Post-Hardcore et musiques électroniques en tous genres. Un cocktail détonnant par forcément du goût de tout le monde qui intervient en plein milieu d’un cycle de renouvellement qui laisse les vieux de la vieille sceptiques, à juste raison. L’éclosion trop précoce d’ASKING ALEXANDRIA et autres BREATHE CAROLINA a forcément de quoi laisser sur le carreau ceux qui tapaient du pied sur le « Rock You Like A Hurricane » des SCORPIONS. Ceux-là peuvent dès à présent détourner leur attention de cette chronique, car ENTER SHIKARI n’est assurément pas fait pour eux.
Pour être tout à fait franc, j’avais à peine écouté quelques bribes de cet album avant de me lancer dans son analyse. Et Take To The Skies (2007), leur précédent effort, est carrément passé à la trappe. Alors même si je sais d’ors et déjà que je suis susceptible de nourrir quelques affinités avec eux, mieux vaut se laisser aller à la surprise totale. A l’endroit exact où les groupes précités se sont décidés sur leur orientation musicale, ENTER SHIKARI laisse planer une épaisse purée de pois sur ses envies. Common Dreads n’établit pas de certitudes absolues, trop tendre pour être rangé au rayon Metal mais trop violent et humain pour résister à l’étiquette Electro. Il est une alchimie sensationnelle entre les deux, deux mains dont les contours sont dessinés pour s’épouser. Une pléiade d’univers s’invite sur ce bœuf qui rend dans ses formes un large hommage à la musique électronique. Claviers et synthés sont omniprésents et omnipotents, à l’instar de samples et atmosphères complexes, comme cette déclinaison de l’expression « we must unite » dans toutes les langues sur l’intro. « On doit s’unir », c’est d’ailleurs le thème récurrent de cet album, qui aborde également un discours politisé. L’arrivée conjointe de « Solidarity » et « Step Up » est le fait marquant de ces premières minutes. Ces deux chansons sont assurément les plus violentes qu’on pourra trouver, avec des riffs sourds coupés par des claviers en transe et une palette vocale assez riche. L’occasion de souligner la présence d’une sorte de chorale mixte très organique sur la fin de « Solidarity ». Un moment fort en intensité, assurément ! ENTER SHIKARI trompe son monde en introduisant Common Dreads de façon délibérément puissante, puisque la suite sera un déclenchement d’ambiances légères, teintées de synthétiseurs tout en strass et paillettes qui lorgnent vers des rythmiques Drum N’ Bass, des motifs Dubsteb qui aboutissent sur d’excellentes créations comme le couple « Havoc A » et « Havoc B ». On note aussi des flûtes jazzys très prenantes sur « The Jester » ou des enchevêtrements torturés de claviers sur lesquels Skrillex n’aurait pas craché. Cet album suit une ligne directrice et s’y tient. Une grande pureté se dégage de la voix nasillarde typiquement anglaise de « Rou » Reynolds qui fait uniquement dans le chant clair-hurlé. Pas de growls, pas de pig-squeals mais une délicatesse toute particulière qui change un peu des timbres d’outre-tombe. Common Dreads est un récit de voyage reposant, varié et inhabituel. Je suis persuadé qu’il pourrait plaire aux plus réticents, puisqu’il a bien du mal à rentrer dans le rang, préférant s’éparpiller entre le Post-Hardcore, le Rock « so british », la quiétude du New-Age, le crépitement de la Trance et les tempos « stroboscopés » de l’Electro-Dancefloor, le tout marié un jour pluvieux.
Intéressante expérience que voilà. ENTER SHIKARI mérite bien sa définition d’OVNI musical. Les anglais ont toujours eu un don pour les créations bourrées d’artifices mais tellement sincères qu’on en oublierait presque ce défaut de conception. Sans se mentir, Common Dreads est un très bel album qui vous fera voyager dans des univers singuliers, tantôt ténébreux comme un arbre mort, tantôt colorés comme une salade de fruits. Les émotions s’entrechoquent et ce, peu importe l’étiquette musicale. Mariage pluvieux, mariage heureux.
Ajouté : Mercredi 15 Février 2012 Chroniqueur : Stef. Score : Lien en relation: Enter Shikari Website Hits: 10260
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