MARDUK (se) - Morgan (Avril-2007)
Entretien avec Morgan, guitariste fondateur de MARDUK qui vient de sortir son dernier album « Rom 5:12 »...
Line-up : Morgan (guitare), Mortuus (chant), Debo (basse), Lars B. (batterie)
Discographie : Dark Endless (1992), Those Of The Unlight (1993), Opus Nocturne (1994), Fuck Me Jesus (1995), Heaven Shall Burn… (1996), Glorification (1996), Live In Germania (1997), Here’s No Peace (1997), Nightwing (1998), Panzer Division Marduk (1999), Obedience (2000), La Grande Danse Macabre (2001), Hearse (2003), World Funeral (2003), Plague Angel (2004), Deathmarch (2004), Rom 5:12 (2007)
M-I Interviews du groupe : MARDUK (se) - Legion (Déc-2002), MARDUK (se) - Morgan (Avril-2007)
Metal-Impact. Salut Morgan, tout d’abord, peux-tu nous dire ce que vous avez fait depuis la sortie de votre précédent album ?
Morgan. Hé bien, l’album est sorti un peu partout en novembre / décembre 2004 donc nous sommes aussitôt repartis en tournée en Europe pour une vingtaine de dates, puis nous somme rentrés à la maison où nous avons élaboré une nouvelle set-list pour la deuxième partie de la tournée qui devait avoir lieu au début du printemps mais, par malheur, Emil, notre batteur a eu le bras cassé lors d’une rixe et environ un mois après je me suis fracturé la main donc nous avons vraiment joué de malchance. Cela fait que nous n’avons pu entamer la deuxième moitié de la tournée qu’au mois d’août. Nous avons ensuite enchaîné avec l’Amérique du Sud puis nous nous sommes concentrés sur l’écriture du nouvel album.
On a aussi enregistré beaucoup de choses live pour la sortie de notre DVD « Blood, Puke, Salvation » et nous revoici avec le nouvel album !
MI. Peux-tu nous présenter Lars B., votre nouveau batteur et nous dire comment vous l’avez trouvé et pourquoi il fût le meilleur choix pour MARDUK ?
Morgan. Nous étions sur le point de changer de batteur depuis que nous avons commencé à travailler sur le nouvel album.
En fait, sur ce disque, Emil, notre précédent batteur, n’en joue que la moitié et c’est un batteur local de ma connaissance qui joue l’autre moitié.
On a essayé quelques trucs avec ce batteur puis après l’enregistrement de l’album on s’est vraiment mis à chercher quelqu’un. Devo, notre bassiste, qui par chance se trouve être aussi notre technicien-studio nous a parlé d’un gars qu’il avait sous la main à ce moment-là en studio donc nous avons proposé à ce dernier de venir, nous avons fait un essai qui s’est bien passé et nous l’avons invité à se joindre à nous en renfort. Nous avons aussi parlé philosophie, musique et d’autres choses de ce genre et nous en sommes ressortis satisfait, donc nous l’avons gardé. C’est le premier que nous avons essayé.
Je ne voulais pas d’un autre gars qui ait pu jouer dans un groupe connu, je voulais avant tout quelqu’un qui ait envie d’en découdre.
Il s’est montré très dévoué envers ce que nous faisions donc ça c’est bien passé.
MI. On peut dire que vous avez eu de la chance !
Morgan. Oui, absolument !
MI. Selon moi, la manière dont vous avez réinventé votre propre style sur Rom 5:12 démontre que vous avez une grande liberté dans la composition. Mais malgré cela, avez-vous certaines limites ou croyez-vous, par exemple, que vous pourriez re-composer un jour une chanson comme “Echoes from the Past” (sur “Those of the Unlight”) si vous le sentez comme ça ou avez-vous certains critères auxquels vous voulez absolument vous tenir ?
Morgan. Non, nous n’avons pas de critère précis, nous laissons juste notre énergie s’exprimer, même si je ne ferais pas certaines choses qui diffèrent trop de ce qu’on joue habituellement. Je n’ai pas de schéma précis mais je sais ce que je veux pour le groupe.
Je veux dire par là que la musique est une inflexion naturelle qui dépend de là où tu te trouves sur le plan philosophique donc elle nous vient spontanément.
MI. Peux-tu nous dire comment tu vois le rôle des invités sur cet album ?
