Après From Them, Though Us, To You et Attics To Eden, MADINA LAKE amorce le virage difficile du troisième album avec ce World War III, au titre un poil plus agressif et revendicateur. Le premier effort avait séduit, le second confirmé les attentes, et il faut admettre que cette troisième offrande, pour reprendre une formule consacrée et un brin éculée, sera celle de la maturité.
S’étant illustrés jusqu’à présent dans un style efficace combinant des riffs bien plombés, une voix juvénile et des mélodies imparables, les membres de MADINA LAKE avaient surtout joué la carte de l’efficacité, sans toujours chercher le petit plus qui aurait pu dynamiser leur musique, ce qui était le plus grand reproche que je pouvais leur faire.
Mais le temps et son cortège d’épreuves à fait son travail, et ce World War III est en tous points supérieurs à ses deux aînés, certainement à cause des épreuves qu’à du traverser le groupe, et surtout Matthew, bassiste, qui a subi de graves blessures en tentant de protéger une femme en train de se faire battre. Cet acte héroïque qui l’honore l’a laissé avec un paquet de séquelles à soigner d’urgence, et notamment une ablation d’un tiers de son crâne pour laisser le cerveau respirer. Des concerts de soutien furent donnés, par les SMASHING PUMPKINS, et le bassiste pu rejoindre le reste du groupe en studio.
Alors bien sur, les éléments de base du combo sont toujours là, et cette faculté à composer des hymnes teenagers tout en les agrémentant d’une grosse touche de Métal n’a pas disparu bien au contraire. Mais MADINA LAKE a compris qu’il était nécessaire d’éviter la facilité et de faire plus de recherche au niveau de la composition pour gommer toute trace d’évidence systématique.
Un peu LINKIN PARK dans l’esprit, avec un côté synthétique plus prononcé, et une voix plus claire, les nouveaux titres de World War III sont susceptibles pour une fois d’attirer un public différent, et plus mature. Même les hits les plus évidents ont une nouvelle patine plus sombre, comme en témoigne « Hey Superstar », qui, même s’il est une fois de plus bâti sur un refrain fédérateur, est construit sur une structure en dent de scie qui joue sur une grande palette d’émotions.
« They’re Coming For Me » évoque un démarquage moderne et plombé du SIMPLE MINDS des stades 80’s de par son ampleur et sa dynamique, avec des chœurs que n’auraient pas reniés les DEF LEP. Et même le son synthétique/dance qui caractérisait des titres comme « Statistics » sur l’album précédent à gagné en profondeur, depuis que le groupe n’hésite plus à plonger les deux pieds en avant dedans. Ainsi, le bref « Fireworks » doit autant à un FRONT 242 très light qu’à Lady Gaga ! Surprenant, mais délicieux!
Le morceau suivant, « Across 5 Oceans » joue d’ailleurs sur le même registre, ce qui n’est sûrement pas un hasard, mais il agrémente cette fois ci la rythmique elastico-techno d’un refrain carrément béton, qui va sans aucun doute soulever les foules pour la tournée à venir. Un nouveau moment fort pour un album qui n’en manque pas.
Et dans le même panier, vous pouvez aussi poser délicatement « Heroine », qui sur un texte grave s’autorise une relecture du U2 d’Achtung Baby version Dance Metal, pour une efficacité maximale. Autre hit à mettre au crédit des LAKE ! On retrouve aussi l’influence de la bande à Bono sur le très malin « Take It Or Leave », plus nuancé et plaçant un phrasé Rap sur un pont relativement bien senti.
Même les morceaux les plus ouvertement « agressifs » font preuve d’une créativité nouvelle, comme le rythme bancal de « Blood Red Flags », ou l’épaisseur rythmique de « Imagineer ».
J’avais été relativement acerbe envers le premier album de MADINA LAKE. Plus modéré, mais toujours suspicieux, quoique certain que les choses allaient encore s’améliorer avec leur second effort.
Ce World War III prouve que ma ténacité était pertinente, car maintenant, les américains sont maîtres de leur musique, et certainement un des meilleurs gangs sur leur créneau. Gommées les petites erreurs de jeunesse, la vie s’est chargée de leur apprendre que la maturité vient avec l’expérience, ce qu’ils nous prouvent avec ce LP de très haute volée.
Ce qui démontre une fois de plus qu’à toute chose, malheur est bon.