HOLLOW CORP. (FRA) - Romain Fiorot (Oct-2007)
Un premier album qui déchire comme pas permis, Metal-Impact ne pouvait pas laisser passer ça. Du coup, quelques petites questions auxquelles Romain, bassiste de son état, a bien voulu répondre. On sent dans ses réponses, comme c’est déjà le cas avec la musique d’HOLLOW CORP., que la maturité est bien présente. Et c’est là qu’on voit que la maturité ne veut pas forcément dire d’être devenu un petit garçon bien sage...
Line-up : Laurent Michalak (batterie), Romain Fiorot (basse), Mathieu Roszak (guitare), Guillaume Schleret (guitare), Stéphane Azam (chant)
Discographie : Cloister Of Radiance (Album - 2007)
Metal-Impact. Bonjour HOLLOW CORP. Pouvez-vous nous parler de vous, de votre histoire et de celle de vos membres ?
Romain Fiorot. Quatre d’entre nous ont été membres de COVERAGE, formation que nous avons décidé de saborder en été 2005, pour donner naissance à HOLLOW CORP., dont l’approche est d’emblée plus radicale, plus violente, plus lourde. À ce moment, aussi, nous nous sommes séparés de Romu (Wolf), qui officiait à la guitare, mais qui brillait surtout par son extraordinaire capacité à être toujours occupé à autre chose que son instrument et les répétitions. Ceci, ajouté à quelques autres raisons que l’on ne va pas détailler ici, a fait que nous avons préféré faire table rase du passé pour mieux repartir, sur de nouvelles bases. Et nous avons proposé à Guillaume de nous rejoindre, sachant d’avance que le nouveau projet allait le motiver. Quant à Romu, il est toujours auprès de nous, en tant que conseiller et soutien très actif du groupe, et comme stage manager lors des concerts.
MI. Vous lorgnez vers différentes horizons musicaux en les mélangeant et en les triturant pour donner quelque chose de très personnel. Comment qualifieriez-vous votre musique ?
Romain. Vaste question ! Si l’on veut vraiment nous classer, on pourra tenter de dire que nous faisons du Post-Hardcore, ou du Sludge Metal, c’est ce que j’ai l’habitude de dire pour résumer. Mais dans notre marmite on trouve aussi des ingrédients Indus, Noise, Atmosphériques, et parfois Death !… Certaines chroniques sur le web parlent de « Death Progressif » ! Alors allez savoir ; ce n’est pas très simple à définir ! Disons que nous sommes un groupe de rock lourd, et que nous aimons jouer fort !!!
MI. Comment en êtes-vous venu à faire ce genre de musique et pas une autre ? Est-ce quelque chose de réfléchit ?
Romain. Nous jouons relativement spontanément notre soupe sonore : nous nous faisons avant tout plaisir, sans vraiment planifier notre style et notre esthétique, et ce qui en ressort est le résultat que vous connaissez. Nous essayons malgré tout de rester un minimum cohérent, ce qui n’est pas toujours aisé lorsque l’on est cinq, avec cinq approches parfois différentes ! Mais ça peut donner des résultats inattendus ! En règle générale, chaque morceau est initialement préparé par un, deux, voire trois d’entre nous, puis il est soumis à l’arrangement en commun, lors duquel chacun donne son avis et trouve sa place. Ce qui fait que Cloister of Radiance est traversé par au moins deux styles différents, sinon plus !
Et si nous faisons ceci plutôt que cela, c’est essentiellement parce que nous sommes tous tombés dedans étant petits, et que faire du rock, étant adolescents, c’était à notre portée !!! Comme pour tous les jeunes groupes que vous interviewez, probablement !… Et maintenant que nous sommes plus vieux, nous sommes juste un peu plus conscient de ce que nous faisons, nous jouons un peu moins mal qu’avant, et, par contre, toujours un peu plus fort !
MI. Dans la chronique de l’album, je parlais de « Sabbat » et de son riff principal qui me faisait penser à un riff Hard Rock ou Heavy Metal d’antan. Est-ce un hommage à un groupe particulier ou plutôt à une époque ? Ou rien de tout cela peut-être...
Romain. Stef en est l’auteur, il saura vous répondre ! Quant à moi, je confirme que c’est un riff super amusant à jouer, justement pour son côté vieux Hard Rock des familles, et ça me met en joie de le faire à chaque fois !!!
MI. En parlant d’hommage, on peut parler aussi d’influences. Quelles sont les votre ? Ont-elles un réel impact sur vos compositions ?
