SOLEIL NOIR (2007)
Auteur : Nicholas Goodrick-Clarke
Traduction : Français
Langue : Sébastien Raizer
Parution : 1er Juillet 2007
Maison d'édition d'origine : New York University Press
Maison d'édition Française : Camion Noir
Nombre de pages : 508
Genre : Nazisme ésotérique et Extrême droite internationale
Dimension : 15 x 21 cm
ISBN-10 : 2910196658
ISBN-13 : 9782910196653
Le nazisme aura sans doute été la plus grande source de fantasmes en tous genres du vingtième siècle. Recenser tous les ouvrages consacrés à l’Holocauste, Hitler et ses sbires, le troisième Reich, Mein Kampf, ou la deuxième guerre mondiale en général devient un travail de titan tant les références se multiplient sans faiblir.
Soleil Noir, propose une étude ésotérique de l’antisémitisme allemand, ses racines, ses influences, ses conséquences, et ses disciples.
On a très souvent associé cette période sombre de l’Histoire et ses acteurs à l’occulte, mais il était intéressant de rassembler tous ces éléments dans un seul ouvrage, ce que Nicholas Goodrick-Clarke tente de faire ici, une fois de plus. Spécialiste indépendant, chercheur, consultant, écrivain et traducteur, Nicholas Goodrick-Clarke a travaillé à la prestigieuse faculté d’Oxford, et publie fréquemment dans les revues universitaires. Force est de reconnaître après lecture que ses investigations sont fouillées, et abondamment documentées.
Peu de chapitres sont néanmoins consacrés directement aux Nazis, la plupart abordant le problème de biais, en traitant d’écrivains, de scientifiques, de philosophes, sociologues ou hommes politiques influencés par les doctrines élitistes du Reich.
On aborde le problème bien souvent sous l’angle politique, avec la situation de l’extrême droite américaine ou anglaise et ses principaux meneurs. Ces chapitres sont d’ailleurs les plus intéressants, car ils se basent sur une réalité concrète, et des faits bien précis.
Les chapitres traitants des aspects les plus occultes liant le Nazisme à l’ésotérisme historique et mythologique ne sont pas dénués d’attrait, mais le plus souvent tombent dans une science fiction à la limite du pulp, comme l’attestent les « Ovnis Nazis », qui tiennent une place importante dans la symbolique aryenne post 1945. La description de ces derniers convois allemands, se dirigeant en arctique à bord de sous marins, pour implanter le plus grand centre d’expérimentation d’armes et d’appareillages futuristes dans le grand Nord peut faire sourire, si elle n’avait pas une si grande influence sur l’esprit dérangés de nostalgiques, incapables d’admettre la défaite de l’empire Nazi.
Mais de très respectables individualités se sont aussi penchées sur la nature religieuse d’Hitler, telle la femme de lettre Savitri Devi, qui voua un véritable culte au Führer, au point de voir en lui l’incarnation terrestre d’une divinité Hindoue, ou avatar.
Et c’est bien la tout le côté tendancieux de l’entreprise et des velléités d’obédience de tous les nostalgiques du 3ème Reich, cette volonté de sacraliser l’image d’un dictateur et de lui conférer une dimension surnaturelle, de le déifier au point de lui faire perdre son abomination, en l’associant à des cultes aveugles et terriblement subjectifs. De tenter de faire oublier qu’il n’a été qu’un monstre définitivement inhumain, au service d’une cause et d’un leitmotiv meurtriers, et non pas d’une mission divine que lui auraient confiées d’illustres icônes mythologiques, pour purifier le monde et le débarrasser de ses scories impures.
Car c’est bien l’absence de prise de position de l’auteur qui gène, tant on a l’impression par cette demie prise de distance à laquelle il se livre qu’il cautionne discrètement ce qu’il prétend dénoncer.
Au niveau purement littéraire, ce livre est un pavé qui n’est pas destiné à tous les yeux, tant sa lecture est difficile et pénible. L’accumulation de données le confine à une recherche d’exhaustivité relativement insupportable par moments, tant on se perd dans le dédale de dates, de noms, qui s’enchevêtrent sans cesse, et qui finissent par lasser, tant on a de la peine à se souvenir du fil initial de la narration, alors que le découpage en chapitres est assez régulier et précis.
De plus, l’approximation est souvent grossière, notamment dans les passages traitant de la relation entre satanisme, nazisme et musique, et l’évocation sommaire de groupes à tendance « White noise ». Car mis à part la citation de BLOOD AXXIS, peu d’autres groupes sont évoqués, et l’on passe à coté de LAIBACH, DER BLUTHARSCH, CURRENT 93, etc…
Quant au Black Metal, il se limite à ABSURD et BURZUM, ce qui est un raccourci bien limite dans un paysage sonore ou l’affiliation à l’extrême droite est de plus en plus fréquente.
Le final du livre n’offre de plus que très peu d’intérêt, avec ses chapitres consacrés à la conspiration mondiale, l’identité Chrétienne, et le paganisme, qui font plus ou moins figure de remplissage.
En résumé, et si l’on s’intéresse au fond, on s’aperçoit bien vite que très souvent, les admirateurs du Nazisme commettent la même erreur que leurs illustres idoles, à savoir de fonder leurs croyances sur des fumisteries, et autres documents frelatés et infestés de mensonges. « Le Protocole des Sages de Sion », « The Turner Diaries », et autres pamphlets nauséabonds rédigés par des dictateurs de seconde zone prouvent une fois de plus, que la réalité de l’Histoire est bien plus forte que ces révisions de bas étage.
Mais il aurait fallu pour dénoncer toute cette imagerie de pacotille ne pas se livrer à des assimilations faciles, des raccourcis flagrants, et ne pas terminer son ouvrage par un parti pris à peine déguisé.
Ajouté : Mercredi 28 Janvier 2009 Chroniqueur : Mortne2001 Score : Lien en relation: Camion Noir Website Hits: 55087
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