Morgan. Nous sommes un groupe qui a rarement eu recours à des invités. Je crois que, la dernière fois qu’on en a eu, ça remonte à 1994.
Mais comme c’est notre 10e album on s’est dit que c’était assez extraordinaire d’avoir été là tout ce temps et nous avons voulu faire quelque chose de spécial. C’est Mortuus, notre vocaliste actuel, qui a eu l’idée de demander à Joakim, notre ancien vocaliste, s’il voulait faire quelque chose avec le groupe. Il a trouvé que c’était une très bonne idée et ça a été d’autant plus facile qu’il vit très près de nous. En plus il était flatté qu’on lui demande.
Ca a été quelque chose de magique pour moi d’avoir l’ancien chanteur et le nouveau réunis en studio, à faire cette chanson ensemble, cela symbolisait une unité et une fraternité particulière.
J’ai aussi adoré cela parce que j’aime la façon dont Joakim utilise sa voix.
Le deuxième invité qui intervient, c’est Alan, le chanteur du groupe irlandais PRIMORDIAL. J’aime beaucoup ce groupe et la façon dont il utilise sa voix avec eux, même quand il chante en voix claire elle a un côté très « brut ». De plus, c’est quelqu’un de super. C’est pourquoi nous avons pensé que ce serait super de le laisser « parler » pour MARDUK.
MI. Pour ce qui est de la participation d’Alan, depuis combien de temps vous connaissez-vous et que penses-tu d’un groupe comme PRIMORDIAL, qui a une approche différente du Black Metal avec, par exemple, un son de batterie très naturel et un son de guitare « sale » ?
Morgan. Effectivement, je trouve que c’est un groupe tout à fait unique. J’aime particulièrement leur dernier album (NDR : « The Gathering Wilderness »).
J’aime l’atmosphère qu’ils créent, leur musique a une âme et c’est ce qui manque le plus souvent aux groupes à l’heure actuelle. C’est vraiment un groupe que j’adore !
Je ne sais pas si tu connais Alan mais la conviction et la dévotion qu’il a envers sa musique ainsi que ses convictions philosophiques sont vraiment admirables. C’est une personne remarquable.
MI. Il y a eu pas mal de noms célèbres du Metal qui ont fait une pause ces dernières années, voire même se sont séparés (je pense à OBITUARY, SUFFOCATION, IMMORTAL, EMPEROR etc, etc.), penses-tu que vous pourriez vous aussi faire une pause un de ces jours ? Ou MARDUK est-il vraiment une machine inarrêtable ?
Morgan. Je ne peux pas affirmer que je ne le ferai jamais mais je ne vois vraiment pas comment ça pourrait arriver : c’est ce pourquoi je vis, j’adore créer et je passe ma vie à ça.
Ce que je n’aime pas, ce sont les groupes qui donnent l’impression qu’ils se sont séparés pour faire un « come-back », si tu vois ce que je veux dire.
On est là depuis 17 ans et je n’ai pas du tout l’intention de faire une pause. Pour le moment je suis tourné vers l’avenir et j’attend avec impatience d’aller tourner dans des pays que nous n’avons encore jamais visité avant. Puis d’attaquer la composition du prochain album pour lequel j’ai déjà en tête des idées assez nettes.
MI. Et es-tu comme beaucoup de musiciens dans le Metal qui font beaucoup de choses différentes à côté de leur groupe pour avoir une perspective différente sur ce qu’ils font ou simplement se détendre ? Ou est-ce que MARDUK est toujours toute ta vie, 24 heures sur 24 ?
Morgan. Peut-être 50% de ce que je fais n’a pas de lien direct avec MARDUK et il y a beaucoup de démos que j’ai enregistrées pour MARDUK que les gens n’ont jamais entendu, j’ai aussi enregistré à l’époque de « World Funeral » une démo 4-titres intitulée « Portrait Of Dead Children » que je prévoyais éventuellement de sortir comme un mini-album, des choses plus primitives, une démo 2-titres nommée « Todes Reich » dans une veine plus industrielle ou figurent un titre intitulé « Todes Reich » et un autre intitulé « Funeral Nation ».
MI. Quiconque a jeté un oeil à vos paroles un jour ou l’autre aura pu remarquer sans difficultés à quel point l’histoire te passionne. A ton sens, quelle place ont les paroles dans MARDUK ? Penses-tu qu’il est fondamental de les comprendre pour parfaitement appréhender MARDUK ?