Romain. Elles sont nombreuses, et d’importance variable… C’est évident que nous sommes influencés par ce que nous connaissons et aimons, et ça se ressent dans nos compositions, c’est même inévitable ! Ce que je crains toujours, à ce propos, c’est de mal digérer nos influences majeures, et que nous soyons taxés de plagiat, de maladresse, de servir du réchauffé, de la re-sucée ! C’est un truc délicat, surtout que le nombre de groupes ne cesse d’augmenter dans cette branche du Metal. Ce que l’on peut affirmer sans trop se tromper, c’est que, de fait, nous empruntons une certaine voie dans le Metal actuel (ou du moins nous espérons en être digne !), celle qui a été inaugurée par des groupes comme NEUROSIS, GODFLESH, BREACH, ISIS, MASTODON, etc. Pour ne citer que les plus populaires et les plus évidents. On pourra aussi mentionner les CULT OF LUNA, ZATOKREV, UNFOLD, KRUGER, KEHLVIN, PELICAN, OLD MAN GLOOM, par exemple, comme étant des groupes qu’on apprécie beaucoup dans le genre, mais aussi, plus généralement, les incontournables BLACK SABBATH, PINK FLOYD, LED ZEPPELIN, IRON MAIDEN, KING CRIMSON, MINISTRY, ZAPPA, etc.
MI. Vous avez apporté un soin particulier sur le contenant de l’album. Etait-ce pour vous important de sortir un album aussi abouti dans sa conception dés votre premier album ?
Romain. Mea Culpa, je suis l’auteur de cet emballage un peu glauque ! A partir de photos faites par Guillaume et Stef, j’ai tenté de développer une esthétique simple et minimaliste qui puisse faire un objet cohérent avec la musique que nous faisons. J’ai été conseillé pour la mise en page, et après je me suis fais plaisir ! L’ambiance de la pochette est un peu réductrice dans le sens ou elle est essentiellement industrielle (et délabrée), mais elle prend tout son sens avec le nom que nous portons. Et il fallait se concentrer sur une idée basique et assez frappante pour supporter le disque. Donc oui, c’était important de faire un tout cohérent ! Et c’est encore mieux de le faire soi-même quand on peut (et accessoirement plus pratique et économique !) !
MI. Le visuel du disque est sombre, un peu crasseux. Assez glauque en fait. La musique est lourde, pesante, parfois grasse. Le chant est à la fois écorché, hargneux et mélancolique. Y a-t-il de la place dans HOLLOW CORP. pour une petite étincelle de joie, même si pas forcément version « Petite maison dans la prairie » ?
Romain. Allons donc !!! Tout n’est pas désespéré là-dedans ! Par exemple la toute fin de « Peripherals », qui, lorsque Guillaume l’enregistrait au studio, m’évoquait un petit lapin sautillant dans les prés !!! C’est vrai, ça m’a traversé l’esprit ! Bon, à part ça...
MI. Votre musique métallique est-elle un exutoire ? Un défoulement ? Un moyen d’expression et de revendication ? Juste une expression artistique ?
Romain. En ce qui me concerne et ça n’engage que moi, un peu tout cela à la fois, l’exutoire étant quand même ma motivation première ! Quant à expression et revendication, c’est plus implicite. Nous ne sommes pas un groupe à tendance revendicative, nos textes ne sont pas politiques par exemple (du moins ça n’est jamais vraiment explicite). Mais le nom du groupe en dit assez long sur ce que nous pensons de certains aspects du monde. Ca s’arrête là. Des groupes excellents dans la critique sociale et politique, ce n’est pas notre spécialité.
Ce que nous faisons s’apparente davantage une expression violente, explosive, désordonnée et spontanée de notre vision du monde, des rapports humains, de l’esprit, du corps, de la maladie, de la mort, du sexe, de la servitude, etc. Et le tout vous est servi par Stéphane qui excelle dans l’art d’écrire des textes à géométrie variable, à tiroirs, à double lecture, et bien souvent tournés de manière ésotérique !
Quant aux parties instrumentales, lorsqu’elles sont autre chose que des riffs bêtes et méchants de hard-rock pour assommer l’auditeur, nous essayons au maximum de nous en servir pour porter une ambiance, une atmosphère, une humeur, un état d’esprit…
MI. Vous avez signé chez Dental Records, un label suédois. Est-ce que vous pensez que cela va vous aider à percer à l’étranger ?
Romain. Ca peut effectivement être un avantage. L’album étant un produit franco-hélvético-suédois, ce qui est déjà intéressant et sympathique en soi, il risque probablement d’être d’emblée perçu et entendu assez largement en Europe… Il suffit de lire les chroniques sur le web pour se rendre compte que cette particularité (franco-hélvético-suédoise) est régulièrement mentionnée.
