EUFOBIA (bg) - Cup Of Mud (2011)
Label : Wizard Ltd
Sortie du Scud : 11 juin 2011
Pays : Bulgarie
Genre : Death & Roll
Type : Album
Playtime : 10 Titres - 32 Mins
Peut-on avoir peur de ce qui est bon ? Autrement dit, dois-je éprouver une certaine crainte à écouter un bon album, à voir un bon film ou à lire un bon livre ? C’est un concept intéressant qui mériterait bien des heures enfiévrées de débats, mais pas aujourd’hui. Parce qu’aujourd’hui, c’est le moment de parler d’EUFOBIA, un nom tiré du grec ancien et qui signifie littéralement « peur du bon », d’où cette introduction hautement spirituelle. Et dans le genre détail croustillant, le meilleur reste à venir puisque nos amis nous arrivent tout droit de… Sofia ! Euh… non, pas Sofia la pauvre partouzée… Sofia en Bulgarie. Et ça, c’est pas très commun ! Pour preuve, à l’instinct, il n’y a qu’un groupe bulgare qui me vienne à l’esprit, c’est EPIZOD (et encore, il doit y’en avoir de moins ringards). EUFOBIA attire donc les oreilles curieuses de par sa provenance. De par son joli CV aussi, qui nous assure qu’ils ont fait les plus gros festivals Metal des Balkans et que des groupes prestigieux tels que NEGURA BUNGET ou DARK TRANQUILLITY ont eu le plaisir de partager la scène avec eux. C’est bien évidement conscient de la richesse culturelle énorme que peut nous apporter ces pays en matière de Metal que j’aborde l’intriguant Cup Of Mud, avec l’exemple bien précis de la Pologne triomphante en tête.
Alors pour commencer, il faut savoir que ce second album est en fait la réédition d’une démo du même nom parue en 2005, agrémenté de deux nouveaux titres. Mais ça, la bio ne le dit pas. « Violin » fait son boulot d’ouverture d’une façon très slave, puisqu’on y entend des percussions quasi-ritualistes et des cordes traditionnelles sur des vocaux incantatoires. Le côté exotique est sympa deux secondes, mais pas passionnant non plus. C’est « Maligna » qui se charge de lâcher les chevaux et nous met face à un Death Metal extrêmement travaillé, presque expérimental. La batterie accélère sans vraiment prévenir, et entraîne avec elle des guitares qui peinent à suivre la cadence, préférant se concentrer sur des notes libres, limite Djent. Le gros de ce disque, c’est mon homonyme Steff, le bassiste. Ce garçon exprime un incroyable potentiel en tripotant ses cordes, ainsi qu’il propose de nombreuses influences jazzys qui rendent les compositions plus fines, plus matures, et ça s’entend clairement sur « Cruel Child ». Les bulgares mélangent avec une certaine habilité les ingrédients d’un Death Metal savoureux, qui peut être sournois et s’accoquiner avec le Noise Rock et le groove terrible des grands noms du Hard Rock. Sur le papier, pareille description mettrait l’eau à la bouche de n’importe qui. En pratique, tout n’est pas si rose. Passée la relative émotion que suscite leur parcours et leurs ambitions, il faut reconnaître que leur musique complexe aura de quoi surprendre les moins ouverts d’entre nous. Une certaine platitude s’installe une fois l’effet de surprise dissipé. La faute sans doute à l’amoncellement de riffs globalement creux, noyés sous l’omnipotence de la basse qui finit par filer le bourdon et enrobés dans un mixage très particulier, qui place guitare et basse sur la même ligne. Sans doute aussi la faute à Niki, le principal chanteur dont les cris ne font pas sensation et aux backings délivrés par l’ami Steff qui rote, plus qu’il ne chante. Je caricature, mais son timbre sans grande personnalité ne tire pas les émotions vers le haut et ne restera surement pas dans les annales. On a l’impression qu’EUFOBIA, en voulant trop bien faire, peine à mettre de l’ordre dans ses idées. C’est un mélange bizarroïde de morceaux attachants et de morceaux fades, qui aboutit à un album captivant d’opacité. On n’arrive pas vraiment à lire entre les lignes, probablement car c’est une musique qu’on entend rarement et dont on ne connaît pas vraiment le but ni les intentions. On se laisse transporter, du moins on essaye. Avec succès par moments, mais sans réelle transcendance.
C’est donc ça, la peur du bon. Riches d’un potentiel flagrant, les Bulgares ont eu peur d’être trop bons, alors ils ont bâclé par ci, raturé par là, pour ne pas s’attirer trop de soupçons. Cup Of Mud en demeure un album délicat à appréhender, délicat à décrypter et encore plus à affectionner. Derrière cette musique froide, malhabile, mécanique et hésitante se planque justement la richesse culturelle dont je parlais plus haut. Actuellement, je pense qu’aucun groupe d’Europe occidentale ne serait capable de jouer ainsi. Et c’est peut être ça qui fait leur seul et unique charme.
Ajouté : Mercredi 09 Novembre 2011 Chroniqueur : Stef. Score : Lien en relation: Eufobia Website Hits: 9002
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