Morgan. Je le crois, oui. Bien évidemment, quiconque va jeter un œil aux paroles va les percevoir d’une manière différente. Ca ne me pose pas de problème mais pour moi elles sont aussi importantes que la musique. Quand j’aime un groupe, je me plonge toujours dans leurs paroles et quand celles-ci s’avèrent minables je perd une partie du respect que j’ai pour ce groupe. Il est important que les paroles et la musique forment un tout et se reflètent à tout point de vue.
MI. Oui, mais beaucoup de groupes ne pensent pas ainsi.
Morgan. Et c’est pour ça qu’il y a beaucoup de merde dans ce qu’on peut lire. Mais, après tout, qui suis-je pour en décider ? Les gens aiment toujours beaucoup de choses différentes. Personnellement, je met beaucoup d’énergie à les écrire et les modifier, et ce jusqu’à la dernière minute. Parfois même je pars d’un titre ou d’un texte que j’ai en tête puis construit la musique à partir de là. Ou bien c’est un riff qui m’inspire une ligne de chant ou un bout de texte. C’est comme ça que je travaille.
MI. Tu es un perfectionniste ?
Morgan. Non, je ne me définirais pas comme perfectionniste car, après coup, tu vois toujours des choses que tu aurais voulu faire différemment. Mais c’est ce qui te fait aller de l’avant et essayer de nouvelles choses en permanence. A côté de ça, je considère que chaque album reflète ce que j’étais à une période donnée. Chacun d’eux est fondamental à sa façon car tu progresses, toutes ces années durant, comme homme mais aussi comme musicien.
J’ai toujours du respect pour chacun de nos albums et tous ont une place particulière dans mon cœur.
MI. MARDUK est un des plus anciens groupes de la scène Black Metal suédoise. 17 ans et toujours là. Dans quel sens es-tu fier de cela, et à quel genre de sacrifices personnels et professionnels as-tu consenti pour y arriver ?
Morgan. C’est vrai que j’ai sacrifié beaucoup de choses. Des choses que les anciens membres du groupe ont eu l’occasion vivre. Je pense à une vie sociale, à une vie de famille… Je suis le seul à être resté, à avoir continué à travailler, à avoir gardé la motivation pour faire avancer le groupe durant autant de temps.
Nous n’avons jamais eu de management ou de choses comme ça vois-tu, je m’en suis toujours occupé moi-même car c’est toute ma vie, ce sur quoi je me concentre en permanence.
MI. Et c’est très dur...
Morgan. Oui, mais tu sais, 17 ans finalement ça passe vite et tant que j’aurai la motivation nécessaire, je continuerai à faire ce que je fais.
MI. A l’inverse de nombreux autres groupes de Black Metal, MARDUK a toujours été un groupe de scène très actif. Es-tu d’avis qu’il faut continuer à faire vivre le Black Metal en faisant autant de concerts que possible ?
Morgan. C’est à chacun d’en décider. Mais beaucoup de groupes ont des raisons bien particulières pour ne pas tourner, des fois c’est parce qu’ils chargent trop les morceaux en studio et, au final, sont incapables de les reproduire sur scène.
Et puis, quand tu es en studio, tu travailles la guitare, la basse, la batterie séparément, alors les concerts te donnent l’occasion de tout réunir et de te prendre cette unité en pleine face. Je trouve que c’est quelque chose de magique.
MI. Une question à propos des débuts: Quel est aujourd’hui ton opinion à propos de “Dark Endless”, qui se rapproche plus du Death que du Black ?
Morgan. Je ne sais pas comment tu définis le Death ou le Black Metal, pour moi ça a toujours été du Metal extrême avec des paroles sataniques, ça n’a rien à voir avec un certain type de chant, de son de guitare ou que sais-je encore, c’est un état d’esprit. Je me moque que les gens le voient plus Death ou plus Black. Regarde des groupes comme CELTIC FROST et MORBID ANGEL qui ont brassé ces deux styles. Ou VENOM et POSSESSED : ces groupes-là sont magiques.
De toute façon, on a toujours été influencés par le Death Metal. Prend un groupe comme MORBID ANGEL, il est plus Black que Death à mes yeux mais ça ne me dérange pas qu’on le perçoive autrement, tant que ça reste vraiment du Metal.