Nous sommes aussi en train de réaliser à quel point le fait d’être distribué en Europe pour notre premier album peut s’avérer être un atout. Et il faut aussi préciser que du côté de Dental Records comme du côté de Innovative Promotion, tout le travail est fait pour aller dans ce sens. Nous sommes bien entourés et bien soutenus, et toute notre gratitude va à ces personnes !
MI. D’ailleurs, on dit souvent que la Metal français ne s’exporte pas bien. Vous en pensez quoi ? Et pourquoi, selon vous, arrive-t-on souvent à ce constat ?
Romain. Pour caricaturer grossièrement, il semble qu’il existe une certaine inertie du côté hexagonal, en même temps que certains préjugés de nos voisins sur les groupes français… Je me sens assez peu capable d’analyser et d’expliquer le phénomène, en fait. Ce n’est peut-être qu’un sentiment général sans fondement, je ne sais pas… Mais je me souviens d’une critique étrangère de l’album où le chroniqueur se dit surpris d’entendre un groupe français sonner comme ça !!! Je ne me souviens plus du webzine ni de sa nationalité, mais peu importe, ça résume un peu la situation !
MI. Y a-t-il une tournée de prévue pour promouvoir Cloister Of Radiance ? Y a-t-il des dates clés dont vous voudriez parler ?
Romain. Le sujet qui nous chagrine… Pour le moment, c’est très calme, le calendrier est vierge, aïe !!! Nous n’avons actuellement plus de tourneur, donc, pour info, nous sommes à la recherche d’une agence de booking adaptée et motivée… Cependant nous essayons déjà de défricher le terrain par nous-mêmes, et nous avons bien l’intention de mettre quelques dates en place pour l’hiver et le printemps. Nous allons donc faire au mieux pour ne pas trop faire retomber l’enthousiasme dû à la sortie du disque et en faire la promo dignement !
MI. Est-ce qu’il y a des groupes avec lesquels vous aimeriez tourner ?
Romain. Ah ben oui ! Déjà tous ceux que l’on a déjà cités comme étant nos « pères spirituels », les plus accessibles, évidemment, soyons réalistes ! Ou, par exemple un groupe comme ENTOMBED, avec qui le label nous a dit un jour que, pourquoi pas, sur quelques dates nous pourrions partager l’affiche. Bref, ils sont nombreux, tous ceux avec qui nous voudrions faire un bout de chemin, du moment qu’on en partage l’esprit, le style (au sens large), et avec qui nous serions susceptibles de passer de bons moments !
MI. On parle souvent de votre participation aux Eurockéennes de Belfort cette année. Quel retour pouvez-vous nous donner sur ce festival ?
Romain. Ca a été une expérience vraiment agréable, un peu intimidante au départ (c’était nouveau pour nous) mais bien trippante en fin de compte. Une scène bien large, un son énorme dans le chapiteau ET sur scène, du public plutôt réceptif dans l’ensemble, un accueil ultra-efficace, une prise en charge limite excessive… ! On est heureux d’avoir eu cette chance, d’autant que c’est toujours une bonne occasion de faire parler de soi ! Et il paraît que notre prestation était plutôt pas mauvaise !
MI. Abordez-vous un festival de la même manière qu’un autre concert ? Si non, qu’y a-t-il de particulier ?
Romain. Les Eurocks, par exemple, c’est un énorme festival, avec une organisation de malade et la logistique qui va avec, et c’est donc forcément un peu moins convivial et plus stressant qu’une date à trois groupes dans un club ! Mais c’est amusant aussi, ce côté urgent, cette fourmilière sonore, les horaires que tous les groupes doivent respecter, donner le meilleur de toi en 40 minutes sans possibilité de rappel… C’est une approche différente mais pas déplaisante du concert. Et ça donne aussi la possibilité de rassembler dans un même lieu des groupes et des spectateurs qui sans cela ne se seraient jamais rencontrés, entendus, etc. Nous aimons assez que notre public ne soit pas constitué que de fans de Metal, de spécialistes en Sludge ou Post-Hardcore...
MI. Y avez-vous fait des rencontres intéressantes ? D’autres groupes aves lesquels cela a bien accroché ?
Romain. Aux Eurocks, oui ; les PUNISH YOURSELF, rencontrés le lendemain, sur la même scène (la Loggia), par exemple. Des gens vraiment sympas, qui font une musique bien extrême comme on aime !!!
MI. De ce que j’en ai lu, Cloister Of Radiance semble bien accueilli, voire plus. Cela place la barre très haut pour votre futur et votre prochain album. C’est quelque chose qui vous angoisse ? Vous y pensez déjà ?
Romain. C’est sûr que nous y pensons déjà, d’autant que nous sommes en train de bosser sur les embryons de futurs morceaux, avec lesquels nous continuons à nous faire plaisir ! Quant à angoisser pour le futur album, non, nous ne sommes pas vraiment inquiets pour l’instant. Et justement, l’accueil globalement positif de Cloister of Radiance est une vraie source d’encouragement et de motivation. Et puis, comme on dit, chaque chose en son temps !
MI. On peut télécharger sur votre site le clip de « Thujon ». Pourquoi avoir choisit ce titre en particulier ?
Romain. Nous avons tous pensé que cette chanson est adaptée à la forme du clip, car, premièrement, elle est assez dynamique, avec des changements violents d’ambiance, et deuxièmement, nous avons constaté qu’elle était assez fédératrice, dans le sens où il semble qu’elle plaise à pas mal de gens. Il faut avouer qu’elle est un peu moins barrée et angoissante que le reste du disque (en apparence !), ce qui fait qu’on ne passe pas tout de suite pour des sauvages dérangés ! Mais le texte est carrément sinistre, en fait ! Après, nous aurions tout aussi bien pu mettre en clip l’un ou l’autre morceau, mais cela se fera peut-être plus tard...
MI. Ce clip mélange une histoire au look un peu rétro avec le tournage en lui-même. D’où vous est venue cette idée ? Et pourquoi ce décor en particulier ?
Romain. Nous avions au départ des idées assez floues sur le scénario à suivre, mais nous étions d’accord pour livrer une ambiance début XXe siècle, avec costumes et noir et blanc. L’idée était d’élaborer un petit univers étrange et désuet, assez kafkaïen, et d’essayer de plonger le spectateur dans cette atmosphère un peu bizarre. Et lorsque nous avons commencé à discuter d’un scenario avec Seb, le réalisateur-monteur, nous avons vite réalisé qu’entre l’indigence de nos idées assez vagues, le tout-petit-budget, et le peu de temps disponible, il valait mieux parodier un peu le concept de clip et faire un objet bâtard entre le détournement et le clip super cheap, ce qui nous permettait d’assumer le manque de moyens. Donc on ne se prend pas vraiment au sérieux, on prend du recul par rapport au premier niveau de lecture (l’ambiance rétro), et du coup, on déstabilise toute tentative de narration comme ce qu’on peut voir dans de nombreux clips avec des vrais budgets ! En réalisant la mise en abyme, le tournage du tournage qui part en couille, on ne sait plus quoi penser de ce qu’on voit, c’est assez chaotique, et c’est ce qu’on voulait ! Quant au lieu, on a pris cette vieille usine parce que ça faisait tout simplement l’affaire pour l’ambiance, et la commodité du tournage (le Grillen, salle de concerts à Colmar, est aménagée dans ce même bâtiment).
MI. Une anecdote particulière du tournage à faire partager ?
Romain. Oh oui, et même plusieurs !
1/ La veille du tournage, l’actrice qui aurait du être possédée (au début) s’est entaillé la main avec un verre cassé et est ressortie des urgences avec un énorme bandage ! Donc, remplacement in extremis par une autre amie à nous !
2/ Il faisait très froid dans cette saloperie d’usine désaffectée (au mois de janvier) !
3/ Seb, le réalisateur, a volontairement mis Stéphane dans un état de tension et de stress, ce qui fait que lorsqu’il pête les plombs, c’est assez réaliste et ça nous a bien fait flipper sur le tournage !
4/ La batterie qui apparaît sur les parties live du groupe est vraisemblablement un kit qui a été utilisé par le batteur de LIVING COLOUR (d’après Lolo notre batteur, endorsé par Mapex Drums, publicité oblige !).
MI. Est-ce que les clips sont pour vous un élément incontournable ? Et en referez-vous ?
Romain. Oui, c’est une bonne chose de faire des clips ; ça sert de vitrine pour la promo du groupe et ça permet de distiller des images en accord avec la musique. C’est un support graphique intéressant à exploiter. Et en plus on peut bien s’amuser aussi par la même occasion ! Donc oui, nous en referons, des plus ou moins élaborés… selon le temps et les moyens !
MI. Merci pour le temps que vous nous avez consacré. Un petit mot de la fin avant de se quitter ?
Romain. Vive l’industrie lourde !!! (et surtout la métallurgie polonaise !) Et merci pour vos questions, ça fait du bien d’en parler, on se sent moins seul !!! Blague à part, c’est un plaisir pour nous de causer un peu, et pardonnez-moi si j’ai été long ! A bientôt !
--- Votre serviteur, Romain, avec la bénédiction de mes frères, en léger différé du Néant ! ---
Ajouté : Dimanche 18 Novembre 2007 Intervieweur : Wong Li Lien en relation: Hollow Corp. Website Hits: 20341
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