A mon avis, ce sont les media qui ont toujours essayé de délimiter les deux styles avec d’un côté le « vrai » Death Metal et d’un autre le « vrai » Black Metal.
MI. Aujourd’hui, en 2007, le christianisme a perdu une grande partie de son influence sur le monde, ne penses-tu pas que se rebeller contre l’Islam serait plus pertinent ?
Morgan. Je ne pense pas que l’Islam a eu un impact aussi important en Europe que le christianisme. On a eu l’Islam aussi par le passé mais il n’était pas aussi fort. C’est le christianisme qui a pris l’ascendant sur l’Europe. Il est là depuis 2000 ans et c’est lui qui a affecté les gens. Mais je ne vois même pas ça comme une rébellion car il n’y a plus rien contre quoi se rebeller : aucun prêtre, ni aucun fidèle n’a réellement de pouvoir aujourd’hui. Nous leur sommes bien supérieurs alors je m’en moque. Cette religion nous a laissé des choses magnifiques sur le plan architectural mais c’est une idéologie défunte.
MI. En ce qui te concerne, ne trouves-tu pas que la musqiue de MARDUK est la parfaite représentation musicale de la vie sur terre de nos jours ?
Morgan. Si. La musique a tendance a être le reflet de ce que tu vois autour de toi, de ce que tu vis et de ce en quoi tu crois.
MI. Si tu devais ramener la carrière de Marduk à l’échelle d’une vie humaine, considérerais-tu désormais ton groupe comme adulte, ou toujours adolescent ?
Morgan. Je ne sais pas, je n’envisage jamais les choses de cette manière. Je ne sais pas vraiment quoi te répondre à part que je me sens fort dans mon corps et mon esprit et que j’essaye de travailler avec des gens qui partagent mes idées et ma philosophie avec pour objectif d’atteindre un certain niveau d’invincibilité. Si j’avais le moindre doute, j’arrêterais et je ferais quelque chose d’autre. Pas comme certains groupes qui auraient dû arrêter il y a dix ans. Il me semble que nous avons encore un potentiel en nous et avons encore des choses à donner. Je me sens fort et motivé comme jamais, j’ai cette énergie en moi.
MI. Quel pourrait-être le parfait épitaphe pour Morgan Steinmeyer Håkansson ?
Morgan. Mmmmh… Je ne sais pas. C’est aux autres d’en décider. Je ne pense pas vraiment à ça, je ne suis pas dans cette perspective, j’essaye seulement de faire ce en quoi je crois, de rester fort de corps et d’esprit et de ne pas laisser les autres me marcher sur les pieds.
MI. Juste avant que MARDUK fasse son apparition sur la scène suédoise, tu étais membre du groupe culte ABRUPTUM, peux-tu nous en dire plus sur IT et l’idée d’ensemble derrière la musique ?
Morgan. L’idée derrière la musique était de créer quelque chose que personne n’avait jamais fait avant. C’était de créer la symphonie satanique ultime, ou en tout cas quelque chose qui n’existait pas dans cette scène. C’était très différent pour l’époque. C’était l’essence du mal dans ce qu’il a de plus noir et de plus pur.
MI. IT se tailladait-il vraiment lorsqu’il chantait ?
Morgan. Oui, nous le faisions tous les deux. C’était une musique très ancrée dans le réel, tu sais.
MI. J’aimerais savoir de quel côté du Satanisme tu te trouves. Penses-tu que c’est un véritable équivalent du christianisme avec des messes noires, des sacrifices, et un éloge aux anciens, ou juste la célébration du moi ?
Morgan. Je pense qu’il y a différents types de philosophies dans le Satanisme mais le mien est un plus sophistiqué que ça, j’ai envie de dire. Il m’a toujours donné des raisons de vivre et de rester motivé.
MI. Quel est ton opinion sur les jeunes de 14-15 ans fascinés par l’imagerie démoniaque bon marché véhiculée par des groupes qui ne savent pas vraiment de quoi ils parlent ?
Morgan. Je ne sais pas, la musique quelle qu’elle soit peut toujours faire forte impression sur l’auditeur, c’est à chacun de déterminer comment il l’envisage et jusqu’à quel point il se laissera affecter par celle-ci. La musique qui incorpore la religion est d’une certaine façon
un instrument de propagande.
Ajouté : Samedi 05 Mai 2007 Intervieweur : Zegogo Lien en relation: Marduk Website Hits: 104805
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